Cour de justice de l'Union européenne
Le délai de prescription d’un recours aux fins de restitution des frais perçus indûment sur le fondement d’une clause abusive ne peut commencer à courir à partir du jour où l’enrichissement injustifié est intervenu

CJUE, 22 avril 2021, C-485/19 - Profi Credit Slovakia

CJUE, 22 avril 2021, C-485/19 – Profi Credit Slovakia  

Paiement effectué en vertu d’une clause illicite – Enrichissement injustifié du prêteur – Prescription du droit à restitution – Point de départ du délai de prescription – Principe d’effectivité  

EXTRAITS : 

« Le principe d’effectivité doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale prévoyant qu’une action introduite par un consommateur aux fins de la restitution de sommes indûment versées dans le cadre de l’exécution d’un contrat de crédit, sur le fondement de clauses abusives au sens de la directive 93/13/CE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, ou de clauses contraires aux exigences de la directive 2008/48/CE du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008, concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE du Conseil, est soumise à un délai de prescription de trois ans qui commence à courir à partir du jour où l’enrichissement injustifié est intervenu ». 

ANALYSE : 

Un consommateur a introduit en 2017 un recours aux fins de restitution des frais perçus indûment après avoir appris qu’une clause de son contrat, conclu en 2011, revêtait un caractère abusif.  

La réglementation nationale prévoit qu’une action introduite par un consommateur aux fins de la restitution de sommes indûment versées est soumise à un délai de prescription de trois ans qui commence à courir à partir du jour où l’enrichissement injustifié est intervenu, quand bien même le consommateur lésé n’a pas eu connaissance du caractère abusif ou illicite de la clause contractuelle à l’origine de l’enrichissement sans cause. Il a alors été demandé à la Cour si cette réglementation ne contrevenait pas au principe d’effectivité. 

La Cour précise que, selon ce principe d’effectivité, les modalités procédurales des recours en justice interne ne doivent pas rendre impossible en pratique ou excessivement difficile l’exercice des droits conférés par le droit de l’Union. 

La Cour rappelle que l’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui, tout en prévoyant le caractère imprescriptible de l’action tendant à constater la nullité d’une clause abusive figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, soumet à un délai de prescription l’action visant à faire valoir les effets restitutifs de cette constatation, sous réserve du respect des principes d’équivalence et d’effectivité (voir, en ce sens, arrêts du 9 juillet 2020, Raiffeisen Bank et BRD Groupe Société Générale, C698/18 et C699/18). 

La Cour énonce toutefois que les modalités procédurales nationales qui exigent du consommateur qu’il agisse en justice dans un délai de trois ans à compter de la date de l’enrichissement injustifié, et dans la mesure où cet enrichissement peut avoir lieu au cours de l’exécution d’un contrat de longue durée, sont de nature à rendre excessivement difficile l’exercice des droits qui lui sont conférés par la directive 93/13.