Une clause de limitation de valeur insérée par le consommateur dans un contrat de déménagement est présumée abusive de manière irréfragable
Cass. civ. 1, 11 dec.2019, n°18-21164
Contrat de déménagement — Clause de limitation de valeur — Clause présumée abusive de manière irréfragable — Article R.212-1 6° du code de la consommation
EXTRAIT :
« Qu’en statuant ainsi, alors que la clause ayant pour objet de supprimer ou de réduire le droit à réparation du préjudice subi par le consommateur en cas de manquement du professionnel à l’une de ses obligations est présumée abusive de manière irréfragable, le tribunal d’instance a violé le texte précité. «
ANALYSE :
La première chambre civile de la cour de cassation, sur le fondement de l’article R. 132-1 6° (nouvel article R.212-1 6° issu de la recodification du code de la consommation par une ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016), énonce qu’une clause fixant le montant d’une indemnité éventuelle à verser par l’entreprise de déménagement au consommateur est présumée abusive de manière irréfragable en ce qu’elle a pour objet de réduire ou supprimer le droit à réparation du préjudice du consommateur en cas de manquement par le professionnel à ses obligations. Elle casse le jugement qui avait écarté le caractère abusif au motif que la clause avait été insérée par le consommateur.
Voir en ce sens : Recommandation N°16-01 Contrats de déménagement, garde-meubles et stockage en libre service, point 3.
Dans un contrat de prêt proposé par un employeur à un salarié, est abusive la clause qui prévoit la faculté pour l’employeur de résilier le contrat de prêt de plein droit en cas de rupture du contrat de travail
Cass. Civ. 1re, 5 juin 2019, n° 16-12.519
Clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties – Clause de résiliation de plein droit du contrat de prêt pour une cause extérieure – Modification substantielle de l’économie du contrat de prêt
EXTRAIT :
«{…} prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de prêt pour une cause extérieure à ce contrat, afférente à l’exécution d’une convention distincte, une telle clause crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ainsi exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement et à une modification substantielle de l’économie du contrat de prêt {…} »
ANALYSE :
Dans le cadre d’un contrat de crédit à la consommation, est abusive la clause qui prévoit la faculté pour l’employeur de résilier le contrat de prêt de plein droit « pour une cause extérieure à ce contrat » en cas de cessation des fonctions du salarié. En effet, une telle clause expose le consommateur « à une aggravation soudaine des conditions de remboursement et à une modification substantielle de l’économie du contrat de prêt ».
La première chambre civile de la cour de cassation se fonde sur l’article L.132-1 du code de la consommation (nouvel article L.212-1 du code de la consommation issu de la recodification du code de la consommation par une ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016) pour dire qu’il y a un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur, qui voit les conditions de son remboursement aggravées et l’économie de son contrat de prêt substantiellement modifiée.
Une entreprise est soumise à la législation sur les clauses abusives lorsqu’elle propose un contrat de prêt à ses salariés
Cass. Civ. 1re, 5 juin 2019, n° 16-12.519
Contrat entre professionnel et consommateur – Domaine d’application – Notion de professionnel – Entreprise qui conclut un contrat de crédit avec ses salariés – Notion de consommateur - Salarié
EXTRAIT :
« Est considéré comme un « consommateur », au sens de l’article 2. b) de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993 (concernant les clauses abusives dans les contrats de consommation), le salarié d’une entreprise et son conjoint qui concluent avec cette entreprise un contrat de crédit destiné à financer l’acquisition d’un bien immobilier à des fins privées, quand bien même il aurait perdu ultérieurement sa qualité de salarié de l’entreprise ».
Est considéré comme un « professionnel » au sens de l’article 2. c) de cette même directive, une société qui conclut un contrat de crédit dans le cadre de son activité professionnelle, quand bien même cela ne constituerait pas son activité principale.
ANALYSE :
La Cour de cassation applique la solution posée par la CJUE dans son arrêt du 19 mars 2019 (C-590/17 – Pouvin et Dijoux) en réponse à la question préjudicielle qu’elle lui avait posé.
Le juge ne peut imposer le remboursement du prix d’un contrat sans constater que ce contrat ne peut subsister sans la clause abusive
Cass. civ 1ère, 9 mai 2019, n° 18-14.930
Déséquilibre significatif – clause réputée non-écrite – sanction
EXTRAITS :
« Qu’en statuant ainsi, sans constater que le contrat ne pouvait subsister sans cette clause, le tribunal a violé le texte susvisé »
ANALYSE :
En l’espèce, un contrat d’enseignement pour un concours prévoyait le paiement intégral de la somme due sans possibilité de remboursement. Le tribunal d’instance a jugé abusive et non écrite la clause prévoyant le « paiement intégral excluant toute résiliation pour un motif légitime et impérieux ».
Il en avait déduit que l’organisme d’enseignement devait rembourser l’intégralité du prix à la cliente. Pour casser cette décision, la première chambre civile énonce que le juge n’avait pas constaté que « le contrat ne pouvait subsister sans cette clause ». En d’autres termes, en imposant le remboursement du prix, les juges du fond avaient raisonné comme si le contrat devait être annulé en son intégralité. C’était implicitement considérer que le contrat ne pouvait subsister sans la clause, sans pour autant le justifier juridiquement.
Voir également :
–Cass. civ1ère, 12 octobre 2016, n° 15-25.468
–Recommandation n° 91-01 établissements d’enseignement
–Cass civ 1ère, 11 janvier 2023, n°21-16.859
Le réputé non écrit échappe à la prescription applicable en matière de nullité
Cass. civ. 1, 13 mars 2019, n°17-23.169
Réputé non écrit – Prescription
EXTRAITS :
« C’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que la demande tendant à voir réputer non écrites les clauses litigieuses ne s’analysait pas en une demande en nullité, de sorte qu’elle n’était pas soumise à la prescription quinquennale. »
ANALYSE :
La sanction d’une clause abusive est le réputé non-écrit. Or, la première chambre civile de la Cour de cassation déclare que la demande tendant à voir réputées non écrites les clauses litigieuses ne s’analyse pas en une demande en nullité soumise à la prescription quinquennale. La Cour n’en dit pas plus quant au caractère éventuellement imprescriptible de l’action. En matière de copropriété la troisième chambre civile avait déjà estimé que la demande tendant à faire constater le caractère réputé non écrit d’une clause illicite du règlement de copropriété peut être menée à tout moment (voir en ce sens l’arrêt Cass. 3e civ., 12 juin 1991, n° 89-18331).
Une clause d’exclusion de solidarité dans un contrat d’architecte n’est pas abusive
Civ.3, 7 mars 2019, 18-11.995
Contrat d’architecte – Appréciation du caractère abusif d’une clause – Responsabilité du professionnel -
EXTRAITS :
« (…) L’action indemnitaire de la SCI dirigée contre {une} architecte, étant fondée sur sa responsabilité contractuelle avant réception, la clause contractuelle d’exclusion de solidarité était opposable à la SCI (…) ; la SCI n’était pas fondée à exciper du caractère abusif de cette clause, qui ne vidait pas la responsabilité de l’architecte de son contenu, puisqu’il devait assumer les conséquences de ses fautes et sa part de responsabilité dans les dommages, sans pouvoir être condamné pour la totalité des dommages »
ANALYSE :
Dans un contrat d’architecte, la clause qui énonce que la responsabilité contractuelle de l’architecte avant réception de l’ouvrage exclut toute responsabilité solidaire n’est pas abusive.
Le consommateur ne peut se prévaloir du caractère potentiellement abusif d’une telle clause puisque le professionnel reste tenu d’assumer les conséquences dommageables de ses actes, bien qu’il ne soit pas condamné à réparer la totalité des dommages.
Personnes qui exercent à titre subsidiaire l’activité de loueur en meublé – qualité de consommateur, non-professionnel (non)
Cour de cassation – chambre civile 1 – 23 janvier 2019 – n°17-23918
Les directives qui caractérisent le consommateur comme toute personne physique qui agit à des fins n’entrant pas dans le cadre de son activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole, n’excluent pas la possibilité pour ces personnes physiques d’agir à d’autres fins et notamment à titre professionnel lorsque ce caractère professionnel résulte des conditions dans lesquelles elles agissent.
Des époux qui souscrivent un prêt destiné à financer l’acquisition d’un bien à usage de résidence locative s’inscrivant dans une opération d’investissement de grande ampleur pour laquelle l’un des deux membres du couple s’est inscrit au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueur en meublé professionnel aux fins de réaliser avec son épouse au moins sept opérations immobilières similaires sont considérés comme des professionnels. Même si les emprunteurs exercent respectivement une activité professionnelle de médecin et d’infirmière, ils ont également une activité professionnelle de loueur en meublé.
Contrat de prêt – clause de remboursement anticipé du prêt en cas de fourniture de renseignements inexacts sur la situation de l’emprunteur – clause abusive (non)
Cour de cassation – Chambre civile 1 – 9 janvier 2019 – n°17-22581
La clause qui permet de prononcer l’exigibilité immédiate et de plein droit du prêt aux seuls cas de fourniture de renseignements inexacts portant sur des éléments déterminants du consentement du prêteur dans l’octroi du prêt, sans que cette faculté ne prive l’emprunteur de recourir à un juge pour contester l’application qui serait faite de la clause à son égard, ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties. Elle n’est donc pas abusive.
Contrat de location de véhicule – clause d’exclusion des dommages au véhicule en cas de mauvaise appréciation du gabarit
Cour de cassation 1ère chambre civile – 12 décembre 2018 – 17-15.427
Contrat de location de véhicule – clause d’exclusion des dommages au véhicule en cas de mauvaise appréciation du gabarit – clause abusive (non)
ANALYSE :
La clause du contrat de location de véhicule excluant de l’assurance les dommages causés au véhicule en cas de mauvaise appréciation du gabarit, quelle que soit la nature, intentionnelle ou non, de la faute commise et dont le consommateur est clairement informé, n’est pas abusive.