La Commission des clauses abusives,
Vu les articles 1917 et suivants du Code Civil ;
Vu les dispositions du Code de la Consommation et notamment les articles L. 132-1 à L. 132-5 ;
Vu les dispositions du Code de l’action sociale et des familles et notamment des articles L. 311-3 à L. 311-11, L. 313-12, L. 342-1 et suivants et R. 314-158 et suivants, ainsi que D. 311-15 ;
Vu la recommandation n° 85-03 relative aux contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées, qu’il y a lieu d’actualiser ;
Entendu les représentants des professionnels concernés ;Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées contiennent des clauses de nature à déséquilibrer significativement les relations entre les professionnels et des consommateurs qui peuvent être particulièrement vulnérables, au détriment de ces derniers ;
Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des stipulations relatives à la constitution d’un dossier d’accueil ou d’admission, qui imposent la fourniture de documents contenant des données se rapportant à l’état de santé passé et actuel de la personne, dont les modalités de remise à l’établissement manquent de précision quant au destinataire de cette information et au respect de la confidentialité ; que la commission des clauses abusives attire l’attention des professionnels sur l’importance qui s’attache à la définition de procédures assurant le respect de la vie privée, spécialement en ce qui concerne les données personnelles à caractère médical ;
1°- Considérant que certains contrats sont qualifiés de contrats à durée indéterminée ou déterminée, alors même qu’ils prévoient une durée déterminée dans des conditions contraires aux dispositions de l’article L. 342-2 du Code de l’action sociale et des familles, et prévoyant, alors qu’ils sont supposés avoir une durée indéterminée, une durée de un mois, de un an, de six ans, renouvelables tacitement ; que de telles stipulations sont source d’abus en ce qu’elles méconnaissent les termes de la loi ;
2° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des stipulations relatives à l’obligation pour la personne hébergée au titre d’un contrat à durée déterminée de s’acquitter de la totalité des sommes dues jusqu’au terme initial du contrat, lorsqu’il est mis fin par anticipation au dit contrat pour quelque cause que ce soit ; que de telles stipulations sont abusives en ce qu’elles obligent le consommateur à payer une somme d’argent pour une prestation qui ne sera pas fournie, d’autant que rédigées en des termes généraux, elles imposent au consommateur le paiement d’une pénalité contractuelle, alors même que la résiliation serait intervenue pour un motif légitime ;
3° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des stipulations prévoyant, au profit des dits établissements, le maintien pendant l’hospitalisation de la personne âgée, de la facturation de la prestation dépendance ; que de telles stipulations sont abusives en ce qu’elles obligent le consommateur à payer une somme d’argent pour une prestation qui ne sera pas fournie, d’autant que l’absentéisme est déjà pris en compte au moment de la fixation des tarifs dépendance par voie réglementaire ;
4° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des stipulations relatives à la délégation à l’établissement de ses ressources par la personne hébergée, en contrepartie de la mise à disposition d’une somme minime à titre d’argent de poche, alors même que celle-ci ne bénéficie pas de l’aide sociale ; que de telles stipulations sont abusives en ce qu’elles privent la personne hébergée de la libre disposition de sommes qui lui reviennent et sont susceptibles d’être mises en œuvre dans des établissements non habilités à accueillir des personnes bénéficiaires de l’aide sociale ;
5° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des stipulations permettant à l’établissement de modifier unilatéralement des prestations de service complémentaires (ménage, nombre de repas) au cours de l’exécution du contrat, sans justification soumise à l’appréciation du consommateur ; que de telles stipulations créent ainsi un déséquilibre significatif entre les parties ;
6° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent une stipulation imposant à la charge de la personne âgée, en plus du tarif d’hébergement, le paiement d’un trousseau de linge, alors que l’article R. 314-159 du Code de l’action sociale et des familles prévoit que le tarif afférent à l’hébergement recouvre notamment l’accueil hôtellerie ; que cette stipulation est de nature à conduire la personne âgée à un double paiement pour la même prestation ; qu’en cela, elle est abusive ;
7° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des clauses qui permettent à l’établissement de décider unilatéralement de ne pas restituer le linge de la personne âgée au motif qu’il serait hors d’usage ; que de telles clauses portent atteinte au droit de propriété du consommateur ;
8° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent une stipulation qui permet à l’établissement de « mettre fin au séjour, sans préavis, si l’état de santé de la personne entraîne une inadaptation à la structure de l’établissement ou l’impossibilité d’assurer les soins, le tout présentant un danger immédiat pour lui-même et/ou les autres pensionnaires », sans distinguer selon que l’état de santé médicalement constaté et justifiant le transport dans une autre structure, présente un caractère définitif ou provisoire ; qu’une telle clause, qui laisse à l’appréciation arbitraire de l’établissement les conditions de résiliation du contrat, est abusive ;
9° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des stipulations relatives à la facturation, après le décès ou la libération de la chambre, d’une somme forfaitaire destinée à la remise en état des lieux ; que de telles stipulations sont abusives en ce que les sommes revenant à l’établissement peuvent ne pas correspondre à une dépense réellement engagée ou une prestation effectivement réalisée ;
10° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent une stipulation relative à la facturation, après le décès ou la libération de la chambre en cours de mois, de la totalité du prix mensuel de la pension ; que de telles stipulations sont abusives en ce que les sommes revenant à l’établissement peuvent ne pas correspondre à une dépense réellement engagée ou une prestation effectivement réalisée ;
11° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des stipulations qui excluent de manière générale de rechercher toute responsabilité, imputable à l’établissement, en cas de vol ; que de telles stipulations sont abusives en ce qu’elles éludent la responsabilité des établissements ;
12° – Considérant que certains contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées comportent des stipulations relatives à l’exercice des actions en justice imposant la compétence d’une juridiction non compétente soit matériellement soit territorialement ; que de telles stipulations sont sources d’abus en ce qu’elles font échapper les dits établissements au juge normalement compétent ;
Recommande que soient supprimées des contrats les clauses ayant pour objet :
1°- d’induire en erreur le consommateur sur la durée de son engagement ;
2°- d’imposer au consommateur le paiement de pénalités contractuelles lorsqu’il est mis fin à un contrat à durée déterminée pour un motif légitime ;
3°- de maintenir, pendant l’hospitalisation de la personne âgée, la facturation de la prestation dépendance à sa charge ;
4°- de prévoir la délégation à l’établissement de ses ressources par la personne hébergée, en contrepartie de la mise à disposition d’une somme minime à titre d’argent de poche, lorsque la personne hébergée ne bénéficie pas de l’aide sociale ou que l’établissement n’est pas habilité à accueillir des bénéficiaires de cette prestation ;
5°- de permettre à l’établissement de modifier unilatéralement la durée ou la nature des prestations complémentaires initialement convenues ;
6°- d’ajouter au tarif d’hébergement, incluant déjà l’accueil hôtellerie, le paiement d’un trousseau de linge de maison ;
7°- de permettre à un établissement de disposer du linge personnel de la personne hébergée ;
8°- de permettre à l’établissement de résilier le contrat, sans préavis, et en l’absence d’avis médical attestant de l’impossibilité définitive pour l’intéressé de résider dans l’établissement ;
9°- de permettre à l’établissement de percevoir une somme forfaitaire destinée à la remise en état des lieux après la libération de la chambre occupée par la personne âgée ;
10°- de permettre à l’établissement de facturer la totalité du prix de l’hébergement d’un mois en cas de décès ou de libération de la chambre en cours de mois ;
11°- d’interdire de rechercher la responsabilité des établissements, en cas de vol, lorsque aucune possibilité de dépôt auprès d’un préposé n’est envisagée, ou excluant en toute hypothèse toute responsabilité ;
12°- de déroger aux règles de compétence territoriale ou d’attribution des juridictions.
Recommandation adoptée le 13 décembre 2007 sur le rapport de M. Fabrice DELBANO
Voir également :
Consulter la recommandation n° 85-03 relative aux contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées