Cour de cassation
Arrêt du 18 mars 2004

2ème chambre civile

LA COUR DE CASSATION,
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Dit n’y avoir lieu de mettre hors de cause la C… ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l’article L. 132-1 du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à la loi n° 95.96 du 1er février 1995 ;

Attendu que les dispositions de ce texte, selon lesquelles sont réputées non écrites, parce qu’abusives, certaines clauses des contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs ne s’appliquent pas aux contrats de fournitures de biens ou de services qui ont un rapport direct avec l’activité professionnelle exercée par le cocontractant ;

Attendu qu’en contractant, le 9 juin 1988, trois emprunts à caractère professionnel destinés à l’achat du droit d’occupation d’un local commercial, aux travaux d’aménagement de ce dernier et à l’achat de matériel, Simone X… a adhéré à l’assurance de groupe souscrite par l’établissement prêteur auprès de la Caisse nationale de prévoyance (CNP) en vue de garantir le remboursement de l’emprunt en cas de décès, invalidité permanente et absolue ; qu’ayant été placée en longue maladie, elle a demandé à l’assureur l’exécution de la garantie ; que la CNP la lui a refusée au motif que pour pouvoir prétendre à la prise en charge des échéances de son prêt, Mme X… devait établir qu’elle se trouvait, conformément aux exigences contractuelles, non seulement dans l’impossibilité de se livrer à aucune occupation ou activité rémunérée, mais encore dans l’obligation d’avoir recours à une tierce personne pour les actes ordinaires de la vie ; qu’après le décès de l’assurée, ses héritiers ont poursuivi l’assureur en paiement, en invoquant notamment, sur le fondement de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, le caractère abusif de la clause exigeant le recours à une tierce personne ;

Attendu que pour écarter l’application de cette condition et dire que l’assureur devait sa garantie dès que l’assurée, comme en l’espèce, était dans l’impossibilité médicalement reconnue d’exercer la moindre activité professionnelle, l’arrêt attaqué énonce qu’elle apparaît comme excessive dès lors qu’elle déséquilibre les obligations de l’assuré par rapport à celle de l’assureur et, dans les faits, vide de sa substance la garantie due par ce dernier par la limitation à l’excès de sa mise en oeuvre ;

Qu’en se déterminant par de tels motifs, alors qu’il résultait de ses constatations que le contrat d’assurance était accessoire à des prêts professionnels souscrits par Simone X… pour les besoins de l’exploitation d’un fonds de commerce, ce dont il s’évinçait qu’ils ne relevaient pas de la législation sur les clauses abusives applicable aux consommateurs, la cour d’appel a violé, par fausse application, le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 20 novembre 2002, entre les parties, par la cour d’appel d’Agen ;

remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Bordeaux ;

Condamne les défendeurs aux dépens ;

Vu l’article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes respectives de la Caisse nationale de prévoyance assurances, de M. X… et de la C… ;

Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille quatre