CJUE 16 juillet 2020-Caixabank_C-224/19

 Dépens   Principe deffectivité  

 EXTRAIT :  

 « Larticle 6, paragraphe 1, et larticle 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 ainsi que le principe deffectivité doivent être interprétés en ce sens quils sopposent à un régime qui permet de faire peser une partie des dépens procéduraux sur le consommateur selon le niveau des sommes indûment payées qui lui sont restituées à la suite de la constatation de la nullité dune clause contractuelle en raison de son caractère abusif, étant donné quun tel régime crée un obstacle substantiel susceptible de décourager les consommateurs dexercer le droit à un contrôle juridictionnel effectif du caractère potentiellement abusif de clauses contractuelles tel que conféré par la directive 93/13» 

 ANALYSE :  

Learticles 6 paragraphe 1 et 7 paragraphe 1 de la directive 93/13 sur les clauses abusives sopposent à ce quun régime national fasse peser sur le consommateur les frais procéduraux en fonction des sommes indûment payés qui lui ont été restituées par le professionnel suite à la reconnaissance du caractère abusif dune clause.  

 En effet, un tel régime est susceptible de décourager le consommateur à faire valoir son droit au contrôle dune clause présumée abusive par les juridictions nationales. Voir, en ce sens, arrêt du 13 septembre 2018, Profi Credit Polska, C-176/17, EU:C:2018:711, point 69 

CJUE 16 juill 2020-Caixabank_aff_C-224/19

 Prescription –  Principe d’effectivité

EXTRAIT

« L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à ce que l’introduction de l’action visant à faire valoir les effets restitutifs de la constatation de la nullité d’une clause contractuelle abusive soit soumise à un délai de prescription, pour autant que le point de départ de ce délai ainsi que sa durée ne rendent pas pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice du droit du consommateur de demander une telle restitution. »

ANALYSE

La CJUE rappelle que le principe d’autonomie procédurale des Etats membres ne doit pas méconnaître les principes d’équivalence et d’effectivité du droit de l’Union européenne. Le principe d’équivalence implique que les modalités procédurales des recours en justice fondés sur la directive sur les clauses abusives ne doivent pas être moins favorables que celles concernant des recours similaires de nature interne. Le principe d’effectivité implique que ces modalités procédurales ne rendent pas en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par la directive sur les clauses abusives. La CJUE fait ici application d’une jurisprudence constante, notamment rappelée dans son arrêt du 26 octobre 2006, Mostaza Claro, C-168/05, EU:C:2006:675, point 24.

Cependant, la CJUE confirme que le principe de sécurité juridique justifie la fixation de délais raisonnables de recours à peine de forclusion (arrêts du 6 octobre 2009, Asturcom Telecomunicaciones, C‑40/08, EU:C:2009:615, point 41, ainsi que du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:980, point 69).

Aussi, elle juge qu’est conforme à la directive 93/13 une réglementation nationale qui, tout en prévoyant le caractère imprescriptible de l’action tendant à constater la nullité d’une clause abusive, soumet à un délai de prescription l’action visant à faire valoir les effets restitutifs de cette constatation pour autant que deux conditions, tirées des principes d’équivalence et d’effectivité soient réunies :

–  ce délai ne doit pas être moins favorable que celui concernant des recours similaires de nature interne (principe d’équivalence)

–  ce délai ne doit pas rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par la directive 93/13 (principe d’effectivité).

 La CJUE constate que le délai de prescription de cinq ans, prévu par une réglementation nationale pour l’action visant à faire valoir les effets restitutifs de la constatation de la nullité d’une clause abusive, n’apparaît pas,  comme étant de nature à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par la directive 93/13.

Elle juge cependant que son point de départ fixé à la conclusion du contrat n’est pas de nature à assurer au consommateur une protection effective, dès lors que ce délai risque d’avoir expiré avant même que le consommateur ne puisse avoir connaissance de la nature abusive d’une clause contenue dans ce contrat (pts 90 & 91).

En droit français, la Cour de cassation a jugé que la demande tendant à voir réputer non écrites les clauses litigieuses ne s’analyse pas en une demande en nullité, de sorte qu’elle n’est pas soumise à la prescription quinquennale (Arrêt n°249 du 13 mars 2019 (17-23.169) – Cour de cassation – Première chambre civile – ECLI:FR:CCASS:2019:C100249)

Voir également :

-Site de la CCA : CJUE, 9 juillet 2020-C-698-18-Raiffeisen Bank : http://www.clauses-abusives.fr/jurisprudence/reglementation-nationale-soumettre-a-delai-de-prescription-laction-restitution-consecutive-a-action-constatation-caractere-abusif-dune-clause/

CJUE 16 juill 2020-Caixabank_aff_C-224-19

Objet principal du contrat – Prestation essentielle – Caractère accessoire – Déséquilibre significatif

EXTRAIT :

« L’article 3, l’article 4, paragraphe 2, et l’article 5 de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens que les clauses du contrat qui relèvent de la notion d’« objet principal du contrat » doivent s’entendre comme étant celles qui fixent les prestations essentielles de ce contrat et qui, comme telles, caractérisent celui-ci. En revanche, les clauses qui revêtent un caractère accessoire par rapport à celles qui définissent l’essence même du rapport contractuel ne sauraient relever de cette notion. Le fait qu’une commission d’ouverture est comprise dans le coût total d’un prêt hypothécaire ne saurait déterminer qu’elle soit une prestation essentielle de celui-ci. En toute hypothèse, une juridiction d’un État membre est tenue de contrôler le caractère clair et compréhensible d’une clause contractuelle portant sur l’objet principal du contrat, et ce indépendamment d’une transposition de l’article 4, paragraphe 2, de cette directive dans l’ordre juridique de cet État membre.

L’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’une clause d’un contrat de prêt conclu entre un consommateur et un établissement financier, imposant au consommateur le paiement d’une commission d’ouverture, est susceptible de créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat en dépit de l’exigence de bonne foi, lorsque l’établissement financier ne démontre pas que cette commission correspond à des services effectivement fournis et à des frais qu’il a exposés, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier. »

 ANALYSE :

Première partie de la solution : Au sens des articles 3, 4 paragraphe 1 et 5 de la directive 93/13 sur les clauses abusives, le fait qu’une commission d’ouverture soit comprise dans le coût total d’un prêt hypothécaire ne permet pas de déduire qu’il s’agit d’une prestation essentielle du contrat.

Seconde partie de la solution : La CJUE rappelle que le déséquilibre significatif peut résulter du seul fait d’une atteinte suffisamment grave à la situation juridique dans laquelle le consommateur, en tant que partie au contrat en cause, est placé en vertu des dispositions nationales applicables, que ce soit sous la forme d’une restriction au contenu des droits que, selon ces dispositions, il tire de ce contrat ou d’une entrave à l’exercice de ceux‑ci ou encore de la mise à sa charge d’une obligation supplémentaire, non prévue par les règles nationales (arrêt du 3 octobre 2019, Kiss et CIB Bank, C‑621/17, EU:C:2019:820, point 51).

Elle relève que la clause imposant au consommateur le paiement d’une commission d’ouverture est susceptible de créer un déséquilibre significatif lorsque l’établissement ne parvient pas à démontrer devant les juges nationaux que ladite commission correspond à des frais exposés.

CJUE 16 juill 2020-Caixabank_aff_C-224-19

Contrat de prêhypothécaire – Clause abusive – Clause imposant la totalité des frais de constitution et de mainlevée d’hypothèque à la charge de l’emprunteur – Effets de la déclaration de nullité desdites clauses – Pouvoirs du juge national en présence d’une clause qualifiée d’“abusive” – Répartition des frais – Application de dispositions nationales de nature supplétive – 

 EXTRAIT :  

 « Larticle 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil , du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doivent être interprétés en ce sens quils sopposent à ce que, en cas de nullité dune clause contractuelle abusive imposant le paiement de la totalité des frais de constitution et de mainlevée dhypothèque par le consommateur, le juge national refuse la restitution au consommateur des montants payés en application de cette clause, à moins que les dispositions du droit national qui trouveraient à sappliquer en labsence de ladite clause imposent au consommateur le paiement de la totalité ou dune partie de ces frais. » 

 ANALYSE :  

La CJUE rappelle dans cette décision (pt 53) leffet restitutoire découlant de la constatation du caractère abusif dune clauseIl signifie que l’obligation pour le juge national d’écarter une clause contractuelle abusive imposant le paiement de sommes qui se révèlent indues emporte, en principe, une restitution correspond à ces mêmes sommes (arrêt du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15 , EU:C:2016:980, point 62).  

La CJUE rappelle également que le fait qu’une clause contractuelle jugée abusive est censée ne jamais avoir existé est de nature à justifier l’application des éventuelles dispositions du droit national  applicables en l’absence d’accord des parties (pt 55), en d’autres termes des dispositions de nature supplétive. 

Aussi, il en résulte qu’en cas de nullité d’une clause contractuelle abusive imposant le paiement de la totalité des frais de constitution et de mainlevée d’hypothèque par le consommateur, si les dispositions supplétives mettent à la charge de l’emprunteur l’intégralité ou une partie de ces frais, le refus de restituer au consommateur la partie desdits frais qu’il doit lui‑même supporter nest pas contraire aux articles 6 paragraphe 1 et 7 de la directive 93/13 sur les clauses abusives  

CJUE, 9 juillet 2020-C-452-18-Ibercaja Banco 

Clause abusive – Renonciation aux prétentions futures – renonciation aux droits du consommateur 

 EXTRAIT 

 « L’article 3, paragraphe 1, lu en combinaison avec le point 1, sous q), de l’annexe, ainsi que l’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens :  

 – la clause stipulée dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur en vue de la résolution d’un différend existant, par laquelle ce consommateur renonce à faire valoir devant le juge national les prétentions qu’il aurait pu faire valoir en l’absence de cette clause, est susceptible d’être qualifiée d’« abusive », notamment, si ledit consommateur n’a pas pu disposer des informations pertinentes lui permettant de comprendre les conséquences juridiques qui en découlaient pour lui ;  

 – la clause par laquelle le même consommateur renonce, en ce qui concerne des différends futurs, aux actions en justice fondées sur les droits qu’il détient en vertu de la directive 93/13, ne lie pas le consommateur. » 

  ANALYSE 

La CJUE se prononce sur un contrat de novation par laquelle un établissement bancaire et un consommateur ont convenu, d’une part, d’une réduction du taux de la clause « plancher » qui était applicable en vertu du contrat de prêt hypothécaire et, d’autre part, d’une renonciation mutuelle aux actions en justice relatives aux ancienne et nouvelle clauses « plancher ». 

 Première partie de la solutionLa renonciation mutuelle à toute action en justice dans le cadre d’un accord visant la résolution d’un différend né entre un professionnel et un consommateur est susceptible de relever de l’objet principal de cet accord, au sens de l’article 4, paragraphe 2, de la directive  93/13, et, en conséquence, d’échapper à l’appréciation d’un éventuel caractère abusif, dès lors qu’elle est rédigée de façon claire et compréhensible, un tel examen incombant au juge national. 

Pour cet examen, le juge doit déterminer : 

– L’étendue des informations que le professionnel devait fournir au consommateur. Pour ce faire, il doit s’appuyer sur le niveau de certitude du caractère abusif de la clause plancher initiale qui existait au moment de la conclusion du contrat de novation. Ainsi, si le caractère abusif pouvait être envisageable au moment de sa conclusion, pour qu’il s’agisse d’un fait certain, il aurait fallu que le caractère abusif soit constaté à l’occasion d’une procédure judiciaire (pt 72) 

–  Si le consommateur a été en mesure de comprendre les conséquences juridiques qui en découlent. 

  Seconde partie de la solutionLa clause de renonciation des parties au litige au principal à faire valoir leurs prétentions relatives à la nouvelle clause « plancher » devant le juge national est abusive et ne lie pas le consommateur. La solution se justifie par l’article 6, paragraphe 11 de la directive 93/13 qui a un caractère impératif (comme rappelé dans un arrêt du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C-154/15, C-307/15 et C-308/15, EU:C:2016:980, point 55). Ainsi, il ne peut être laissé au consommateur la possibilité de renoncer préalablement aux droits qu’il tire du système de protection de cette directive pour deux raisons : cela va à l’encontre du caractère impératif de la disposition précitée, d’une part, et mettrait en péril l’efficacité de ce système, d’autre part.  

 En droit français,  l’article 6.1 de la dir. 93/13 selon lequel  “les clauses abusives (…) ne lient pas les consommateurs” est transposé à l’article L. 241-1 du code de la consommation. 

CJUE, 9 juillet 2020-C-452-18-Ibercaja Banco 

 Exigence de transparence – contrat de prêt hypothécaire –  

 EXTRAIT 

 « L’article 3, paragraphe 1, l’article 4, paragraphe 2, et l’article 5, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens que l’exigence de transparence incombant à un professionnel en vertu de ces dispositions implique que, lors de la conclusion d’un contrat de prêt hypothécaire adossé à taux variable, fixant une clause « plancher », le consommateur doit être mis en mesure de comprendre les conséquences économiques qui découlent pour lui du mécanisme induit par cette clause « plancher », notamment, grâce à la mise à disposition d’informations relatives à l’évolution passée de l’indice sur la base duquel le taux d’intérêt est calculé. » 

 ANALYSE 

 La CJUE rappelle que l’exigence de transparence visée à l’article 4, paragraphe 2, et à l’article 5 de la directive 93/13 ne saurait être réduite au seul caractère compréhensible sur les plans formel et grammatical de la clause concernée et doit être entendue de manière extensive de telle sorte  que le consommateur comprenne les conséquences économiques qui découlent du mécanisme de la clause (point 45 d’un arrêt du 20 septembre 2017, Andriciuc e.a., C-186/16, EU:C:2017:703) : 

 Elle rappelle ainsi que le professionnel est tenu de fournir au consommateur tous les éléments susceptibles d’avoir une incidence sur la portée de son engagement lui permettant d’évaluer, notamment, le coût total de son emprunt. Le respect de cette exigence est alors apprécié par rapport aux éléments dont le professionnel disposait au jour de la conclusion du contrat.  

La CJUE précise la portée de cette exigence de transparence dans un contrat de prêt hypothécaire adossé à un taux variable. Elle observe que l’établissement bancaire ne peut être tenu d’exposer les informations précises quant aux conséquences financières liées aux variations du taux d’intérêt en cours du contrat, dès lors que celles-ci dépendent d’évènements futurs non prévisibles et indépendants de sa volonté. C’est ce qui explique qu’il est tenu de fournir les informations relatives à l’évolution passée de l’indice sur la base duquel le taux est calculé (la Cour a déjà pu statuer dans ce sens dans un arrêt du 3 mars 2020, Gómez del Moral Guasch, C-125/18, EU:C:2020:138, point 56).  

 

CJUE 9 juillet 2020-C-698/18-Raiffeisen Bank

 EXTRAITS :

« L’article 2, sous b), l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à̀ une règlementation nationale qui, tout en prévoyant le caractère imprescriptible de l’action tendant à constater la nullité d’une clause abusive figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, soumet à un délai de prescription l’action visant à faire valoir les effets restitutifs de cette constatation, pour autant que ce délai ne soit pas moins favorable que celui concernant des recours similaires de nature interne (principe d’équivalence) et qu’il ne rende pas en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par l’ordre juridique de l’Union, en particulier la directive 93/13 (principe d’effectivité) .

« L’article 2, sous b), l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 ainsi que les principes d’équivalence, d’effectivité et de sécurité juridique (…) s’opposent à une interprétation juridictionnelle de la réglementation nationale selon laquelle l’action judiciaire en restitution des montants indûment payés sur le fondement d’une clause abusive figurant dans un contrat conclu entre un consommateur et un professionnel est soumise à un délai de prescription de trois ans qui court à compter de la date de l’exécution intégrale de ce contrat, lorsqu’il est présumé, sans besoin de vérification, que, à cette date, le consommateur devait avoir connaissance du caractère abusif de la clause en cause ou lorsque, pour des actions similaires, fondées sur certaines dispositions du droit interne, ce même délai ne commence à courir qu’à partir de la constatation judiciaire de la cause de ces actions »

ANALYSE :

 Première partie de la solution :

La CJUE rappelle que le principe d’autonomie procédurale des Etats membres ne doit pas méconnaître les principes d’équivalence et d’effectivité du droit de l’Union européenne. Le principe d’équivalence implique que les modalités procédurales des recours en justice fondés sur la directive sur les clauses abusives ne doivent pas être moins favorables que celles concernant des recours similaires de nature interne. Le principe d’effectivité implique que ces modalités procédurales ne rendent pas en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par la directive sur les clauses abusives. La CJUE fait ici application d’une jurisprudence constante, notamment rappelée dans son arrêt du 26 octobre 2006, Mostaza Claro, C-168/05, EU:C:2006:675, point 24.

Cependant, la CJUE confirme que le principe de sécurité juridique justifie la fixation de délais raisonnables de recours à peine de forclusion (arrêts du 6 octobre 2009, Asturcom Telecomunicaciones, C‑40/08, EU:C:2009:615, point 41, ainsi que du 21 décembre 2016, Gutiérrez Naranjo e.a., C‑154/15, C‑307/15 et C‑308/15, EU:C:2016:980, point 69). Aussi, elle juge qu’est conforme à la directive 93/13 une réglementation nationale qui, tout en prévoyant le caractère imprescriptible de l’action tendant à constater la nullité d’une clause abusive, soumet à un délai de prescription l’action visant à faire valoir les effets restitutifs de cette constatation pour autant que deux conditions, tirées des principes d’équivalence et d’effectivité soient réunies :

–  ce délai ne doit pas être moins favorable que celui concernant des recours similaires de nature interne (principe d’équivalence)

–  ce délai ne doit pas rendre en pratique impossible ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par la directive 93/13 (principe d’effectivité).

 En droit français, la Cour de cassation a jugé que la demande tendant à voir réputer non écrites les clauses litigieuses ne s’analyse pas en une demande en nullité, de sorte qu’elle n’est pas soumise à la prescription quinquennale (Arrêt n°249 du 13 mars 2019 (17-23.169) – Cour de cassation – Première chambre civile – ECLI:FR:CCASS:2019:C100249)

 Seconde partie de la solution :

La CJUE constate que le délai de prescription de trois ans, prévu par une réglementation nationale pour l’action visant à faire valoir les effets restitutifs de la constatation de la nullité d’une clause abusive, commencerait à courir, selon une interprétation juridictionnelle à partir de l’exécution intégrale du contrat conclu avec un professionnel.

Elle juge que si ce délai est suffisant pour permettre au consommateur de préparer un recours effectif (pt 64), son point de départ n’est pas de nature à assurer au consommateur une protection effective, dès lors que ce délai risque d’avoir expiré avant même que le consommateur ne puisse avoir connaissance de la nature abusive d’une clause contenue dans ce contrat (pts 65 & 67). Elle en déduit qu’un tel délai rend particulièrement difficile l’exercice des droits des consommateurs conférés par la directive 93/13.

CJUE, 9 juillet 2020-C-452-18-Ibercaja Banco 

Contrat de prêt hypothécaire – contrat de novation – clause abusive – renonciation par le consommateur 

 EXTRAIT  

 « L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE (…), doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’une clause d’un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur dont le caractère abusif est susceptible d’être constaté judiciairement puisse faire l’objet d’un contrat de novation entre ce professionnel et ce consommateur, par lequel le consommateur renonce aux effets qu’entraînerait la déclaration du caractère abusif de cette clause, à la condition que cette renonciation procède d’un consentement libre et éclairé du consommateur, ce qu’il appartient au juge national de vérifier. » 

 ANALYSE 

La CJUE rappelle que le consommateur peut renoncer à se prévaloir du caractère abusif d’une clause si cette renonciation est l’expression d’un consentement libre et éclairé, ce qu’il appartient au juge national d’apprécier. À cet égard, il faut que le consommateurmanifeste expressément qu’il est conscient du caractère non contraignant de la clause et qu’il s’oppose à ce qu’elle soit écartée (voir, en ce sens, arrêt du 21 février 2013, Banif Plus Bank, aff.C_472_11, point 35). Dans la décision analysée, la CJUE admet par analogie qu’un consommateur peut renoncer aux effets qu’entraînerait la déclaration du caractère abusif d’une telle clause, sous réserve, là encore, que cette renonciation procède d’un consentement libre et éclairé (pt 28). 

CJUE, 9 juillet 2020-C-452-18-Ibercaja Banco 

Contrat modifiant une clause abusive – clause réglant les conséquences du caractère abusif d’une clause  

EXTRAIT 

 « L’article 3, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’une clause d’un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur en vue de modifier une clause potentiellement abusive d’un contrat antérieur conclu entre ceux-ci ou de régler les conséquences du caractère abusif de cette autre clause peut elle-même être considérée comme n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle et, le cas échéant, être déclarée abusive. » 

 ANALYSE 

 La présomption de défaut de négociation de la clause posée par l’article 3, paragraphe 2 de la directive 93/13 est également susceptible de s’appliquer à une clause visant à modifier une clause potentiellement abusive d’un contrat antérieur conclu entre les mêmes parties, ou à régler les conséquences du caractère abusif de cette clause. Pour déterminer si le consommateur a eu un pouvoir d’influence sur le contenu de la nouvelle clause, la juridiction, face à un contrat de novation, doit prendre en considération l’ensemble des circonstances dans lesquelles une telle clause a été présentée au consommateur. À cet égard, le fait que la conclusion du nouveau contrat s’inscrit dans la politique générale de renégociation des contrats de prêt bancaire, l’absence de remise d’une copie du contrat au consommateur ou encore la mention manuscrite caractérisent le défaut de pouvoir d’influence (pt 34)