CJUE, 3 septembre 2020, C-84/19 – ProfiCredit
Bonne foi – Coût du crédit hors intérêts – Déséquilibre significatif – Frais disproportionnés – Plafond légal
EXTRAITS :
« L’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13, telle que modifiée par la directive 2011/83, doit être interprété en ce sens qu’une clause contractuelle relative à des coûts du crédit hors intérêts, qui fixe ce coût en-dessous d’un plafond légal et qui répercute, sur le consommateur, des coûts de l’activité économique du prêteur, est susceptible de créer un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat au détriment du consommateur, lorsqu’elle met à la charge de ce dernier des frais disproportionnés par rapport aux prestations et au montant de prêt reçus, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier. »
ANALYSE :
La Cour de justice s’intéresse aux critères de qualification de clause abusive.
Ainsi, pour les clauses prévoyant à la charge du consommateur des frais autres que les intérêts, elle rappelle que l’examen du déséquilibre significatif ne saurait se limiter à une appréciation économique de nature quantitative. En effet, la Cour rappelle qu’un déséquilibre « peut résulter du seul fait d’une atteinte suffisamment grave à la situation juridique dans laquelle le consommateur […] est placé en vertu des dispositions nationales applicables », notamment, par le biais d’une mise à sa charge d’une obligation supplémentaire, non prévue par les règles nationales (voir, en ce sens, arrêt du 30 octobre 2019, Kiss et CIB Bank, C-621/17, EU:C:2019:820, point 51) (point 92).
En ce qui concerne l’exigence de bonne foi, la Cour rappelle que le juge national doit vérifier si le consommateur aurait accepté une telle clause dans le cadre de négociations avec le professionnel (arrêt du 7 novembre 2019, Profi Credit Polska, C-419/18 et C 483/18, EU:C:2019:930, point 55 et jurisprudence citée). En l’espèce, la Cour relève que, en vertu du droit national, « dans les coûts liés à l’octroi du crédit, ceux liés à l’exercice de l’activité économique du professionnel sont déjà inclus (point 94). Ainsi, « le coût du crédit hors intérêts pour le consommateur, qui est, en vertu de la législation nationale, plafonné, pourrait néanmoins donner lieu à un déséquilibre significatif au sens de la jurisprudence de la Cour, bien qu’il soit fixé en-dessous de ce plafond, si les services fournis en contrepartie ne relevaient pas raisonnablement des prestations effectuées dans le cadre de la conclusion ou de la gestion du contrat de crédit, ou que les montants mis à charge du consommateur au titre des frais d’octroi et de gestion de prêt apparaissent clairement disproportionnés par rapport au montant du prêt » (point 95). Elle en conclut alors que, « compte tenu de l’exigence de transparence qui découle de l’article 5 de la directive 93/13, il ne pourrait être considéré que le professionnel pouvait raisonnablement s’attendre, en traitant de façon transparente avec le consommateur, à ce que ce dernier accepte une telle clause à la suite d’une négociation » (point 96).