Cass. civ 1re, 11 janvier 2023, n°21-16.859
Déséquilibre significatif – sanction – effets du réputé non écrit
EXTRAITS :
- Ayant relevé que la clause litigieuse prévoyait un paiement intégral du prix de la préparation, sans aucune résiliation possible pour motif légitime ou impérieux, le tribunal en a justement déduit que celle-ci créait, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.
Vu l’article L. 132-1, alinéa 8, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016
- Il résulte de ce texte que, lorsque sont jugées abusives certaines des clauses d’un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, celui-ci reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s’il peut subsister sans lesdites clauses.
- Pour dire que le contrat d’enseignement ne peut subsister sans la clause réputée non écrite, le jugement retient que la juridiction n’a pas vocation à rédiger les clauses d’un contrat litigieux, mais simplement à constater que celui-ci ne peut subsister en l’état.13. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l’impossibilité du contrat à subsister sans la clause réputée non écrite, le tribunal a violé le texte susvisé.
ANALYSE :
En l’espèce, une convention d’enseignement comportait une clause stipulant que le prix de 3565 euros devait être payé dans son intégralité sans possibilité de remboursement. L’affaire avait déjà fait l’objet d’une précédente cassation (Cass. civ. 1ère, 9 mai 2019, n°18-14.930). Le Tribunal d’instance avait en effet jugé que cette clause devait être déclarée abusive et non écrite, dès lors qu’elle prévoit « une clause de paiement intégral excluant toute résiliation pour un motif légitime et impérieux ». Il en avait déduit que l’organisme d’enseignement devait rembourser l’intégralité du prix à la cliente. Pour casser cette décision, la première chambre civile avait jugé que le tribunal d’instance, avait laissé incertain le fondement juridique de sa décision et qu’en outre il n’avait pas constaté que « le contrat ne pouvait subsister sans cette clause ». En d’autres termes, en imposant le remboursement du prix, les juges du fond avaient raisonné comme si le contrat devait être annulé en son intégralité. C’était implicitement considérer que le contrat ne pouvait subsister sans la clause, sans pour autant le justifier juridiquement.
Or, le juge de renvoi se voit de nouveau censuré, mais uniquement sur la portée de la sanction.
En effet, cette fois-ci le juge avait bien motivé juridiquement la caractérisation du caractère abusif. Les juges tout en citant une recommandation de la Commission des clauses abusives avaient pris soin de de se fonder sur une règle de droit contraignante : l ‘article R. 132-2 ancien du code de la consommation. Le pourvoi est donc rejeté. La Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de juger, comme en l’espèce, que la clause ne permettant pas le remboursement de la somme payée, pour motif légitime ou impérieux, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.
Ensuite, elle rappelle que le contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives, si le contrat peut subsister sans celles-ci. C’est sur ce point qu’elle casse de nouveau la décision du fond. En effet, pour dire que le contrat d’enseignement ne peut subsister sans la clause réputée non écrite, le jugement avait énoncé que « la juridiction n’a pas vocation à rédiger les clauses d’un contrat litigieux, mais simplement à constater que celui-ci ne peut subsister en l’état ». Selon la première chambre civile, ces motifs sont « impropres à caractériser l’impossibilité du contrat à subsister sans la clause réputée non écrite ». A cet égard, la CJUE a énoncé que le juge doit apprécier si objectivement, l’élimination d’une clause contractuelle abusive entraîne ou non la nullité du contrat (CJUE 29 avr. 2021, Bank BPH, aff. C-19/20). Il ne s’agit donc pas d’un simple constat.
Voir également
Cass. civ. 1ère, 19 janvier 2022, n°20-14.717
Cass. civ. 1ère, 12 octobre 2016, n°15-25.468
Recommandation N°91-01 Etablissements d’enseignement
Cass. civ. 1èere, 9 mai 2019, n°18-14.930