CJUE, 7 novembre 2019, C-419/18, Profi Credit Polska  

Contrat de crédit à la consommation – Article 6, paragraphe 1 – Article 7, paragraphe 1 – Examen d’office par le juge national du caractère abusif des clauses figurant dans le contrat  

EXTRAITS : 

L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 ainsi que l’article 10, paragraphe 2, de la directive 2008/48 doivent être interprétés en ce sens que lorsque, dans des circonstances telles que celles en cause au principal, une juridiction nationale éprouve des doutes sérieux sur le bien-fondé d’une demande s’appuyant sur un billet à ordre visant à garantir la créance issue d’un contrat de crédit à la consommation, et que ce billet a initialement été émis en blanc par le souscripteur, et complété ultérieurement par le bénéficiaire, cette juridiction doit examiner d’office si les stipulations convenues entre les parties présentent un caractère abusif et, à cet égard, peut exiger du professionnel qu’il produise l’écrit constatant ces stipulations, de telle sorte que ladite juridiction soit en mesure de s’assurer du respect des droits que les consommateurs tirent de ces directives. » 

ANALYSE : 

Conformément à une jurisprudence constante, (voir en ce sens : arrêt du 21 avril 2016, Radlinger et Radlingerová, C-377/14, EU:C:2016:283, point 77) le juge national, dès qu’il a des doutes sérieux sur le bien fondé d’une demande de billet à ordre soumis à un accord cambiaire préalable, est tenu d’examiner d’office le caractère abusif des stipulations convenues entre les parties.  

A cette fin, la CJUE permet au juge national d’exiger du professionnel un écrit constatant les stipulations contractuelles pour s’assurer de la licéité des clauses au regard des droits des consommateurs issus de la directive 93/13/CEE sur les clauses abusives 

Elle précise que les juridictions nationales, pour cet examen d’office, doivent laisser au besoin inappliquées toutes dispositions ou jurisprudence nationales qui s’opposent à un tel examen (point 76). 

En droit français, l’obligation pour le juge de relever d’office le caractère abusif d’une clause figure à l’article R. 632-1 alinéa 2 du code de la consommation.  

CJUE, 3 octobre 2019, C-260/18, Dziubak   

Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Directive 93/13/CEE – Article 6 §1 – Contrat de prêt libellé en devise étrangère – Conséquences de la constatation du caractère abusif d’une clause – Invalidation du contrat de prêt – Pouvoir du juge national.

EXTRAITS : 

1) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à ce qu’une juridiction nationale, après avoir constaté le caractère abusif de certaines clauses d’un contrat de prêt indexé sur une devise étrangère et assorti d’un taux d’intérêt directement lié au taux interbancaire de la devise concernée, considère, conformément à son droit interne, que ce contrat ne peut pas subsister sans ces clauses au motif que leur suppression aurait pour conséquence de modifier la nature de l’objet principal dudit contrat.

2) L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que, d’une part, les conséquences sur la situation du consommateur provoquées par l’invalidation d’un contrat dans son ensemble, telles que visées dans l’arrêt du 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C-26/13, EU:C:2014:282), doivent être appréciées au regard des circonstances existantes ou prévisibles au moment du litige, et que, d’autre part, aux fins de cette appréciation, la volonté que le consommateur a exprimée à cet égard est déterminante. 

3)  L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à ce qu’il soit remédié aux lacunes d’un contrat, provoquées par la suppression des clauses abusives figurant dans celui-ci, sur la seule base de dispositions nationales à caractère général prévoyant que les effets exprimés dans un acte juridique sont complétés, notamment, par les effets découlant du principe d’équité ou des usages, qui ne sont pas des dispositions supplétives ni des dispositions applicables en cas d’accord des parties au contrat. »   

4)      L’article 6, paragraphe 1, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose au maintien des clauses abusives figurant dans un contrat lorsque leur suppression conduirait à l’invalidation de ce contrat et que le juge estime que cette invalidation créerait des effets défavorables pour le consommateur, si ce dernier n’a pas consenti à un tel maintien.   

ANALYSE : 

L’arrêt Kásler avait autorisé le juge à remplacer la clause abusive par une disposition supplétive si le contrat ne peut être maintenu sans la clause et si la nullité ainsi encourue doit se révéler préjudiciable au consommateur, notamment lorsqu’elle rend exigible le montant du prêt restant dû( {CJUE, 30 avril 2014, Kásler et Káslerné Rábai (C-26/13, EU:C:2014:282)}. La présente décision ajoute que le consommateur ne doit pas avoir consenti au maintien du contrat. 

La CJUE circonscrit le type de dispositions supplétives que le juge peut substituer à la clause litigieuse. Il ne doit pas s’agir de dispositions qui, telles que la référence aux usages, supposent une « marge d’interprétation ou de « création » de la part du juge ». 

CJUE, 3 octobre 2019, aff. C-272/18 – Verein für Konsumenteninformation 

Contrat entre professionnel et consommateur – Contrat de fiducie – Contrat standardisé – Loi applicable – Clause de choix de loi – Dispositions impératives 

EXTRAIT :  

 « {…} une clause dun contrat de fiducie relatif à la gestion dune participation en commandite, tel que ceux en cause au principal, conclu entre un professionnel et un consommateur, qui na pas fait lobjet dune négociation individuelle et en vertu de laquelle le droit applicable est celui de l’État membre du siège de la société en commandite, est abusive, au sens de cette disposition, lorsquelle induit ce consommateur en erreur en lui donnant limpression que seule la loi de cet État membre sapplique au contrat, sans linformer du fait quil bénéficie également, en vertu de larticle 5, paragraphe 2, de la convention sur la loi applicable aux obligations contractuelles et de larticle 6, paragraphe 2, du règlement n593/2008, de la protection que lui assurent les dispositions impératives du droit national qui serait applicable en labsence de cette clause. » 

 ANALYSE :  

 Dans un contrat de fiducie entre un professionnel et un consommateur, la clause qui précise que le droit applicable est celui de lEtat membre du siège de la société du professionnel est abusive au sens de larticle 3, paragraphe 1 de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993 sur les clauses abusives en ce que :  

La CJUE avait déjà statué en ce sens dans un arrêt du 28 juillet 2016, Verein r Konsumenteninformation, C-191/15, EU:C:2016:612, point 71
 

Recommandation de la Commission des clauses abusives en ce sens : 

Recommandation n° 14-02, pt 46 Considérant que plusieurs clauses de contrats de fourniture de service de réseautage social prévoient l’application impérative d’une loi étrangère ; que de telles clauses qui laissent croire au consommateur ou au non-professionnel qu’il ne bénéficie pas des dispositions impératives de la loi française lorsqu’elles sont plus protectrices que celles de la loi visée dans la clause, créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur ou du non-professionnel 

CJUE, 3 octobre 2019, C-621/17 – Kiss  

Exigence de transparence – Rédaction claire et compréhensible 

EXTRAIT : 

« L’article 4, paragraphe 2, et l’article 5 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doivent être interprétés en ce sens que l’exigence selon laquelle une clause contractuelle doit être rédigée de manière claire et compréhensible n’impose pas que des clauses contractuelles n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle contenues dans un contrat de prêt conclu avec des consommateurs, telles que celles en cause au principal, qui déterminent précisément le montant des frais de gestion et d’une commission de décaissement mis à la charge du consommateur, leur méthode de calcul et leur date d’exigibilité, doivent également détailler tous les services fournis en contrepartie des montants concernés. » 

ANALYSE : 

La Cour de justice rappelle l’exigence de transparence matérielle accrue qu’elle a instituée et qui s’entend comme « imposant non seulement que la clause concernée soit intelligible pour le consommateur sur un plan grammatical, mais que ce consommateur soit également mis en mesure d’évaluer, sur le fondement de critères précis et intelligibles, les conséquences économiques qui en découlent pour lui » (voir, en ce sens, arrêt du 9 juillet 2015, Bucura, C-348/14, non publié, EU:C:2015:447, point 55 et jurisprudence citée) (point 37). 

Cependant, la Cour précise que cette exigence n’impose pas au prêteur « de détailler dans le contrat concerné la nature de tous les services fournis en contrepartie des frais prévus par une ou plusieurs clauses contractuelles. » Pour autant, elle ajoute qu’« il importe que la nature des services effectivement fournis puisse être raisonnablement comprise ou déduite à partir du contrat considéré dans sa globalité » et que « le consommateur doit être en mesure de vérifier qu’il n’existe pas de chevauchement entre les différents frais ou entre les services que ces derniers rémunèrent » (point 43). La haute juridiction communautaire renvoie ainsi une telle appréciation à la juridiction nationale.  

CJUE 19 sept. 2019 C-34-18 – Lovasne Toth

Clause d’appréciation unilatérale par le professionnel de la conformité de la chose ou du service aux stipulations du contrat 

 EXTRAIT :  

« L’article 3, paragraphe 3, de la directive de 93/13, lu en combinaison avec le point 1, sous m), de l’annexe de cette directive, doit être interprété en ce sens qu’il ne vise pas une clause contractuelle qui autorise le professionnel à apprécier unilatéralement si la prestation qui incombe au consommateur a été exécutéconformément au contrat. »

 ANALYSE :  

Selon la CJUE, la clause qui permet au professionnel d’apprécier unilatéralement si la prestation incombant au consommateur a été exécutée conformément au contrat n’entre pas dans la catégorie visée par le  point m) de l’annexe de la directive 93/13. Ainsi la clause qui autorise le professionnel à apprécier unilatéralement si la contreprestation du consommateur consistant à amortir une dette et à payer des frais y afférents n’est pas une clause octroyant au professionnel le droit de déterminer si le service fourni est conforme aux stipulations du contrat. 

 En droit français, la clause octroyant au professionnel le droit de déterminer si le service fourni est conforme aux stipulations du contrat est une clause présumée abusive de manière irréfragable. Voir C. consom., art. R. 212-1, 4°.   

CJUE, 19 sept. 2019 C-34/18 – Lovasne Toth

Contrat de prêt hypothécaire – Acte notarié – Apposition de la formule exécutoire par un notaire – Entrave à l’exercice des voies de recours du consommateur 

 EXTRAITS :  

 « 1) L’article 3, paragraphe 3, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lu en combinaison avec le point 1, sous q), de lannexe de cette directive, doit être interprété en ce sens quil ne qualifie pas dabusive, de façon générale et sans examen complémentaire, une clause contractuelle nayant pas fait lobjet dune négociation individuelle et ayant pour effet ou pour objet de renverser la charge de la preuve au détriment du consommateur. 

 2) L’article 3, paragraphe 3, de la directive 93/13/CEE, lu en combinaison avec le point 1, sous q), de lannexe de cette directive, doit être interprété en ce sens, dune part, quil ne vise pas une clause ayant pour objet ou pour effet de laisser légitimement supposer au consommateur quil est tenu dexécuter toutes ses obligations contractuelles, même sil estime que certaines prestations ne sont pas dues, dès lors que cette clause naltère pas la position juridique du consommateur compte tenu de la réglementation nationale applicable et, dautre part, quil vise une clause ayant pour objet ou pour effet dentraver lexercice, par le consommateur, dactions en justice ou des voies de recours, lorsque le montant restant dû est établi par acte notarié doté de la force probante, permettant au créancier de mettre fin au litige de manière unilatérale et définitive. 

 {…} 

 ANALYSE :  

 Première partie de la solution :  

 La CJUE rappelle l’obligation pour le juge national, lorsqu’il est en présence d’une clause visée dans  l’annexe de la directive 93/13, de procéder à un examen complémentaire afin de savoir si elle crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, conformément à l’article 3 paragraphe 1 de la directive 93/13Elle observe qu’il en est autrement si les États membres, comme ils en ont la possibilité, ont déclaré abusives de manière générale les clauses types qui sont énumérées dans l’annexe sans que soit requis un examen complémentaire selon les critères figurant à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13. 

En droit français, les clauses visées à l’annexe de la directive sont réparties dans des listes dites noires de clauses présumées abusives de manière irréfragable (C. consom., art. R. 212-1) et grises de clauses présumées abusives de façon simple (C. consom., art. R. 212-2). 

Elle juge que la clause qui permet au créancier de déclencher, en cas de manquement grave aux obligations contractuelles de la part du consommateur, l’exécution forcée du paiement du montant restant dû par celui-ci sur le fondement d’un acte notarié revêtu de la formule exécutoire ne relève pas du point 1 q) de l’annexe de la directive 93/13, qui vise la clause qui supprime ou entrave l’exercice par le consommateur d’actions en justice ou de voies de recours.  

 

 

 

TGI de Paris, 2 juillet 2019, PRIXTEL, N° RG 12/09994 

Clauses blanches – clause pénale – clause de résiliation – clause limitative de responsabilité – clause de dépôt de garantie – clause de suivi de consommation 

ANALYSE : 

Sur une action en cessation intentée par l’association de consommateurs UFC-QUE CHOISIR, le Tribunal relève un certain nombre de clauses illicites dont l’analyse du caractère illicite ne sera pas ici détaillée. Il s’agit d’une part de clauses contraires à la Loi Informatique et Libertés, et d’autre part des clauses contraires au code de la consommation. Certaines de ces clauses illicites sont considérées comme abusives par le Tribunal et réputées non écrites. Sur le lien entre clauses illicites et abusives : voir rapport annuel d’activité de la Commission pour l’année 2018. 

Le Tribunal juge un certain nombre de clauses abusives en application de l’article L. 212-1 du code de la consommation 

CLAUSE DE DEPOT DE GARANTIE 

L’article 5.2 des Conditions générales de service (CGS) de la Société PRIXTEL, en vigueur depuis le 24 octobre 2013, et l’article 5.2 des Conditions générales abonnement (CGA) de la société PRIXTEL, en vigueur depuis mars 2017, sont ainsi libellés 

Contenu de la clause: « 5.2. PRIXTEL se réserve la possibilité de demander une garantie de 450 € ou une avance sur facturation du même montant, dans l’un des cas suivants : – si non réception d’un paiement à son échéance ou rejet de paiement, – si l’adresse de facturation est une poste restante ou une Boîte Postale. » 

Analyse des clauses 5.2 des conditions générales de service et 5.2 des conditions générales d’abonnement : « la société PRIXTEL se réserve effectivement le droit et le pouvoir de déterminer unilatéralement une des modalités essentielles de la facturation suivant qu’elle constitue un dépôt de garantie avec effet de blocage ou une simple avance de facturation […] cette clause apparaît donc indéniablement contraire aux dispositions de l’article R.212-1 du code de la consommation ». 

CLAUSE PENALE

L’article 5.3 des Conditions générales de service (CGS) de la société PRIXTEL, en vigueur depuis le 02 novembre 2015, et l’article 5.3 des Conditions générales d’abonnement (CGA) de la société 

PRIXTEL, en vigueur depuis mars 2017, sont ainsi libellés : 

Contenu de la clause : « En cas de défaut partiel ou total de paiement à échéance d’une facture, le CLIENT est redevable d’une indemnité forfaitaire égale à 10 € TTC. Si ledit défaut de paiement est inférieur à 15 € TTC, le montant de l’indemnité forfaitaire est ramené à 5 euros TTC. Les frais de recouvrement seront à 

la charge du CLIENT en cas d’obtention par PRIXTEL d’un titre exécutoire ou d’exécution forcée contre lui. » 

Analyse des articles 5.3 des Conditions générales de service (CGS) et 5.3 des Conditions générales d’abonnement : “Le libellé de cette clause, d’une part ne précise pas que le client peut toutefois avoir des motifs légitimes de réserver le cas échéant tout ou partie de son paiement au titre de l’exception d’inexécution contractuelle en cas de manquement de l’opérateur à ses propres obligations, et d’autre part ne procède au rappel d’aucune règle réciproque s’appliquant au droit à indemnité du consommateur en cas d’inexécution totale ou partielle de l’opérateur à ses propres obligations. Par ailleurs, ce montant prévu de 10,00 euros à titre de clause pénale apparaît objectivement disproportionné, […], au regard du montant de 19,99 euros applicable à l’abonnement mensuel « tout illimité » ainsi que des montants des forfaits bloqués qui sont proposés aux pris de 2,00 euros TTC ou de 5,99 euros TTC”, cette clause sera annulée (voir en ce sens l’article L212-1 du code de la consommation). 

CLAUSE DE RESILIATION  

L’article 7.3 des Conditions générales de service (CGS) de la société PRIXTEL, en vigueur depuis le 31 mars 2015, est ainsi libellé :  

Contenu de la clause : « Résiliation par PRIXTEL PRIXTEL peut résilier le Contrat à tout moment de plein droit et par courrier recommandé en cas de survenance de l’un des événements suivants : – Défaut de paiement non régularisé conformément à l’Article 6 ci-dessus, – Retrait aux opérateurs exploitant de réseau de téléphonie mobile partenaires de PRIXTEL des autorisations administratives nécessaires à la fourniture du Service avec un préavis de 1 mois, – Terme du contrat conclu entre PRIXTEL et l’un de ses cocontractants en vue de la fourniture du Service, à condition qu’aucun contrat avec un autre opérateur mobile et ayant le objet ne succède à celui-ci, avec un préavis de 1 mois, – Fausse déclaration du CLIENT lors de la procédure de souscription et, plus généralement, violation avérée de l’une quelconque des obligations pesant sur le CLIENT en vertu des présentes clauses, hors les obligations liées au paiement des factures, sans préavis. Dans tous les cas, le Contrat étant à durée indéterminée, PRIXTEL peut le dénoncer par courrier recommandé en respectant un préavis d’un mois, en particulier en cas d’arrêt de l’offre concernée. » 

Analyse l’article 7.3 des Conditions générales de service : « À défaut de mise en place d’un tel dispositif de mise en demeure préalable, les éléments précités de cette clause sont constitutifs d’« (…) un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. » « (…) au détriment du consommateur (…) », au sens des dispositions de l’article L.212-1 alinéa 1er du code de la consommation. Il sera donc fait droit à la demande d’annulation de cette clause dans la limite des cas particuliers de résiliation pour défaut de paiement non régularisé et de fausse déclaration du client lors de la souscription du contrat ainsi que dans le cas général de violation avérée par le client de l’une quelconque de ses obligations contractuelles ». 

CLAUSE DE SUIVI DE CONSOMMATION 

L’article 6.2 des Conditions générales d’abonnement (CGA) de la société PRIXTEL, en vigueur depuis mars 2017, est ainsi libellé : 

Contenu de la clause : « Lorsque le suivi de consommation du CLIENT fait apparaître une dérive de consommation susceptible d’entraîner des conséquences pécuniaires significatives, ce seuil étant fixé à 150 € TTC de communications vers/depuis l’international ou vers des numéros surtaxés, PRIXTEL adressera au CLIENT un SMS d’avertissement le prévenant et l’invitant à vérifier cette situation et à régler une provision d’un montant de 75 € par internet sur l’Espace Client du site www.prixtel.com. A défaut de règlement, le service sera suspendu. Lors des 60 jours suivant l’activation de la ligne, PRIXTEL se réserve la possibilité, en cas d’atteinte de ce seuil, de restreindre partiellement le service objet de la dérive, sans impact sur les autres services fournis. A défaut de règlement de la provision, le service restera suspendu. » 

Analyse de l’article 6.2 des Conditions générales d’abonnement : « cette clause entend sanctionner des pics ponctuels de consommation alors que l’abonné n’a fait précédemment l’objet d’aucun incident de paiement ni d’aucune absence de régularisation suite à des incidents de paiement et qu’il n’a pas davantage été constaté un changement significatif dans ses habitudes de consommation, ce qui conduirait dès lors plutôt à une adaptation de sa formule contractuelle, à l’instauration d’un dépôt de garantie ou à la modification du dépôt de garantie préexistant […] , la réserve que se donne la société PRIXTEL de restreindre partiellement le service objet de la dérive lors des 60 jours suivant l’activation de la ligne en cas d’atteinte du seuil précité ne peut se dispenser d’une quelconque forme de prévenance ou d’avertissement préalable de l’utilisateur. ». Cette clause devra être annulée (voir en ce sens l’article L212-1 alinéa 1er du code de la consommation). 

CLAUSES  EXONERATOIRES DE RESPONSABILITE 

L’article 8.3 des Conditions générales de service (CGS), en vigueur depuis le 31 mars 2015, et l’article 8.3 des Conditions générales d’abonnement (CGA), en vigueur depuis mars 2017, de la société PRIXTEL, sont ainsi libellés : 

Contenu de la clause : « En cas d’arrêt total du service, PRIXTEL s’engage à le rétablir en 48 heures maximum. A défaut du rétablissement dans ce délai non justifié par une faute du CLIENT, le CLIENT peut notamment demander un dédommagement à PRIXTEL qui correspond au nombre de jours pendant lequel les Services susvisés n’ont pas été fournis, sous la forme d’un avoir à valoir sur les prochaines factures. » 

Analyse des 8.3 des Conditions générales de service et 8.3 des Conditions générales d’abonnement : « les opérateurs de télécommunications sont assujettis à l’instar des fournisseurs d’accès Internet à une obligation contractuelle de résultat, devant en conséquence garantir à leurs abonnés un accès permanent et dénué de toute interruption à l’ensemble des services souscrits par les consommateurs. La société PRIXTEL ne peut en conséquence s’exonérer de cette responsabilité de plein droit du professionnel que dans les cas avérés de mauvaise exécution personnellement imputable à l’abonné ou résultant de situations de force majeure définies comme des événements imprévisibles et insurmontables, conformément par ailleurs aux dispositions des articles 14 et 15 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 de confiance dans l’économie numérique. » Ainsi, « ne répond aucunement à cette obligation légale de résultat ne prévoyant en définitive l’exonération de responsabilité de l’opérateur que dans les cas de faute personnelle imputable à l’abonné ou dans les situations de cas fortuits ou de force majeure. Pour les mêmes motifs, le principe même d’une franchise de 48 heures apparaît totalement antinomique avec le principe de cette obligation de résultat. Enfin, l’avoir sur facturation comme mode exclusif d’indemnisation en cas d’interruption de service apparaît également abusif ». La clause sera annulée (voir en ce sens l’article L212-1 alinéa 1er du code de la consommation). 

L’article 9.4 des Conditions générales d’abonnement (CGA) de la société PRIXTEL de mars 2017, est ainsi libellé :  

Contenu de la clause : « Généralement, le CLIENT est seul responsable de l’utilisation du Service et il s’engage à respecter en permanence les dispositions légales, réglementaires ou administratives en vigueur au moment de son utilisation du Service et applicables à cette dernière. Il tiendra PRIXTEL indemne de tout dommage et/ou de toute plainte ou réclamation de tiers à son utilisation du Service. Il reconnaît que la transgression de ses obligations peut, notamment, avoir pour effet de l’exclure du Service. » 

Analyse de la clause : « la formulation de cette clause, de portée trop générale et dénuée de toute nuance, procède d’un véritable a priori d’exclusion de toute garantie de l’opérateur téléphonique et fournisseur d’accès Internet quant à l’utilisation de l’ensemble des services proposés. Cette clause laisse dès lors entendre que le consommateur n’a aucun recours contre son fournisseur en cas de dysfonctionnements de l’un quelconque des services proposés, pour quelque motif que ce soit. ». Cette clause sera annulée (voir en ce sens l’article L212-1 alinéa 1er du code de la consommation). 

Cass. Civ. 1re, 5 juin 2019, n° 16-12.519

Clause créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties – Clause de résiliation de plein droit du contrat de prêt pour une cause extérieure – Modification substantielle de l’économie du contrat de prêt

EXTRAIT :

«{…} prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de prêt pour une cause extérieure à ce contrat, afférente à l’exécution d’une convention distincte, une telle clause crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur ainsi exposé à une aggravation soudaine des conditions de remboursement et à une modification substantielle de l’économie du contrat de prêt {…} »

ANALYSE :

Dans le cadre d’un contrat de crédit à la consommation, est abusive la clause qui prévoit la faculté pour l’employeur de résilier le contrat de prêt de plein droit « pour une cause extérieure à ce contrat » en cas  de cessation des fonctions du salarié. En effet, une telle clause expose le consommateur « à une aggravation soudaine des conditions de remboursement et à une modification substantielle de l’économie du contrat de prêt ».

La première chambre civile de la cour de cassation se fonde sur l’article L.132-1 du code de la consommation (nouvel article L.212-1 du code de la consommation issu de la recodification du code de la consommation par une ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016)  pour dire qu’il y a un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment du consommateur, qui voit les conditions de son remboursement aggravées et l’économie de son contrat de prêt substantiellement modifiée.

Cass. Civ. 1re, 5 juin 2019, n° 16-12.519

Contrat entre professionnel et consommateur – Domaine d’application – Notion de professionnel – Entreprise qui conclut un contrat de crédit avec ses salariés – Notion de consommateur - Salarié

EXTRAIT :

« Est considéré comme un « consommateur », au sens de l’article 2. b) de la directive 93/13/CEE du 5 avril 1993 (concernant les clauses abusives dans les contrats de consommation), le salarié d’une entreprise et son conjoint qui concluent avec cette entreprise un contrat de crédit destiné à financer l’acquisition d’un bien immobilier à des fins privées, quand bien même il aurait perdu ultérieurement sa qualité de salarié de l’entreprise ».

 Est considéré comme un « professionnel » au sens de l’article 2. c) de cette même directive, une société qui conclut un contrat de crédit dans le cadre de son activité professionnelle, quand bien même cela ne constituerait pas son activité principale.

 ANALYSE :  

La Cour de cassation applique la solution posée par la CJUE dans son arrêt du 19 mars 2019 (C-590/17 – Pouvin et Dijoux) en réponse à la question préjudicielle qu’elle lui avait posé.