Cour de cassation
Arrêt du 5 février 2009

1ère chambre civile

Audience publique du 5 février 2009
N° de pourvoi: 06-16349
Non publié au bulletin
Cassation
M. Bargue (président), président
SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat(s)

Attendu que M. X…, titulaire dans les livres de la Banque Y d’un compte depuis le 26 juin 1999 a obtenu le 28 octobre 1999 un crédit reconstituable dit “ P… “ d’un montant de 6 097 euros, puis le 19 février 2002 un prêt personnel d’un montant de 4 574 euros remboursable en vingt-quatre mensualités ; qu’à la suite de l’émission de deux chèques sans provision le 12 septembre 2002, M. X… a fait l’objet d’une interdiction bancaire et a, le 15 octobre 2002 clôturé son compte et réglé partiellement le prêt personnel, le solde faisant l’objet d’un réaménagement ; que M. X… a sollicité devant le tribunal d’instance le remboursement de certains frais, intérêts et commissions qu’il estimait non dus, ainsi que la déchéance du droit aux intérêts de la banque sur le prêt de 2002 ;

Sur les premier et deuxième moyens :

Vu les articles L. 311-10, L. 311-29, L. 311-32 et L 311-33 du code de la consommation ;

Attendu que pour rejeter la demande tendant au remboursement des intérêts perçus en raison de la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, le tribunal retient que la clause qui impose un préavis de trois mois pour rembourser par anticipation un prêt personnel n’est pas abusive et qu’en tout état de cause le caractère abusif d’une clause n’est pas susceptible d’entraîner la déchéance du droit aux intérêts ;

Qu’en statuant ainsi alors que l’emprunteur peut toujours rembourser par anticipation et sans indemnité le crédit consenti et qu’il avait constaté que les dispositions contractuelles prévoyaient un préavis de trois mois de sorte que l’offre de crédit comportait une clause illicite, le tribunal a violé par refus d’application les textes sus-visés ;

Sur le troisième moyen :

Vu les articles 1147 et 1315 du code civil ;

Attendu que pour rejeter la demande tendant à l’octroi de dommages-intérêts pour non-respect par la banque de son obligation d’information sur le crédit P…, le tribunal retient que l’emprunteur ne prouve pas le manquement contractuel de l’établissement de crédit ;

Qu’en statuant ainsi alors que c’est à l’établissement de crédit qu’il incombe de prouver qu’il a satisfait à son devoir de mise en garde, le tribunal a privé sa décision de base légale ;

Sur le quatrième moyen :

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;

Attendu que pour rejeter la demande tendant à la déchéance du droit aux intérêts du prêteur sur le compte “ P… “, le tribunal retient que l’emprunteur a sollicité et accepté le crédit revolving ;

Qu’en statuant ainsi sans répondre aux conclusions de M. X… qui faisait valoir le non respect par la banque de son obligation d’information prévue à l’article L. 311-9 du code de la consommation, le tribunal a méconnu les exigences du texte susvisé ;

Sur le cinquième moyen :

Vu l’article 1907 du code civil, ensemble l’article L. 313-2 du code de la consommation ;

Attendu que pour rejeter la demande de remboursement des commissions et intérêts facturés par la banque sur le compte bancaire du débiteur, ouvert selon convention signée le 26 juin 1999 sans que soit prouvée la remise des conditions générales, le tribunal retient que M. X… a signé le 28 décembre 2001 une nouvelle convention prévoyant des intérêts, contrat modifié le 20 avril 2002 dans un avenant dans lequel il reconnaît avoir pris connaissance des conditions générales et particulières de ce contrat et que tous les relevés détaillant les commissions et le taux des intérêts ont été réceptionnés sans protestation ;

Qu’en statuant ainsi alors que l’exigence d’un écrit mentionnant le taux de l’intérêt conventionnel est une condition de validité de la stipulation d’intérêts et qu’en l’absence d’un accord écrit préalable sur ce point, l’indication du taux d’intérêt sur les relevés de compte ne répond pas à cette exigence, lors même qu’elle ne fait pas l’objet d’une protestation de la part du client, le tribunal a violé les textes sus-visés ;

Sur le sixième moyen pris en sa première branche :

Vu l’article L. 131-73 du code monétaire, ensemble l’article 6 du décret du 22 mai 1992 ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. X… tendant au remboursement des frais perçus par la banque au titre de l’interdiction bancaire et à l’octroi de dommages-intérêts en réparation du préjudice allégué, le tribunal retient que l’envoi d’une lettre recommandée n’est pas obligatoire et que la procédure a été régulièrement suivie ;

Qu’en statuant ainsi alors que la lettre d’injonction avant interdiction bancaire doit être adressée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, le tribunal a violé les textes sus-visés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 11 janvier 2005, entre les parties, par le tribunal d’instance de Paris 15ème ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal d’instance de Paris 14ème ;

Condamne la Banque Y aux dépens ;

Vu l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et l’article 700 du code de procédure civile, condamne la Banque Y à payer à la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. X… la somme de 2000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq février deux mille neuf.