Cour d'appel
La clause d’exigibilité immédiate, offrant un délai raisonnable aux emprunteurs pour régulariser leur situation, n’est pas abusive

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER, 26 SEPTEMBRE 2024, n° 23/00827

Cour d’appel de Montpellier, 26 septembre 2024, n° 23/00827 

– clause d’exigibilité immédiate du prêt – défaillance de l’emprunteur – clause de déchéance du terme –– clause d’intérêts de retard – clauses abusives 

 

 

EXTRAITS  

« Ainsi, en laissant à chaque emprunteur solidaire un délai raisonnable pour parvenir à régulariser l’arriéré de manière à éviter l’exigibilité immédiate du capital, la banque, en appliquant largement la clause d’exigibilité, n’a commis aucune faute dans l’exécution contractuelle. Le prononcé de la déchéance du terme est régulier et produit ses eets. 

 

La clause relative aux intérêts de retard insérée à l’acte de prêt est donc une déclinaison conforme aux dispositions légales applicables et ne crée aucun déséquilibre significatif au sens de l’article L132-1 du code de la consommation pas plus que son exécution n’est constitutive d’une faute de la banque. La clause de stipulation des intérêts de retard est régulière et produit ses eets »  

 

 

ANALYSE   

La Cour d’appel de Montpellier a été saisie pour juger des contestations liées à un prêt immobilier consenti en 2008 par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel des Savoie à M. [I] et Mme [G], alors mariés. Après la séparation du couple, M. [I] a cessé de payer les mensualités à partir de novembre 2020. La banque a procédé à la déchéance du terme en 2021 et a réclamé le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts, en application des clauses relatives à la déchéance du terme et aux intérêts de retard.   

 

La clause de déchéance du terme stipulait que, en cas de défaut de paiement d’une seule échéance du prêt, la banque pouvait exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, ainsi que des intérêts et des accessoires, sans qu’il soit nécessaire d’accomplir une quelconque formalité judiciaire préalable. Toutefois, avant de mettre en œuvre la déchéance du terme, la clause offrait aux emprunteurs un délai de 15 jours, après une mise en demeure, pour régulariser la situation. Si la régularisation n’était pas effectuée dans ce délai, la déchéance du terme pouvait être prononcé.   

 

En cas de retard de paiement des échéances, la clause d’intérêts de retard prévoyait que le capital restant dû continuerait à produire des intérêts au taux prévu par le contrat. De plus, si la déchéance du terme était prononcée, les sommes dues seraient majorées d’intérêts de retard au même taux que celui du prêt, avec une possibilité pour la banque de demander une indemnité supplémentaire.  

 

Les deux emprunteurs ont contesté la validité des clauses relatives à la déchéance du terme et aux intérêts de retard. Mme [G] a également invoqué le caractère abusif des clauses et demandé des délais de paiement supplémentaires.   

 

La Cour a jugé que la clause d’exigibilité immédiate, qui offrait un délai raisonnable aux emprunteurs pour régulariser leur situation, ne créait pas de déséquilibre significatif au sens de l’article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction alors applicable et ne pouvait donc pas être considérée comme abusive. Elle a constaté que cette clause laissait aux co-emprunteurs solidaires un délai raisonnable de quinze jours pour régulariser l’arriéré et éviter l’exigibilité immédiate du capital. Par conséquent, la déchéance du terme a été considérée comme régulière et produisant ses effets. L’emprunteur avait cependant invoqué le bénéfice de la solution rendue par la Cour de cassation le 22 mars 2023. Dans cette décision, la première chambre civile avait jugé abusive la clause autorisant la banque à exiger immédiatement la totalité des sommes dues au titre du prêt en cas de défaut de paiement d’une échéance à sa date, sans mise en demeure ou sommation préalable ni préavis d’une durée raisonnable.   

 

La Cour d’appel de Montpellier a également confirmé la régularité de la clause relative aux intérêts de retard, celle-ci étant conforme aux dispositions du Code de la consommation en vigueur.   

 

Enfin, la Cour a débouté les emprunteurs de leurs demandes de délais de paiement, estimant qu’ils n’ont pas justifié leur capacité à rembourser dans des conditions plus favorables.