UFC c. EDF TGI Paris 30-10-2018

Un certain nombre de clauses ont été déclarées illicites. Elles ne font pas l’objet de la présente analyse.

Analyse 1 (p.30) : Choix et structure des tarifs réglementés – clause abusive (non)

La clause qui permet au fournisseur de s’exonérer de sa responsabilité en cas de mauvaise information du consommateur sur le prix facturable de l’électricité en donnant une information approximative sur les heures réelles de début et de fin des heures creuses fixées par le gestionnaire de réseau n’est pas une clause abusive, les sociétés ne pouvant objectivement s’engager sur des durées standard concernant ces écarts.

 

Analyse 2 (p.32) : Continuité et qualité de fourniture d’électricité – clause abusive (non)

La clause qui permet à la société de s’exonérer de son obligation de résultat de fournir de l’électricité lorsque la fourniture d’électricité est affectée pour des raisons accidentelles, sans faute de la part d’ERDF, d’interruptions dues au fait imprévisible et irrésistible d’un tiers, n’est pas abusive, une telle hypothèse revêtant le caractère de la force majeure.

 

Analyse 3 (p.35) : Accès aux installations pour le relevé des compteurs – clause abusive (non)

La clause permettant au fournisseur d’énergie,  dans l’hypothèse où le compteur n’a pas été relevé au cours des douze derniers mois du fait d’absences répétées du client, de faire payer à son client un  relevé spécial  n’est pas abusive.

 

Analyse 4 (p.39 / p.69) : Paiement des factures – pénalités de retard – clause abusive (non)

La clause qui prévoit des pénalités de retard en cas de retard de paiement, usuellement admise en jurisprudence et dans la législation, n’est pas abusive dès lors que le fournisseur est lui-même assujetti à des pénalités financières en cas de manquement à ses propres obligations.

 

Analyse 5 (p.41) : Mesures prises par le fournisseur en cas de non-paiement – délai de dix jours inséré dans un délai plus long – clause abusive (non)

La clause prévoyant qu’en cas de défaut de paiement, EDF peut résilier le contrat dix jours après une mise en demeure demeurée infructueuse adressée vingt jours après la date d’échéance de la facture, n’est pas abusive.

 

Analyse 6 (p.43 / p.54 / p.66) : Taxes et contributions – répercussion immédiate de leur modification ou évolution sur le client – clause abusive (non)

La clause prévoyant que toutes modifications et/ou évolutions des taxes, impôts, charges, redevances ou contributions de toute nature seront immédiatement applicables de plein droit au contrat en cours d’exécution n’est pas abusive.

 

Analyse 7 (p.48) : Puissance (modification de puissance) – clause abusive (non)

La clause qui prévoit que le client peut demander une modification de sa puissance à tout moment pouvant donner lieu à une facturation de frais n’est pas abusive.

 

Analyse 8 (p.50) : Prix de l’électricité – clause abusive (non)

La clause qui ne précise pas que le consommateur ne supportera pas les conséquences financières du décalage de la période tarifaire n’est pas abusive dès lors qu’elle apparaît suffisamment explicite sur cette absence d’imputation financière vis-à-vis du consommateur.

 

Analyse 9 (p.57) : Suspension de l’accès au RPD et interruption de fourniture (à l’initiative du fournisseur) – clause abusive (non)

La clause qui prévoit que la fourniture d’électricité sera interrompue en cas d’utilisation par le client de l’électricité fournie dans un but ou des conditions autres que celles prévues au contrat n’est pas abusive, les buts et conditions d’utilisation de l’électricité tels que définis dans les contrats de souscription étant suffisamment clairs et précis.

 

Analyse 10 (p.57) : Suspension de l’accès au RPD et interruption de fourniture (à l’initiative du distributeur) – clause abusive (non)

La clause qui prévoit que le gestionnaire peut procéder à la suspension du RPD en cas de non-justification de la conformité des installations à la réglementation et aux normes en vigueur n’est pas abusive puisqu’elle se borne à rappeler au consommateur qu’il doit personnellement disposer d’une installation conforme aux normes en vigueur dans un seul but de garantie de sécurité des personnes occupant les locaux immobiliers.

 

Analyse 11 (p.58 / p.75) : Résiliation du contrat par le client – exonération de responsabilité du fournisseur – clause abusive (oui)

La clause qui indique qu’en aucun cas le client ne pourra engager la responsabilité du fournisseur pour toute conséquence dommageable de sa propre négligence, et en particulier en cas d’interruption de fourniture par le distributeur, crée un déséquilibre significatif entre les parties en raison de sa trop grande généralité, dès lors qu’il n’établit aucune distinction quant aux conséquences dommageables de la négligence du client qui peuvent autant être totales que simplement partielles en rentrant dès lors en concours, et donc en partage ultérieur de responsabilités, avec des fautes éventuelles du fournisseur ou du distributeur. La clause est donc considérée comme abusive.

 

Analyse 12 (p.59 / p.74) : Résiliation du contrat par le fournisseur – clause abusive (oui)

La clause qui prévoit que le contrat pourra être résilié par le fournisseur en cas de suspension du contrat résultant d’un évènement de force majeure temporaire est abusive en ce que, d’une part, cette clause ne prévoit pas bilatéralement la même faculté au client, d’autre part, le délai d’un mois indiqué permettant la simple suspension du contrat apparaît trop bref au regard de la prévision d’une date possible de retour à la normale.

 

Analyse 13 (p.61) : Responsabilité en cas de mauvaise exécution ou de non-exécution des clauses du contrat relatives à l’accès au RPD et à son utilisation – clause abusive (oui)

La clause qui indique que le distributeur est seul responsable des dommages directs et certains causés au client en cas de non-respect d’une ou plusieurs obligations mises à sa charge au titre de l’accès et de l’utilisation du RPD est abusive dès lors que, dans ce type de contrat où le client a pour seul interlocuteur le fournisseur d’énergie, celui-ci est nécessairement le seul responsable à l’égard du celui-ci, celui-là disposant par ailleurs d’une action récursoire vis-à-vis du distributeur en cas de manquement du gestionnaire de réseau à ses obligations propres.

 

Analyse 14 (p.64) : Date de prise d’effet du contrat – date de mise en service ultérieure à la signature du contrat – clause abusive (non)

La clause qui prévoit que la date de mise en service figure sur la première facture adressée au client et non au jour de la signature du contrat n’est pas abusive puisque le délai prévisionnel moyen de fourniture d’énergie apparaît conforme au standard préconisé par le Médiateur de l’énergie dans sa recommandation n°2009-0050 du 1er avril 2019, en fonction d’incompressibles contraintes techniques.

 

 

CA Rennes 12/10/2018 – n°15/01634

Analyse 1

Est abusive la clause qui ajoute une faculté de résiliation au profit du prêteur en sus de la résiliation pour non-paiement des échéances seule prévue au modèle-type en ce qu’elle aggrave la situation de l’emprunteur en augmentant les hypothèses de résiliation à la discrétion du prêteur sur la base des déclarations de l’emprunteur sans que ce dernier soit à même d’identifier les informations dont le caractère erroné serait susceptible d’entraîner la résiliation du contrat et ce y compris dans l’hypothèse où l’emprunteur assure le paiement normal des échéances du prêt et quand bien même l’information erronée aurait pu relever d’une simple erreur commise de bonne  foi ou se révélerait sans réelle portée.

Analyse 2

La clause selon laquelle l’établissement de crédit est autorisé à partager le secret bancaire sur les informations enregistrées à l’occasion de la demande de crédit avec les établissements de crédit filiale et appartenant au même groupe n’est pas abusive puisqu’elle ne crée pas un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties.

1ère Chambre civile de la Cour de cassation – 10/10/2018 – 17-20.441

Il incombe au juge de rechercher d’office le caractère abusif de la clause qui autorise la banque à exiger immédiatement la totalité des sommes dues en cas de déclaration inexacte de la part de l’emprunteur, en ce qu’elle est de nature à laisser croire que l’établissement de crédit dispose d’un pouvoir discrétionnaire pour apprécier l’importance de l’inexactitude de cette déclaration et que l’emprunteur ne peut recourir au juge pour contester le bien-fondé de la déchéance du terme.

 

CA Caen 27.09.18 – 16-02810

ANALYSE :

La clause du contrat d’assurance qui permet à l’assuré de recourir à son propre médecin en cas de désaccord sur les conclusions de l’expert mandaté par la compagnie d’assurance sur son état d’invalidité mais qui prévoit qu’en ce cas, il doit régler lui-même les frais afférents à la rémunération de ce second médecin, ce qui réduit la probabilité pour l’assureur d’être confronté à une critique professionnelle de l’évaluation faite par son médecin-expert  est abusive en ce qu’elle entraîne un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

CA Amiens 27 septembre 2018

Contrat de formation dans un établissement d’enseignement – clauses de résiliation – clause abusive (oui)

ANALYSE :

Est abusive la clause d’un contrat d’enseignement qui prévoit qu’à compter du huitième jour de la signature et après la date de la rentrée scolaire tout désistement entraîne le paiement immédiat du solde de la scolarité annuel, aucun remboursement ni réduction des frais de scolarité ne pouvant être consenti en cas de départ volontaire empêchant les parents de se dégager du contrat, même pour un motif légitime et impérieux, alors que le contrat réserve la possibilité pour le professionnel d’annuler le contrat en cas d’effectif insuffisant, sans autre précision ou en cours d’année dans les conditions prévue au règlement intérieur ou en cas de non-respect des échéances tout en mettant à la charge de l’étudiant une partie voire la totalité des frais de scolarité.

CJUE – C-51/17 – 20/09/2018

Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Clauses abusives – Directive 93/13/CEE – Champ d’application – Article 1er, paragraphe 2 – Dispositions législatives ou réglementaires impératives – Article 3, paragraphe 1 – Notion de “clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle” – Clause intégrée dans le contrat après sa conclusion à la suite d’une intervention du législateur national – Article 4, paragraphe 2 – Rédaction claire et compréhensible d’une clause – Article 6, paragraphe 1 – Examen d’office, par le juge national, du caractère abusif d’une clause – Contrat de prêt libellé en devises étrangères conclu entre un professionnel et un consommateur »

  1.  La notion de « clause n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle », figurant à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprétée en ce sens qu’elle vise notamment une clause contractuelle modifiée par une disposition législative nationale impérative, adoptée après la conclusion d’un contrat avec un consommateur, visant à suppléer une clause entachée de nullité contenue dans ledit contrat.
  2. L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que le champ d’application de cette directive ne couvre pas des clauses reflétant des dispositions de droit national impératives, insérées postérieurement à la conclusion d’un contrat de prêt conclu avec un consommateur et visant à suppléer une clause de celui-ci entachée de nullité, en imposant un taux de change fixé par la Banque nationale. Néanmoins, une clause relative au risque de change, telle que celle en cause au principal, n’est pas exclue dudit champ d’application en vertu de cette disposition.
  3. L’article 4, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que l’exigence selon laquelle une clause contractuelle doit être rédigée de manière claire et compréhensible oblige les établissements financiers à fournir aux emprunteurs des informations suffisantes pour permettre à ceux-ci de prendre leurs décisions avec prudence et en toute connaissance de cause. À cet égard, cette exigence implique qu’une clause relative au risque de change soit comprise par le consommateur à la fois sur les plans formel et grammatical, mais également quant à sa portée concrète, en ce sens qu’un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, puisse non seulement avoir conscience de la possibilité de dépréciation de la monnaie nationale par rapport à la devise étrangère dans laquelle le prêt a été libellé, mais aussi évaluer les conséquences économiques, potentiellement significatives, d’une telle clause sur ses obligations financières.
  4. L’article 4 de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens qu’il impose que le caractère clair et compréhensible des clauses contractuelles soit apprécié en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entouraient celle-ci, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, nonobstant la circonstance que certaines de ces clauses ont été déclarées ou présumées abusives et, à ce titre, annulées, à un moment ultérieur, par le législateur national.
  5. L’article 6, paragraphe 1, et l’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’il appartient au juge national de relever d’office, en lieu et place du consommateur en sa qualité de partie requérante, le caractère éventuellement abusif d’une clause contractuelle, dès lors qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet.

CA Rennes 14-09-18 n°15/05559

Analyse 1 : clause relative au calcul de l’indemnité de résiliation – clause abusive (non)

N’est pas abusive la clause qui est la reprise formelle de l’article 5 du modèle type annexé à l’ancien article R. 311-6 du code de la consommation (conforme au mode de calcul réglementaire de l’indemnité de résiliation).

 

Analyse 2 : clause de résiliation unilatérale par l’établissement de crédit – clause abusive (non)

La clause de résiliation prévue au seul bénéfice du loueur qui repose sur un événement objectif ne dépendant pas de la volonté du loueur, comme le défaut de paiement des loyers par le locataire, n’est pas abusive.

CJUE – C-176/17 – 13/09/2018

Renvoi préjudiciel – Protection des consommateurs – Directive 93/13/CE – Clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs – Directive 2008/48/CE – Procédure d’injonction de payer fondée sur un billet à ordre garantissant les obligations découlant d’un contrat de prêt à la consommation

L’article 7, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale, telle que celle en cause au principal, permettant de délivrer une ordonnance d’injonction de payer, fondée sur un billet à ordre régulier, qui garantit une créance née d’un contrat de crédit à la consommation, lorsque le juge saisi d’une requête en injonction de payer ne dispose pas du pouvoir de procéder à un examen du caractère éventuellement abusif des clauses de ce contrat, dès lors que les modalités d’exercice du droit de former opposition à une telle ordonnance ne permettent pas d’assurer le respect des droits que le consommateur tire de cette directive.

1ère chambre civile de la Cour de cassation –  12/09/2018 – RG n°17-17650

 

Analyse :

Manque de base légale au regard de l’article L 212-1 du code de la consommation la cour d’appel qui, pour rejeter la demande des emprunteurs tendant à dire illicite la clause du contrat indexant le prêt sur le franc suisse, retient que les dispositions de ce texte autorisent les indexations en relation directe avec l’objet de la convention ou avec l’activité de l’une des parties,  sans rechercher d’office, comme il le lui incombait, si le risque de change ne pesait pas exclusivement sur l’emprunteur et si, dès lors que, selon le contrat litigieux, toute dépréciation de l’euro par rapport au franc suisse avait pour conséquence d’augmenter le montant du capital restant dû, la clause litigieuse n’avait pas pour objet ou pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur.