Cour de cassation
Le juge doit examiner d’office si la clause de remboursement en devise étrangère est abusive

 Cass. civ, 1ère, 13 mars 2024, n°22-24.812

Cass. civ, 1ère, 13 mars 2024, n°22-24.812  

 

Directive 93/13/CEE – Crédit à la consommation en devise étrangère – principe d’effectivité – office du juge – clauses abusives 

 

EXTRAITS :   

 

« 7. En statuant ainsi, sans examiner d’office si la clause de remboursement en franc suisse n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment des emprunteurs, alors qu’elle relevait que ceux-ci développaient, au soutien de leur demande indemnitaire, des arguments relatifs au caractère abusif de la clause relative au risque de change, la cour d’appel a violé le texte susvisé. » 

 

ANALYSE :  

 

 

Dans sa décision du 13 mars 2024, la première chambre civile de la Cour de cassation devait statuer sur une clause de remboursement dans un contrat de prêt libellé en devise étrangère (franc suisse) et remboursable dans cette devise étrangère.  

 

La situation est donc différente de celle tranchée dans l’arrêt BNP Paribas Personal Finance rendu le 10 juin 2021 par la Cour de Justice de l’Union Européenne, n°C-776/19, concernant des prêts libellés en francs suisses et remboursables en monnaie nationale (euros). 

 

La Cour considère que le juge du fond doit examiner d’office le potentiel déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment des emprunteurs, au sein de la clause de remboursement d’un contrat de prêt en devise étrangère.  

 

La première chambre civile de la cour de cassation s’appuie sur l’arrêt « Pannon » rendu par la Cour de justice des Communautés Européennes le 4 juin 2009, n° C-243/08, où est établie l’obligation pour un juge d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle à condition qu’il dispose des éléments de droit et de faits nécessaires à cet effet, et ce sanctionné par l’interdiction de l’application de la clause litigieuse sauf opposition du consommateur. 

 

Aussi la première chambre civile casse l’arrêt d’appel au motif que les juges du fond n’ont pas examiné d’office si la clause de remboursement en franc suisse n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment des emprunteurs, alors même qu’elle relevait que ceux-ci développaient, au soutien de leur demande indemnitaire, des arguments relatifs au caractère abusif de la clause relative au risque de change,  

 

Cette solution diffère donc de celle rendue le 1er mars 2023 (Cass. civ. 1ère, 1 mars 2023, n° 21-20.260) dans laquelle elle avait jugé que la clause de remboursement d’un prêt libellé et remboursable en francs suisses à un emprunteur percevant ses revenus dans cette devise n’est pas abusive.  

 

En d’autres termes, les juges du fond doivent s’interroger sur le caractère abusif de la clause relative au risque de change tant dans les prêtes remboursables en euros que dans les prêts remboursables en devise étrangère. 

Voir également :  

 CJCE, arrêt du 4 juin 2009, C-243/08, Pannon GSM