M. Gösta Petri, Direction générale de la santé et des consommateurs, Commission européenne
La proposition de directive sur les droits des consommateurs Commission des clauses abusives
I – Les changements proposés par rapport à la directive 93/13/CEE
a – Pourquoi modifier? L’analyse d’impact
Le problème :
- Objectif : améliorer le fonctionnement du marché intérieur ;
- Problème : « fragmentation » du cadre réglementaire communautaire : des lois nationales différentes à cause des clauses d’harmonisation minimale. Solution : harmonisation maximale des points essentiels pour le commerce intra-communautaire ;
- Livre vert, en ce qui concerne les clauses abusives : introduction d’une liste « noire » de clauses interdites et une liste « grise » de clauses présumées interdites
L’analyse d’impact :
- L’harmonisation des listes pourrait encourager le commerce transfrontalier, puisque les mêmes clauses seront considérées abusives dans tous les États membres ;
- Avoir une seule liste au niveau européen pourrait réduire les coûts juridiques pour les entreprises, surtout pour les PME qui n’ont pas de ressources suffisantes pour engager le conseil juridique nécessaire ;
- Une liste noire augmenterait la sécurité juridique des consommateurs, et pourrait en conséquence avoir un effet positif sur leur confiance dans le fonctionnement du marché intérieur ;
- Coûts administratifs pour les États membres qui appliquent actuellement des listes indicatives.
b – Les modifications proposées
Le Chapitre V de la proposition :
- Uniquement clauses non négociées (contrats d’adhésion) : pas de changement ;
- Transparence des clauses : « mises à la disposition [du consommateur] de manière à donner effectivement la possibilité d’en prendre connaissance » ;
- Les cases pré-cochées ne seront plus valables ;
- Le test général (déséquilibre significatif) reste, mais avec une nuance : objet principal et rémunération seront couverts si les règles de transparence n’ont pas été respectées ;
- La liste indicative est remplacée par une liste noire (clauses interdites) et une liste grise (clauses présumées abusives) ;
- Procédure de comitologie pour la mise à jour des listes (notifications des clauses par les États membres)
La liste noire :
- Pourquoi : protéger les consommateurs contre les clauses manifestement abusives à l’échelle européenne,
- permettre aux entreprises de se baser sur un seul contrat d’adhésion pour les 27 États membres, en clarifiant quelles clauses sont interdites : 12 États membres appliquent des listes noires actuellement, et 5 appliquent un système mixte analogue à la proposition de la Commission.
Les clauses interdites : clauses ayant pour objet ou effet …
- d’exclure ou de limiter la responsabilité du professionnel en cas de décès ou de dommage corporel subi par le consommateur par suite d’un acte ou d’une omission dudit professionnel ;
- de limiter l’obligation du professionnel de respecter les engagements pris par ses mandataires ou de subordonner ses engagements au respect d’une condition particulière dépendant exclusivement du professionnel ;
- d’exclure ou d’entraver le droit du consommateur à ester en justice ou à exercer toute autre voie de recours, notamment en lui imposant de résoudre les litiges exclusivement par voie d’arbitrage en dehors des règles du droit ;
- de limiter les moyens de preuve à la disposition du consommateur ou d’imposer à ce dernier la charge de la preuve qui, conformément au droit applicable, incombe au professionnel ;
- d’accorder au professionnel le droit de déterminer si les biens ou les services fournis sont conformes aux stipulations du contrat ou de lui conférer le droit exclusif d’interpréter une quelconque clause du contrat.
II – Impact de l’harmonisation complète sur le droit national
a – Mythes…
- Puisque le test général reste le même, la jurisprudence nationale (recommandations de la Commission des clauses abusives) reste valable. Les pouvoirs d’intervention des juridictions / autorités nationales pour combattre les clauses abusives ne seront pas restreints.
- La division de compétences entre les juridictions nationales et la CJCE restera la même. La CJCE ne statuera pas sur les clauses individuelles (arrêt C-237/02 Freiburger Kommunalbauten) ;
- Les États membres garderont la possibilité de réglementer les clauses abusives dans les contrats négociés individuellement.
b – … et réalités
Les États membres devront abroger toute liste « grise » ou « noire » en conflit avec les listes de la directive.
III – Etat des négociations
- Les négociations ont commencé sous la Présidence française, et se poursuivent actuellement sous la Présidence tchèque ;
- Au Conseil, les États membres terminent actuellement une « première lecture » du texte. Les positions des États membres ne sont pas encore définitivement arrêtées ;
- En ce qui concerne les clauses abusives, plusieurs États membres ont des doutes sur les effets d’une harmonisation totale ;
- Au Parlement européen, les discussions viennent de commencer. Il est clair qu’il n’y aura pas d’opinion en première lecture pendant la législature actuelle. Le Parlement adoptera éventuellement une résolution préliminaire avant les élections.