(BOCCRF du 14/05/98)
Introduction
Le présent rapport d’activité de la Commission des clauses abusives est établi en application des dispositions de l’article L. 132-5 du code de la consommation.
Le rapport a été adopté par la Commission au cours de sa séance du 23 avril 1998.
Les missions
La commission est placée auprès du ministre chargé de la consommation.
Elle est consultée sur les projets de décrets qui peuvent lui être transmis par le ministre chargé de la consommation et dont l’objet est d’interdire, de limiter ou de réglementer certaines clauses considérées comme abusives (art. L. 132-1 du code de la consommation).
Elle recherche dans les modèles de contrats habituellement proposés par les professionnels aux non-professionnels ou consommateurs les clauses qui peuvent présenter un caractère abusif (art. L. 132-2) ; elle émet des recommandations éventuellement rendues publiques, tendant à obtenir leur suppression ou leur modification. Le ministre chargé de la consommation décide de la publication des recommandations émises (art. L. 132-4).
Elle peut être saisie pour avis par le juge (art. R. 132-6 du code de la consommation). La Commission propose dans son rapport annuel les modifications législatives ou réglementaires qui lui paraissent souhaitables.
La composition de la Commission a été fixée par arrêtés du 3 juillet 1996 et du 8 octobre 1997 (cf. annexe I).
Chapitre 1er : Bilan des travaux de la Commission en 1997
En 1997, la Commission s’est réunie onze fois en séance plénière et trois fois en séance restreinte (audition des professionnels intéressés lors d’un projet de recommandation, examen des saisines,…).
A. Les saisines et demandes d’avis
Conformément à l’article L. 132-3 du code de la consommation, la Commission peut être saisie :
- par le ministre chargé de la consommation ;
- par les associations agréées de défense des consommateurs ;
- par les professionnels intéressés.
Elle peut également se saisir d’office.
Par ailleurs, lorsque, à l’occasion d’une instance, est soulevé le caractère abusif d’une clause contractuelle, le juge peut demander à la Commission son avis sur le caractère abusif de cette clause.
1. Les saisines
Au cours de l’année 1997, quatorze saisines recevables au sens de l’article L. 132-3 précité ont été enregistrées, qui ont pour origine :
- les associations de consommateurs : 11 saisines ;
- le ministre et ses services : 3 saisines.
Elles concernent notamment :
- les contrats d’abonnement au câble ;
- les contrats type » marchands de liste » ;
- les contrats d’abonnement au téléphone mobile ;
- les contrats d’assurance collective ;
- les conventions bancaires de compte courant…
Par ailleurs, la Commission a été interrogée à dix-huit reprises par des personnes ou des organismes non habilités par la loi à la saisir : particuliers (16), professionnels dans le cadre d’un litige (2).
Il est à noter que la Commission reçoit un certain nombre de saisines concernant des contrats ayant déjà fait l’objet de recommandations.
2. Les demandes d’avis des tribunaux
En 1997, la Commission a été saisie deux fois pour avis (cf. annexe II).
B. Les recommandations adoptées en 1997
En 1997, la Commission a adopté deux nouvelles recommandations après audition des professionnels intéressés (cf. annexe III). Elles s’appliquent aux contrats concernant la télésurveillance et aux contrats de maintenance de certains équipements d’immeubles (ascenseurs, installations de chauffage, portes de garage).
Elles ont été publiées au Bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (BOCCRF) :
a) Recommandation n° 97-01 sur les contrats concernant la télésurveillance (BOCCRF du 11 juin 1997) ; elle a été adoptée le 24 avril 1997 sur le rapport de M. Gilles Paisant.
La Commission des clauses abusives a relevé des abus concernant notamment les clauses ayant pour objet ou pour effet :
- de dégager toute responsabilité du télésurveilleur en cas d’inadaptation technique, au regard de la prestation de télésurveillance promise, du matériel de détection ou de transmission installé chez le consommateur ;
- d’imposer une durée initiale du contrat supérieure à un an, ou, dans la limite de cette durée, d’exclure toute rupture anticipée même pour motifs légitimes ;
- d’imposer sans véritable alternative le paiement d’une année d’avance (annuité) au consommateur ;
- d’imposer le prélèvement automatique comme unique mode de paiement ;
- de ne mettre qu’une obligation de moyens à la charge du télésurveilleur ;
- de limiter la responsabilité du télésurveilleur dans des conditions qui ne permettent pas au consommateur d’apprécier l’exacte étendue de cette limitation ;
- d’imposer au consommateur, pour toute rupture anticipée de sa part, le paiement d’une indemnité équivalente au solde de la période contractuelle en cours ;
- d’imposer des délais trop brefs au consommateur pour déclarer tous sinistre susceptible d’engager la responsabilité du professionnel ou de réduire excessivement les délais de prescription fixés par la loi pour agir en justice contre ce dernier ;
b) Recommandation n° 97-02 relative aux contrats de maintenance de certains équipements d’immeubles (BOCCRF du 12 décembre 1997) ; elle a été adoptée le 18 septembre 1997 sur le rapport de M. Jean-Marc Granier.
Certaines clauses de ces contrats ont été qualifiées d’abusives, en particulier celles :
- exonérant totalement le professionnel de sa responsabilité ;
- dégageant la responsabilité du professionnel en cas de vol ou vandalisme facilité par une porte défectueuse du fait de la carence du professionnel (portes automatiques de garage) ;
- autorisant le professionnel à résilier le contrat aux torts du consommateur en cas d’intervention d’un autre prestataire motivée par une carence du professionnel ;
- fixant des indemnités de retard de paiement sans indiquer le taux applicable ou sans prévoir de mise en demeure ;
- prévoyant une indemnité à la charge du consommateur défaillant sans prévoir une indemnité équivalente à la charge du professionnel responsable de l’inexécution du contrat ;
- stipulant, dans un contrat pluriannuel, que le prix variera tous les ans » en fonction de la conjoncture économique « , sans donner au consommateur la possibilité de résilier le contrat ;
- n’informant pas précisément des engagements portant sur le délai de dépannage (installations de chauffage) ;
- prévoyant l’engagement immédiat et définitif du consommateur dès l’accord avec un représentant du professionnel, alors que l’engagement du professionnel n’est qu’éventuel et que les promesses du représentant doivent être confirmées ;
c) Propositions de modifications législatives ou réglementaires :
L’article L. 132-5 du code de la consommation autorise la Commission des clauses abusives à proposer des modifications législatives et réglementaires qui lui paraissent souhaitables.
Les études relatives aux contrats de télésurveillance et de maintenance de certains équipements d’immeubles ont fait resurgir un problème auquel la Commission a souvent été confrontée : celui de la durée des contrats (durée initiale, conditions et durée de renouvellement, conditions de résiliation).
La Commission émet le vœu qu’une réflexion soit engagée sur ce sujet : il s’avère en effet que, selon les caractéristiques du contrat, la durée peut être un facteur de déséquilibre significatif au détriment du consommateur, par exemple lorsque ce dernier ne peut, même pour des motifs légitimes, résilier le contrat initialement conclu pour plusieurs années, ou lorsqu’il se trouve contraint d’accepter le renouvellement aux mêmes conditions, ou encore lorsque la durée du préavis stipulé apparaît disproportionnée.
Chapitre 2 : Suivi des travaux de la Commission
1. L’action de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes
Les services de la DGCCRF ont diligenté des enquêtes dans des secteurs d’activité ayant fait l’objet de recommandations. Au-delà de l’application des textes pénaux dont ils ont la charge, ils ont vérifié le suivi des recommandations de la Commission :
- recommandation n° 85-03 relative aux contrats proposés par les établissements hébergeant des personnes âgées : la majorité des établissements soumis à la loi n° 90-600 du 6 juillet 1990 présente, selon l’enquête, un modèle se rapprochant de celui proposé par le Conseil national de la consommation. Mais on relève encore des clauses abusives portant notamment sur les conditions de facturation des prestations en cas d’absence ou d’hospitalisation :
- recommandation n° 87-03 relative aux contrats proposés par les clubs de sport à caractère lucratif : plusieurs clauses abusives subsistent, parmi lesquelles on notera :
- le refus de report d’abonnement en cas de maladie ou mutation professionnelle ;
- la possibilité pour le club de modifier unilatéralement le planning des cours collectifs ;
- l’exclusion de la responsabilité en cas de vol, ainsi que la clause attributive de compétence qui est illicite.
2. La journée d’étude du 21 mars 1997 à Reims
Organisée à l’initiative de l’Institut national de la consommation et du Centre technique régional de la consommation de Champagne-Ardenne, cette journée avait pour thème les clauses abusives dans les contrats.
Trois ateliers figuraient au programme du colloque présidé par M. Jean Calais Auloy, professeur à l’université Montpellier-I :
Programme du colloque
Atelier 1
La détermination des clauses abusives dans les contrats de consommation : l’état du droit positif. Sous la présidence de M. Hervé Causse, avocat, maître de conférences à la faculté de droit de Reims. Avec les interventions de M. Gilles Paisant, professeur à la faculté de droit et d’économie de Chambéry, membre de la Commission des clauses abusives, et de Mme Marie-Thérèse Feydeau, vice-président du tribunal de grande instance de Paris, vice-président de la Commission des clauses abusives.
Atelier 2
Les clauses abusives dans les contrats particuliers. Sous la présidence de M. Mario Tenreiro, administrateur à la Commission européenne. Avec les interventions de Mme Denise Lespinasse, présidente de l’UFC-Que Choisir de Saône-et-Loire. M. Jérôme Huet, professeur à l’université Paris-V, et M. Jean-Pierre Pizzio, professeur à la faculté de droit de Dijon.
Atelier 3
L’efficacité pratique du dispositif de suppression des clauses abusives : les acteurs. Sous la présidence de M. Jacques Normand, professeur à la faculté de droit de Reims. Avec les interventions de M. Christian Brasseur, avocat, membre de la Commission des clauses abusives, M. Jean-Pierre Giambelluco, du CTRC Poitou-Charentes, et M. Luc Bihl, avocat à la cour d’appel de Paris, ancien membre de la Commission des clauses abusives.
Les actes de la journée d’étude ont été publiés dans le numéro spécial d’INC Hebdo n° 1015 du 12 décembre 1997.
Chapitre 3 : Actualité de la Commission
1. Travaux en cours
La Commission adoptera prochainement une recommandation relative aux contrats d’abonnement au câble et à la télévision à péage.
Elle procède actuellement à l’étude des contrats de location des locaux à usage d’habitation (en vue de compléter la recommandation n° 80-04 existant déjà sur ce sujet).
2. Nouvelles études
a) Les rapporteurs sont saisis d’études relatives aux :
- contrats de distribution d’eau (révision de la recommandation n° 85-01) ;
- conditions générales proposées par les dépôts – vente ;
- contrats d’abonnement aux téléphones mobiles ;
- contrats proposés par les cliniques et hôpitaux du secteur privé ;
- contrats d’assurance obsèques ;
- contrats proposés aux bailleurs par les agents immobiliers.
b) La Commission envisage d’examiner :
- les conventions bancaires de compte courant ;
- les contrats types » marchands de liste » ;
- les contrats proposés aux locataires des résidences pour étudiants.
Annexes
Annexe 1
Arrêté du 3 juillet 1996 portant nomination à la Commission des clauses abusives
Par arrêté du ministre délégué aux finances et au commerce extérieur en date du 3 juillet 1996 :
Sont nommés membres titulaires de la Commission des clauses abusives :
M. Bouscharain (Jean-Pierre), président, conseiller à la Cour de cassation :
- Mme Feydeau (Marie-Thérèse), vice-président, vice-président du tribunal de grande instance de Paris ;
- M. Avril (Eric), association Force ouvrière consommateurs ;
- M. Brasseur (Christian), Union fédérale des consommateurs ;
- Mme Crespel (Véronique), Fédération des familles de France ;
- M. Epivent (Jean-Luc), responsable de l’union du commerce de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises ;
- Mme Faucheux-Bureau (Madeleine), magistrat au bureau du droit civil général au ministère de la justice ;
- M. Leveneur (Laurent), professeur de droit à l’université Paris-II ;
- M. Paisant (Gilles), professeur de droit, doyen de la faculté de droit et d’économie de Chambéry ;
- M. Peinoit (Jean-Pierre), Fédération nationale des associations des familles rurales ;
- M. Ricatte (Jean), directeur des affaires juridiques à la Fédération des industries électriques et électroniques ;
- M. Rive (Claude), conseiller de la direction générale de l’Union des assurances de Paris ;
- M. Siouffi (Bernard), délégué général du syndicat des entreprises de vente par correspondance et à distance.
Sont nommés membres suppléants de la Commission des clauses abusives ;
- Mme Barthomeuf (Pascale), juriste à la Fédération nationale du bâtiment ;
- M. Bouaziz (Pierre), avocat au barreau de Paris ;
- Mme Bourgogne (Sylvie), magistrat au tribunal de grande instance de Paris ;
- Mme Buriot (Sandra), Association d’éducation et d’information du consommateur de la fédération de l’éducation nationale ;
- Mme Ceccaldi (Sylvie), magistrat, chef du bureau du droit civil général au ministère de la justice ;
- M. Droc (Bernard), directeur au Cetelem ;
- Mme Foucher (Patricia), Union féminine civique et sociale ;
- M. Jamin (Christophe), professeur à la faculté des sciences juridiques, politiques et sociales de l’université Lille-II ;
- M. Nespo (Claude), membre de la commission juridique et fiscale de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises ;
- M. Perreau (Hubert), directeur des affaires législatives et fiscales au comité des constructeurs français d’automobiles ;
- Mme Poirier (Marie), Organisation générale des consommateurs ;
- Mme Ronsin (Anne-Christine), Confédération nationale des associations familiales catholiques.
Les personnes citées ci-dessus sont nommées pour une durée de trois ans.
Le présent arrêté abroge les précédents arrêtés nommant les membres de la Commission des clauses abusives.
Arrêté du 8 octobre 1997 portant nomination à la Commission des clauses
Par arrêté du secrétaire d’Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce et à l’artisanat en date du 8 octobre 1997, Mme Nicoletis (Claudette), magistrat au bureau du droit civil général au ministère de la justice, est nommée membre titulaire de la Commission des clauses abusives, en remplacement de Mme Faucheux-Bureau (Madeleine).
Annexe 2
Avis
Avis relatif au contenu d’une garantie annulation voyage (Tribunal d’instance de Saint-Étienne)
Annexe 3
Recommandations émises
Annexe 4
Jurisprudence
Cours d’appel
Paris, 8e chambre, section A, 4 février 1997. SA HLM Carpi c/association Force Ouvrière Consommateurs (AFOC). Contrat de vente à terme. Paiement de la taxe foncière. Clause abusive (non).
Grenoble, 17 mars 1997. SA Isère Construction Maison Mikit c/UFC Que Choisir 38. Clauses abusives (oui). Suppression sous astreinte (oui). Pourvoi.
Bordeaux, 1re chambre, section A, 25 juin 1997. Commune des Eglisottes-et-Chalaures et Cie Axa Assurances c/Régie d’électricité de Saint-Philippe et Cie Préservatrice foncière assurance. Contrat d’abonnement régie d’électricité. Clause d’exclusion de responsabilité. Clause abusive (oui).
Tribunaux de grande instance
Albertville, chambre civile, 17 janvier 1997, UFC Que Choisir c/société Agence Descamps. Clauses abusives. Action collective de l’association de consommateurs. Recevabilité (oui).
Grenoble, 6e chambre civile, 22 mai 1997, UFC Que Choisir 38 c/ SA Les Agences Immobilières Petit. Contrat location saisonnière. Clauses abusives (oui).
Paris, 1re chambre, 1re section, 26 mai 1997. Société Gestetner c/ Union syndicale CGT des personnels du commerce, de la distribution et des services. Contrat conclu pour les besoins de l’activité. Clause abusive. Champ d’application (non). Appel.
Vienne, 5 juin 1997. UFC Que Choisir 38 c/gérant société Chic Cuisine. Clauses abusives (oui). Suppression sous astreinte (oui).
Paris, 10 septembre 1997. Orgeco c/GIE cartes bancaires et BNP. Contrat carte bancaire. Clauses abusives (non).
Tribunaux d’instance
Gap, 25 mars 1997. SA Gestetner c/Union départementale Force Ouvrière et AFOC des Hautes-Alpes. Contrat » abonnement-copies » annuel photocopieur. Clause abusive (non).
Paris (12e), 17 avril 1997. M. Bérichi c/SARL Paris Un-Enseigne » Gymnasium « . Clause abusive (oui).
Vannes, 4 septembre 1997, Mme Baratay c/Abeilles Assurances. Clause abusive (non).