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Numéro : ccass130410.htm

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, domaine d’application, location avec promesse de vente de véhicule automobile, clause qui impose au preneur de restituer le véhicule loué dans les plus brefs délais à compter de la résiliation, portée.

Résumé : La clause d’un contrat avec promesse de vente de véhicule automobile qui impose au preneur de restituer le véhicule loué dans les plus brefs délais à compter de la résiliation, est abusive en ce qu’elle empêche ainsi le preneur de mettre en oeuvre la faculté de présentation d’un acquéreur impérativement ouverte par les articles L. 311-31 et D. 311-13 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause.

Mots clés :

LPV

 

N° de pourvoi: 12-18169
Publié au bulletin
Cassation
M. Charruault (président), président
SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat(s)

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Vu l’article L. 132-1 du code de la consommation ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que par acte sous seing privé du 18 avril 2008, M. X… a conclu avec la société Y… un contrat de location assorti d’une promesse de vente d’un véhicule automobile ; qu’après résiliation du contrat et vente aux enchères du véhicule, la société a déposé à l’encontre de M. X… une requête en injonction de payer l’indemnité de résiliation prévue au contrat ; que M. X… a formé opposition contre l’ordonnance ayant accueilli cette demande ;

Attendu que pour condamner M. X… au paiement de l’indemnité litigieuse, l’arrêt retient que la clause prévoyant la restitution du véhicule loué ainsi que la faculté pour le locataire de présenter un acquéreur au bailleur dans le délai d’un mois à compter de la résiliation ne saurait être considérée comme abusive dès lors qu’elle reprend les dispositions des articles L. 311-31 et D. 311-13 du code de la consommation dans leur rédaction applicable à la cause ;

Qu’en statuant ainsi, alors que la clause litigieuse, qui imposait au preneur de restituer le véhicule loué dans les plus brefs délais à compter de la résiliation et l’empêchait ainsi de mettre en oeuvre la faculté de présentation d’un acquéreur impérativement ouverte par les textes précités, avait pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur l’autre branche du moyen :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 5 janvier 2012, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Grenoble ;

Condamne la société Y… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Y…, la condamne à payer à M. X… la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix avril deux mille treize.

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Numéro : can130404.pdf

 

ANALYSE 1

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, exclusion, contrat de fourniture de gaz de pétrole liquéfié, clause rédigée en petits caractères.

Résumé : Les clauses d’un contrat de fourniture de gaz de pétrole liquéfié qui sont rédigées en petits caractères ne créent pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dès lors que les caractères utilisés sont certes petits mais lisibles pour le consommateur.

 

ANALYSE 2

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, domaine d’application, contrat de fourniture de gaz de pétrole liquéfié, clause relative aux modalités de résiliation du contrat, portée.

Résumé : Les clauses d’un contrat de fourniture de gaz de pétrole liquéfié qui stipulent différentes modalités de résiliation du contrat selon qu’elle émane du consommateur ou du professionnel est, comme l’a fait apparaître la Commission des clauses abusives dans son avis, abusive en ce qu’elles créent un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

 

ANALYSE 3

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, domaine d’application, contrat de fourniture de gaz de pétrole liquéfié, clause relative aux modalités de détermination du prix des fournitures, portée.

Résumé : La clause d’un contrat de fourniture de gaz de pétrole liquéfié qui stipule « les fournitures de propane sont facturées par (le fournisseur) au prix mentionné aux conditions particulières et est déterminé selon le barème en vigueur au jour de la livraison » est abusive au sens de l’article R. 132-1, 1°, du code de la consommation, qui considère qu’est abusive toute clause ayant pour objet ou pour effet de « constater l’adhésion du non-professionnel ou consommateur à des clauses qui ne figurent pas dans l’écrit qu’il signe ou dans un autre document auquel il n’est pas fait expressément référence lors de la conclusion du contrat et dont il n ‘a pas eu connaissance avant sa conclusion », dès lors qu’elle renvoie à un barème inexistant au jour de la conclusion du contrat et, en conséquence, non annexé à ce dernier.

 

 

ANALYSE 4

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, domaine d’application, contrat de fourniture de gaz de pétrole liquéfié, clause relative à la durée du contrat,

Résumé : La clause d’un contrat de fourniture de gaz de pétrole liquéfié qui fixe à 9 ans la durée du contrat est, comme l’a indiqué la Commission des clauses abusives dans son avis, abusive en ce qu’elle n’est pas le résultat d’une libre négociation entre les parties au contrat et en ce qu’elle revêt un caractère manifestement excessif empêchant le consommateur, pendant une longue durée, de s’approvisionner auprès d’autres fournisseurs ou de pouvoir recourir à d’autres sources d’énergie.

 

Mots clés :

GPL, gaz de pétrole liquéfié

Voir également :

 

Recommandation n° 84-01 : fourniture de gaz de pétrole liquéfié (GPL) en vrac et de mise à disposition ou de vente de réservoir

Avis n° 12-01 : contrat de fourniture de gaz

 

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

Dans l’affaire C-92/11,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesgerichtshof (Allemagne), par décision du 9 février 2011, parvenue à la Cour le 28 février 2011, dans la procédure

R…

contre

V…,

LA COUR (première chambre),

composée de M. A. Tizzano, président de chambre, MM. A. Borg Barthet, M. Ilešic, M. Safjan (rapporteur) et Mme M. Berger, juges,

avocat général: Mme V. Trstenjak,

greffier: M. K. Malacek, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 28 juin 2012,

considérant les observations présentées:

–        pour R… Vertrieb AG, par Mes P. Rosin, J. Schütze et A. von Graevenitz, Rechtsanwälte,

–        pour la V…, par Me P. Wassermann, Rechtsanwalt,

–        pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze et Mme J. Kemper, en qualité d’agents,

–        pour le gouvernement belge, par MM. T. Materne et J.-C. Halleux, en qualité d’agents,

–        pour la Commission européenne, par Mmes M. Owsiany-Hornung et S. Grünheid, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 13 septembre 2012,

rend le présent

Arrêt

1        La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation, d’une part, de l’article 1er, paragraphe 2, des articles 3 et 5 de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs (JO L 95, p. 29), ainsi que des points 1, sous j), et 2, sous b), deuxième alinéa, de l’annexe de celle-ci et, d’autre part, de l’article 3, paragraphe 3, et de l’annexe A, sous b) et c), de la directive 2003/55/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 98/30/CE (JO L 176, p. 57).

2        Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant R… à la V… au sujet de l’utilisation, par R…, de clauses prétendument abusives dans des contrats conclus avec des consommateurs.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 93/13

3        Le treizième considérant de la directive 93/13 énonce:

«[…] les dispositions législatives ou réglementaires des États membres qui fixent, directement ou indirectement, les clauses de contrats avec les consommateurs sont censées ne pas contenir de clauses abusives; […] par conséquent, il ne s’avère pas nécessaire de soumettre aux dispositions de la présente directive les clauses qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des principes ou des dispositions de conventions internationales dont les États membres ou la Communauté sont partis; […] à cet égard, l’expression ‘dispositions législatives ou réglementaires impératives’ figurant à l’article 1er paragraphe 2 [de cette directive] couvre également les règles qui, selon la loi, s’appliquent entre les parties contractantes lorsqu’aucun autre arrangement n’a été convenu».

4        Le vingtième considérant de cette directive prévoit:

«[…] le consommateur doit avoir effectivement l’occasion de prendre connaissance de toutes les clauses, et […], en cas de doute, doit prévaloir l’interprétation la plus favorable au consommateur».

5        Aux termes de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13:

«Les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ainsi que des dispositions ou principes des conventions internationales, dont les États membres ou la Communauté sont partis, notamment dans le domaine des transports, ne sont pas soumises aux dispositions de la présente directive.»

6        L’article 3 de cette directive prévoit:

«1.      Une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

2.      Une clause est toujours considérée comme n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle lorsqu’elle a été rédigée préalablement et que le consommateur n’a, de ce fait, pas pu avoir d’influence sur son contenu, notamment dans le cadre d’un contrat d’adhésion.

Le fait que certains éléments d’une clause ou qu’une clause isolée aient fait l’objet d’une négociation individuelle n’exclut pas l’application du présent article au reste d’un contrat si l’appréciation globale permet de conclure qu’il s’agit malgré tout d’un contrat d’adhésion.

Si le professionnel prétend qu’une clause standardisée a fait l’objet d’une négociation individuelle, la charge de la preuve lui incombe.

3.      L’annexe contient une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives.»

7        Aux termes de l’article 4, paragraphe 1, de ladite directive:

«[…] le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat, ou d’un autre contrat dont il dépend.»

8        L’article 5 de la même directive dispose:

«Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d’une clause, l’interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. […]»

9        L’annexe de la directive 93/13 énumère les clauses visées à l’article 3, paragraphe 3, de cette dernière:

«1.      Clauses ayant pour objet ou pour effet:

[…]

i)      [de] constater de manière irréfragable l’adhésion du consommateur à des clauses dont il n’a pas eu, effectivement, l’occasion de prendre connaissance avant la conclusion du contrat;

j)      d’autoriser le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable et spécifiée dans le contrat;

[…]

l)      de prévoir que le prix des biens est déterminé au moment de la livraison, ou d’accorder au vendeur de biens ou au fournisseur de services le droit d’augmenter leurs prix, sans que, dans les deux cas, le consommateur n’ait de droit correspondant lui permettant de rompre le contrat au cas où le prix final est trop élevé par rapport au prix convenu lors de la conclusion du contrat;

[…]

2.      Portée des points […] j) et l)

[…]

b)      […]

Le point j) ne fait pas non plus obstacle à des clauses selon lesquelles le professionnel se réserve le droit de modifier unilatéralement les conditions d’un contrat de durée indéterminée pourvu que soit mis à sa charge le devoir d’en informer le consommateur avec un préavis raisonnable et que celui-ci soit libre de résilier le contrat.

[…]

d)      Le point l) ne fait pas obstacle aux clauses d’indexation de prix pour autant qu’elles soient licites et que le mode de variation du prix y soit explicitement décrit.»

La directive 2003/55

10      L’article 3, paragraphe 3, de la directive 2003/55 est rédigé dans les termes suivants:

«Les États membres prennent les mesures appropriées pour protéger les clients finals et assurer un niveau élevé de protection des consommateurs, et veillent en particulier à garantir une protection adéquate aux clients vulnérables, y compris en prenant les mesures appropriées pour leur permettre d’éviter l’interruption de la fourniture de gaz. Dans ce contexte, ils peuvent prendre les mesures appropriées pour protéger les clients raccordés au réseau de gaz dans les régions reculées. Les États membres peuvent désigner un fournisseur du dernier recours pour les clients raccordés au réseau de gaz. Ils garantissent un niveau de protection élevé des consommateurs, notamment en ce qui concerne la transparence des conditions contractuelles, l’information générale et les mécanismes de règlement des litiges. Les États membres veillent à ce que le client éligible puisse effectivement changer de fournisseur. En ce qui concerne au moins les clients résidentiels, ces mesures incluent celles figurant dans l’annexe A.»

11      L’annexe A de la directive 2003/55 qui concerne les mesures relatives à la protection des consommateurs est libellée ainsi:

«Sans préjudice de la réglementation communautaire sur la protection des consommateurs, notamment la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil[, du 20 mai 1997, concernant la protection des consommateurs en matière de contrats à distance (JO L 144, p. 19),] et la directive 93/13 […], les mesures visées à l’article 3 ont pour objet de garantir que les clients:

a)      […]

Les conditions des contrats doivent être équitables et communiquées à l’avance. En tout état de cause, ces informations doivent être fournies avant la conclusion ou la confirmation du contrat. Lorsque le contrat est conclu par le truchement d’un intermédiaire, les informations mentionnées ci-dessus sont également communiquées avant que le contrat soit conclu;

b)      sont avertis en temps utile de toute intention de modifier les conditions contractuelles et sont informés de leur droit de dénoncer le contrat au moment où ils sont avisés de l’intention de le modifier. Les prestataires de services avisent immédiatement leurs abonnés de toute augmentation des tarifs, en temps utile et en tout cas avant la fin de la période de facturation normale suivant l’entrée en vigueur de l’augmentation. Les États membres veillent à ce que les clients soient libres de dénoncer un contrat s’ils n’acceptent pas les nouvelles conditions qui leur sont notifiées par leur fournisseur de gaz;

c)      reçoivent des informations transparentes relatives aux prix et aux tarifs pratiqués, ainsi qu’aux conditions générales applicables, en ce qui concerne l’accès aux services de gaz et l’utilisation de ces services;

d)      […] Les conditions générales doivent être équitables et transparentes. Elles sont énoncées dans un langage clair et compréhensible. Les clients sont protégés des méthodes de vente déloyales ou trompeuses;

[…]»

Le droit allemand

12      Conformément à l’article 1er, paragraphes 1 et 2, du règlement portant sur les conditions générales de fourniture de gaz aux clients relevant du tarif standard (Verordnung über Allgemeine Bedingungen für die Gasversorgung von Tarifkunden, ci-après l’«AVBGasV») applicable au cours de la période visée par le litige au principal:

«(1)      Les conditions générales auxquelles les entreprises gazières sont tenues […] de raccorder toute personne à leur réseau de distribution et de fournir à des prix tarifaires généraux sont fixées aux articles 2 à 34 du présent règlement. Ces conditions font partie du contrat de fourniture.

(2)      Le client au sens du présent règlement est le client relevant du tarif standard.»

13      L’article 4, paragraphes 1 et 2, de l’AVBGasV énonce:

«(1)      L’entreprise gazière fournit du gaz aux conditions et tarifs généraux respectivement applicables. Le pouvoir calorifique avec la marge de fluctuation découlant des conditions de production et d’achat de l’entreprise ainsi que la pression statique du gaz correspondant à l’approvisionnement du client sont déterminés selon les tarifs généraux.

(2)      Les modifications apportées aux tarifs généraux et conditions générales ne prennent effet qu’après leur publication officielle.

[…]»

14      L’article 32, paragraphes 1 et 2, de l’AVBGasV prévoit:

«(1)      Le contrat court sans interruption jusqu’à sa résiliation par l’une des deux parties avec un préavis d’un mois à la fin d’un mois calendaire […]

(2)      En cas de modification des tarifs généraux ou de modification des conditions générales par l’entreprise gazière dans le cadre du présent règlement, le client peut résilier le contrat avec un préavis de deux semaines à la fin du mois calendaire suivant la publication officielle.

[…]»

15      L’article 307 du code civil allemand (Bürgerliches Gesetzbuch, ci-après le «BGB») dispose:

«(1)      Les dispositions figurant dans des conditions générales de vente sont inapplicables lorsqu’elles désavantagent de façon indue et contraire aux principes de la bonne foi le cocontractant de la personne qui les utilise. Un désavantage indu peut également résulter du fait que la disposition en question n’est pas claire et compréhensible.

(2)      En cas de doute, il convient d’admettre qu’un désavantage indu existe lorsqu’une disposition

1.      n’est pas compatible avec les idées fondamentales de la réglementation légale dont elle s’écarte, ou

2.      limite des droits ou obligations essentiels résultant de la nature du contrat de telle sorte que la réalisation de l’objectif contractuel est menacée.

(3)      Les paragraphes 1 et 2 ainsi que les articles 308 et 309 ne s’appliquent qu’aux dispositions de conditions générales de vente qui ont pour objet de déroger à des dispositions légales ou de les compléter. D’autres dispositions peuvent être inapplicables au titre des dispositions combinées des première et seconde phrases du paragraphe 1.»

16      Aux termes de l’article 310, paragraphe 2, du BGB:

«Les articles 308 et 309 ne trouvent pas à s’appliquer aux contrats des entreprises d’approvisionnement en énergie électrique, en gaz, en eau et en chauffage urbain régissant la fourniture de clients à contrat spécial à partir du réseau, dans la mesure où les conditions de fourniture ne s’écartent pas au détriment de ces derniers de celles des règlements sur les conditions générales d’approvisionnement des clients relevant du tarif standard en énergie électrique, gaz, chauffage urbain et eau. La première phrase s’applique mutatis mutandis aux contrats relatifs à l’assainissement des eaux usées.»

Le litige au principal et les questions préjudicielles

17      R…, une entreprise d’approvisionnement de gaz, a conclu avec des consommateurs, dans le cadre du régime de la liberté contractuelle, des contrats de livraison de gaz naturel (contrats spéciaux). Outre la possibilité de conclure de tels contrats, R… et les autres fournisseurs de gaz ont l’obligation, conformément à la réglementation nationale, de contracter avec des consommateurs en appliquant un tarif standard (contrats tarifaires).

18      Les clauses des conditions générales (ci-après les «CG») intégrées dans les contrats spéciaux en cause dans la présente affaire, relatives à la modification des prix du gaz, faisaient référence aux dispositions de la réglementation nationale ou aux conditions standardisées dont le texte correspondait à cette réglementation, cette dernière n’étant pas applicable auxdits contrats et régissant uniquement les contrats tarifaires. Ladite réglementation permettait au fournisseur de faire varier unilatéralement les prix du gaz sans indiquer le motif, les conditions ou l’ampleur d’une telle modification, tout en garantissant, cependant, que les clients seraient informés de ladite modification et qu’ils seraient libres, le cas échéant, de dénoncer le contrat.

19      Au cours de la période allant du 1er janvier 2003 au 1er octobre 2005, R… a augmenté les prix du gaz à quatre reprises. Pendant cette période, les clients en cause dans l’affaire au principal n’ont pas eu la possibilité de changer de fournisseur de gaz.

20      La Verbraucherzentrale Nordrhein-Westfalen eV réclame à R…, pour le compte desdits consommateurs, le remboursement des suppléments que ces derniers lui ont versés à l’occasion de l’augmentation du prix.

21      Le Landgericht Dortmund a fait droit à la demande de remboursement pour un montant de 16 128,63 euros augmenté des intérêts. R… n’a pas obtenu gain de cause en appel devant l’Oberlandesgericht.

22      R… a introduit une demande en «Revision» de l’arrêt rendu par l’Oberlandesgericht. Le Bundesgerichtshof a estimé que la solution du litige au principal dépendait de l’interprétation des dispositions pertinentes du droit de l’Union.

23      Dans ces conditions, le Bundesgerichtshof a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)      Convient-il d’interpréter l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 […] en ce sens que les clauses contractuelles de modification des prix contenues dans les contrats de livraison de gaz passés avec des consommateurs qui sont livrés en dehors de l’obligation générale d’approvisionnement, dans le cadre de la liberté contractuelle de droit commun (clients à contrat spécial), ne sont pas soumises aux dispositions de cette directive dès lors que les règles légales en vigueur, applicables aux clients relevant du tarif standard dans le cadre de l’obligation générale de connexion et d’approvisionnement, sont reprises telles quelles dans les relations contractuelles avec les clients à contrat spécial?

2)      Convient-il d’interpréter – pour autant qu’elles soient applicables – les dispositions combinées des articles 3 et 5 et des points 1, [sous] j), et 2, [sous] b), deuxième [alinéa], de l’annexe de […] la directive 93/13 […], ainsi que les dispositions combinées de l’article 3, paragraphe 3, et de l’annexe A, [sous] b) et/ou […] c), de la directive 2003/55 […] en ce sens que les clauses contractuelles de modification des prix contenues dans les contrats de livraison de gaz naturel passés avec des clients à contrat spécial sont conformes aux exigences d’une rédaction claire et compréhensible, et/ou du degré de transparence nécessaire lorsque, sans indiquer le motif, les conditions et l’ampleur d’une modification de prix, elles garantissent cependant que l’entreprise d’approvisionnement en gaz notifiera à ses clients toute augmentation de prix avec un préavis raisonnable et que les clients seront libres de résilier le contrat s’ils ne souhaitent pas accepter les conditions modifiées qui leur auront été notifiées?»

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

24      Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que cette directive ne s’applique pas aux clauses des CG intégrées dans des contrats, conclus entre un professionnel et un consommateur, qui reprennent une règle du droit national applicable à une autre catégorie de contrat et qui ne sont pas soumis à la réglementation nationale en cause.

25      À cet égard, il importe de rappeler que, ainsi qu’il ressort de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13, les clauses contractuelles qui reflètent des dispositions législatives ou réglementaires impératives ne sont pas soumises aux dispositions de celle-ci.

26      En effet, ainsi qu’il ressort du treizième considérant de la directive 93/13, l’exclusion prévue à l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 s’étend aux clauses reflétant les dispositions du droit national s’appliquant entre les parties contractantes indépendamment de leur choix ou celles desdites dispositions qui sont applicables par défaut, c’est-à-dire en l’absence d’un arrangement différent par les parties à cet égard.

27      Par ailleurs, sont exclues du champ d’application de cette directive les clauses contractuelles reflétant les dispositions de la réglementation nationale régissant une certaine catégorie de contrat, non pas seulement dans des cas ou le contrat conclu par les parties relève de cette catégorie de contrat, mais également en ce qui concerne d’autres contrats auxquels ladite réglementation s’applique conformément à une disposition du droit national.

28      Ainsi que le fait valoir Mme l’avocat général au point 47 de ses conclusions, cette exclusion de l’application du régime de la directive 93/13 est justifiée par le fait que, dans les cas visés aux points 26 et 27 du présent arrêt, il est légitime de présumer que le législateur national a établi un équilibre entre l’ensemble des droits et des obligations des parties à certains contrats.

29      Ce raisonnement n’est pas, toutefois, applicable aux clauses d’un contrat différent de ceux visés au point 27 du présent arrêt. Dans une telle situation, le législateur national a en effet décidé d’exclure ledit contrat du champ d’application du régime réglementaire prévu pour d’autres catégories de contrats. Une volonté éventuelle des parties d’étendre l’application de ce régime à un contrat différent ne saurait être assimilée à l’établissement, par le législateur national, d’un équilibre entre l’ensemble des droits et des obligations des parties au contrat.

30      Par ailleurs, permettre d’exclure l’application de la directive 93/13 aux clauses contractuelles du seul fait que celles-ci reprennent des dispositions législatives ou réglementaires nationales qui ne sont pas applicables au contrat conclu par les parties, ou se réfèrent à de telles dispositions, mettrait en cause le régime de la protection des consommateurs instauré par cette directive.

31      En effet, dans ces conditions, un professionnel pourrait facilement échapper au contrôle du caractère abusif des clauses n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle avec un consommateur en rédigeant les clauses de ses contrats de la même façon que celles prévues par la réglementation nationale pour certaines catégories de contrats. Or, l’ensemble des droits et des obligations créés par le contrat ainsi rédigé ne correspondrait pas nécessairement à l’équilibre que le législateur national a voulu établir pour les contrats régis par sa réglementation dans la matière.

32      En l’occurrence, ainsi qu’il ressort du dossier national, la possibilité, pour un fournisseur, de faire varier unilatéralement les prix du gaz sans indiquer le motif, les conditions ou l’ampleur d’une modification dudit prix était prévue par la réglementation nationale, à savoir l’AVBGasV, qui n’était pas applicable aux contrats spéciaux de livraison de gaz naturel conclus par R… avec des consommateurs dans le cadre du régime de la liberté contractuelle.

33      Le législateur allemand a donc choisi d’exclure les contrats spéciaux du champ d’application de l’AVBGasV.

34      Par ailleurs, cette constatation n’est pas remise en cause par le fait que l’interdiction des clauses spécifiques visées aux articles 308 et 309 du BGB n’est pas applicable, en vertu de l’article 310, paragraphe 2, de ce code, aux contrats des entreprises d’approvisionnement en gaz régissant la fourniture de clients à contrat spécial, dans la mesure où les conditions de fourniture ne s’écartent pas au détriment de ces derniers de celles des règlements sur les conditions générales d’approvisionnement des clients relevant du tarif standard.

35      En effet, lesdits contrats spéciaux sont soumis à l’article 307 du BGB, en vertu duquel les dispositions figurant dans des CG sont inapplicables lorsqu’elles désavantagent de façon indue et contraire aux principes de la bonne foi le cocontractant de la personne qui les utilise, un tel désavantage pouvant également résulter du fait que la disposition en question n’est pas claire et compréhensible.

36      Or, l’article 307 du BGB correspond à l’article 3 de la directive 93/13, qui est un élément fondamental du régime de la protection des consommateurs instauré par cette directive.

37      Il ressort de ces considérations que, comme l’a relevé en substance Mme l’avocat général au point 56 de ses conclusions, le législateur allemand a délibérément décidé de ne pas appliquer aux contrats spéciaux le régime établi par la réglementation nationale déterminant le contenu des clauses des contrats de la fourniture du gaz.

38      Dans ces conditions, n’est pas exclue, en vertu de l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13, l’application de cette dernière à l’égard de clauses telles que celles des contrats spéciaux en cause dans l’affaire au principal.

39      Eu égard à tout ce qui précède, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13 doit être interprété en ce sens que cette directive s’applique aux clauses des CG intégrées dans des contrats, conclus entre un professionnel et un consommateur, qui reprennent une règle du droit national applicable à une autre catégorie de contrat et qui ne sont pas soumis à la réglementation nationale en cause.

Sur la seconde question

40      Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 3 et 5 de la directive 93/13, lus en combinaison avec les points 1, sous j), et 2, sous b), deuxième alinéa, de l’annexe de cette directive, ainsi que l’article 3, paragraphe 3, de la directive 2003/55, lu en combinaison avec l’annexe A, sous b) et/ou c), de cette dernière directive, doivent être interprétés en ce sens qu’une clause contractuelle standardisée, par laquelle l’entreprise d’approvisionnement se réserve le droit de modifier unilatéralement le prix de la fourniture du gaz, mais qui n’indique pas le motif, les conditions ou l’ampleur d’une telle modification, est conforme aux exigences posées par lesdites dispositions lorsqu’il est garanti que les consommateurs seront informés de la modification du prix avec un préavis raisonnable et que ces derniers disposeront alors du droit de résilier le contrat s’ils ne souhaitent pas accepter ces modifications.

41      Afin de répondre à cette question, il convient, tout d’abord, de rappeler que le système de protection mis en œuvre par la directive 93/13 repose sur l’idée que le consommateur se trouve dans une situation d’infériorité à l’égard du professionnel en ce qui concerne tant le pouvoir de négociation que le niveau d’information, situation qui le conduit à adhérer aux conditions rédigées préalablement par le professionnel, sans pouvoir exercer une influence sur le contenu de celles-ci (arrêts du 15 mars 2012, Perenicová et Perenic, C-453/10, non encore publié au Recueil, point 27, ainsi que du 26 avril 2012, Invitel, C-472/10, non encore publié au Recueil, point 33).

42      Eu égard à une telle situation d’infériorité, la directive 93/13 énonce, d’une part, à son article 3, paragraphe 1, l’interdiction de clauses standardisées qui, en dépit de l’exigence de bonne foi, créent au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat.

43      D’autre part, la directive 93/13 impose à son article 5 aux professionnels l’obligation de formuler les clauses d’une façon claire et compréhensible. Le vingtième considérant de la directive 93/13 précise à cet égard que le consommateur doit avoir effectivement l’opportunité de prendre connaissance de toutes les clauses du contrat.

44      En effet, l’information, avant la conclusion d’un contrat, sur les conditions contractuelles et les conséquences de ladite conclusion est, pour un consommateur, d’une importance fondamentale. C’est, notamment, sur la base de cette information que ce dernier décide s’il souhaite se lier par les conditions rédigées préalablement par le professionnel.

45      Le législateur de l’Union a, par ailleurs, accordé une importance particulière à cette information du consommateur également dans le cadre de la directive 2003/55 et donc spécifiquement par rapport aux contrats portant sur la fourniture de gaz. Ainsi, cette dernière directive oblige, en vertu de son article 3, paragraphe 3, les États membres à garantir un niveau de protection élevé des consommateurs en ce qui concerne la transparence des conditions contractuelles. À cet égard, il ressort de l’annexe A, sous a), c) et d), de la directive 2003/55 que lesdits États sont notamment tenus d’adopter des mesures qui assurent que ces conditions soient équitables et transparentes, qu’elles soient énoncées dans un langage clair et compréhensible, qu’elles soient communiquées aux consommateurs avant la conclusion du contrat et que ces derniers reçoivent des informations transparentes relatives aux prix et aux tarifs pratiqués, ainsi qu’aux CG applicables. Cette annexe précise, en outre, que les mesures qui y sont visées s’appliquent sans préjudice de la directive 93/13.

46      S’agissant d’une clause standardisée, comme celle en cause au principal, qui permet à l’entreprise d’approvisionnement de modifier unilatéralement les frais de la fourniture du gaz, il convient de relever qu’il découle tant du point 2, sous b), deuxième alinéa, et d), de l’annexe de la directive 93/13 que de l’annexe A, sous b), de la directive 2003/55 que le législateur a reconnu, dans le cadre de contrats de durée indéterminée comme des contrats de fourniture de gaz, l’existence d’un intérêt légitime de l’entreprise d’approvisionnement de pouvoir modifier les frais de son service.

47      Une clause standardisée permettant une telle adaptation unilatérale doit toutefois satisfaire aux exigences de bonne foi, d’équilibre et de transparence posées par lesdites directives.

48      À cet égard, il importe de rappeler qu’il appartient, en définitive, non pas à la Cour, mais au juge national de déterminer, dans chaque cas concret, s’il en est ainsi. En effet, la compétence de la Cour porte sur l’interprétation des dispositions de ces directives, ainsi que sur les critères que le juge national peut ou doit appliquer lors de l’examen d’une clause contractuelle au regard de celles-ci, étant entendu qu’il appartient audit juge de se prononcer, en tenant compte desdits critères, sur la qualification concrète d’une clause contractuelle particulière en fonction des circonstances propres au cas d’espèce (voir arrêts du 9 novembre 2010, VB Pénzügyi Lízing, C-137/08, Rec. p. I-10847, point 44, et Invitel, précité, point 22).

49      S’agissant de l’appréciation à porter sur une clause permettant au professionnel de modifier unilatéralement les frais du service à fournir, la Cour a déjà indiqué qu’il résulte des articles 3 et 5 ainsi que des points 1, sous j) et l), et 2, sous b) et d), de l’annexe de la directive 93/13 que revêt une importance essentielle à cette fin le point de savoir, d’une part, si le contrat expose de manière transparente le motif et le mode de variation des frais liés au service à fournir, de sorte que le consommateur puisse prévoir, sur la base de critères clairs et compréhensibles, les modifications éventuelles de ces frais et, d’autre part, si les consommateurs disposent du droit de mettre fin au contrat pour le cas où ces frais seraient effectivement modifiés (voir, en ce sens, arrêt Invitel, précité, points 24, 26 et 28).

50      En ce qui concerne, en premier lieu, l’information due au consommateur, il apparaît que ne satisfait pas à cette obligation de porter à la connaissance du consommateur le motif et le mode de variation desdits frais ainsi que son droit de résilier le contrat un simple renvoi, opéré dans des CG, à un texte législatif ou réglementaire stipulant les droits et les obligations des parties. Il est en effet essentiel que le consommateur soit informé par le professionnel du contenu des dispositions en cause (voir, en ce sens, arrêt Invitel, précité, point 29).

51      Si le niveau de l’information requise peut varier en fonction des circonstances propres au cas et des produits ou des services concernés, l’absence d’information à ce sujet avant la conclusion du contrat ne saurait, en principe, être compensée par le seul fait que les consommateurs seront, en cours d’exécution du contrat, informés de la modification des frais avec un préavis raisonnable et de leur droit de résilier le contrat s’ils ne souhaitent pas accepter cette modification.

52      En effet, si, au regard du point 2, sous b), de l’annexe de la directive 93/13 et de l’annexe A, sous b), de la directive 2003/55, il incombe à l’entreprise d’approvisionnement d’avertir les consommateurs avec un préavis raisonnable de toute augmentation des tarifs et de leur droit de résilier le contrat, cette obligation, qui est prévue pour l’hypothèse où ladite entreprise souhaiterait effectivement exercer le droit qu’elle s’est réservé de modifier les tarifs, s’ajoute à celle d’informer le consommateur, avant la conclusion du contrat et en termes clairs et compréhensibles, des principales conditions d’exercice d’un tel droit de modification unilatérale.

53      Ces exigences strictes quant à l’information due au consommateur, tant au stade de la conclusion d’un contrat d’approvisionnement qu’en cours d’exécution de celui-ci, en ce qui concerne le droit du professionnel d’en modifier unilatéralement les conditions, répondent à une mise en balance des intérêts des deux parties. À l’intérêt légitime du professionnel de se prémunir contre un changement de circonstances correspond l’intérêt tout aussi légitime du consommateur, d’une part, de connaître, et donc de pouvoir prévoir, les conséquences qu’un tel changement pourrait, à l’avenir, entraîner à son égard et, d’autre part, de disposer dans une telle hypothèse des données lui permettant de réagir de la manière la plus appropriée à sa nouvelle situation.

54      En ce qui concerne, en second lieu, le droit du consommateur de résilier le contrat d’approvisionnement qu’il a conclu dans le cas d’une modification unilatérale des tarifs pratiqués par le professionnel, il revêt une importance essentielle, comme l’a relevé en substance Mmel’avocat général au point 85 de ses conclusions, que la faculté de résiliation conférée au consommateur ne soit pas de pure forme mais puisse être réellement exercée. Tel ne serait pas le cas lorsque, pour des raisons liées aux modalités de la mise en œuvre du droit de résiliation ou aux conditions du marché concerné, ledit consommateur ne dispose pas d’une réelle possibilité de changer de fournisseur ou lorsqu’il n’a pas été informé de manière convenable et en temps utile de la modification à intervenir, le privant ainsi de la possibilité d’en vérifier le mode de calcul et, le cas échéant, de changer de fournisseur. À cet égard, doivent être pris en compte, notamment, la question de savoir si le marché en cause est concurrentiel, le coût éventuel, pour le consommateur, lié à la résiliation du contrat, le délai entre la communication et l’entrée en vigueur des nouveaux tarifs, les informations fournies au moment de cette communication, ainsi que le coût à supporter et le temps nécessaire pour changer de fournisseur.

55      Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la seconde question:

–        Les articles 3 et 5 de la directive 93/13, lus en combinaison avec l’article 3, paragraphe 3, de la directive 2003/55, doivent être interprétés en ce sens que, afin d’apprécier si une clause contractuelle standardisée, par laquelle une entreprise d’approvisionnement se réserve le droit de modifier les frais de la fourniture de gaz, répond ou non aux exigences de bonne foi, d’équilibre et de transparence posées par ces dispositions, revêtent notamment une importance essentielle:

–        la question de savoir si le contrat expose de manière transparente le motif et le mode de variation desdits frais, de sorte que le consommateur puisse prévoir, sur la base de critères clairs et compréhensibles, les modifications éventuelles de ces frais. L’absence d’information à ce sujet avant la conclusion du contrat ne saurait, en principe, être compensée par le seul fait que les consommateurs seront, en cours d’exécution du contrat, informés de la modification des frais avec un préavis raisonnable et de leur droit de résilier le contrat s’ils ne souhaitent pas accepter cette modification et

–        la question de savoir si la faculté de résiliation conférée au consommateur peut, dans les conditions concrètes, être réellement exercée.

–        Il appartient à la juridiction de renvoi d’effectuer ladite appréciation en fonction de toutes les circonstances propres au cas d’espèce, y compris l’ensemble des clauses figurant dans les CG des contrats de consommation dont la clause litigieuse fait partie.

Sur la limitation des effets dans le temps du présent arrêt

56      Dans l’hypothèse où l’arrêt à intervenir aurait pour conséquence qu’une clause telle que celle en cause dans l’affaire au principal ne satisferait pas aux exigences du droit de l’Union, le gouvernement allemand, dans ses observations écrites, a demandé à la Cour de limiter les effets de son arrêt dans le temps, de sorte que l’interprétation retenue dans cet arrêt ne s’applique pas aux modifications tarifaires survenues avant la date du prononcé dudit arrêt. R…, qui a également formulé une demande en ce sens dans ses observations écrites, estime que les effets de l’arrêt devraient être reportés de 20 mois afin de permettre aux entreprises concernées ainsi qu’au législateur national de s’adapter aux conséquences dudit arrêt.

57      À l’appui de leurs demandes, le gouvernement allemand et R… ont invoqué les conséquences financières graves qui pourraient être produites à l’égard d’un grand nombre de contrats de fourniture de gaz en Allemagne, entraînant un déficit considérable des entreprises concernées.

58      À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à une jurisprudence constante, l’interprétation que la Cour donne d’une règle du droit de l’Union, dans l’exercice de la compétence que lui confère l’article 267 TFUE, éclaire et précise la signification et la portée de cette règle, telle qu’elle doit ou aurait dû être comprise et appliquée depuis le moment de sa mise en vigueur. Il s’ensuit que la règle ainsi interprétée peut et doit être appliquée par le juge à des rapports juridiques nés et constitués avant l’arrêt statuant sur la demande d’interprétation, si, par ailleurs, les conditions permettant de porter devant les juridictions compétentes un litige relatif à l’application de ladite règle se trouvent réunies (voir, notamment, arrêts du 2 février 1988, Blaizot e.a., 24/86, Rec. p. 379, point 27; du 10 janvier 2006, Skov et Bilka, C-402/03, Rec. p. I-199, point 50; du 18 janvier 2007, Brzezinski, C-313/05, Rec. p. I-513, point 55, ainsi que du 7 juillet 2011, Nisipeanu, C-263/10, point 32).

59      Ce n’est qu’à titre tout à fait exceptionnel que la Cour peut, par application d’un principe général de sécurité juridique inhérent à l’ordre juridique de l’Union, être amenée à limiter la possibilité pour tout intéressé d’invoquer une disposition qu’elle a interprétée en vue de mettre en cause des relations juridiques établies de bonne foi. Pour qu’une telle limitation puisse être décidée, il est nécessaire que deux critères essentiels soient réunis, à savoir la bonne foi des milieux intéressés et le risque de troubles graves (voir, notamment, arrêts Skov et Bilka, précité, point 51; Brzezinski, précité, point 56; du 3 juin 2010, Kalinchev, C-2/09, Rec. p. I-4939, point 50, ainsi que du 19 juillet 2012, Redlihs, C-263/11, non encore publié au Recueil, point 59).

60      S’agissant du risque de troubles graves, il convient de constater, à titre liminaire, que, en l’occurrence, l’interprétation du droit de l’Union donnée par la Cour dans le présent arrêt porte sur la notion de «clause abusive», visée à l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13, ainsi que sur les critères que le juge national peut ou doit appliquer lors de l’examen de la clause contractuelle litigieuse au regard des dispositions de la directive 93/13 en tenant compte des dispositions de la directive 2003/55. En effet, il appartient au juge national de se prononcer, en tenant compte desdits critères, sur la qualification concrète d’une clause contractuelle particulière en fonction des circonstances propres au cas d’espèce (arrêts précités VB Pénzügyi Lízing, point 44, et Invitel, point 22).

61      Dans ces conditions, les conséquences financières, pour les entreprises de fourniture du gaz en Allemagne ayant conclu avec les consommateurs des contrats spéciaux de livraison de gaz naturel, ne sauraient être déterminées uniquement sur la base de l’interprétation du droit de l’Union donnée par la Cour dans le cadre de la présente affaire (voir, par analogie, arrêt du 13 mars 2007, Test Claimants in the Thin Cap Group Litigation, C-524/04, Rec. p. I-2107, point 131).

62      En conséquence, il y a lieu de constater que l’existence d’un risque de troubles graves, au sens de la jurisprudence citée au point 59 du présent arrêt, de nature à justifier une limitation des effets dans le temps du présent arrêt ne saurait être considérée comme établie.

63      Étant donné que le second critère visé au point 59 du présent arrêt n’est pas rempli, il n’est pas nécessaire de vérifier s’il est satisfait au critère relatif à la bonne foi des milieux intéressés.

64      Il résulte de ces considérations qu’il n’y a pas lieu de limiter dans le temps les effets du présent arrêt.

Sur les dépens

65      La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit:

1)      L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que cette directive s’applique aux clauses des conditions générales intégrées dans des contrats, conclus entre un professionnel et un consommateur, qui reprennent une règle du droit national applicable à une autre catégorie de contrat et qui ne sont pas soumis à la réglementation nationale en cause.

2)      Les articles 3 et 5 de la directive 93/13, lus en combinaison avec l’article 3, paragraphe 3, de la directive 2003/55/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 98/30/CE, doivent être interprétés en ce sens que, afin d’apprécier si une clause contractuelle standardisée, par laquelle une entreprise d’approvisionnement se réserve le droit de modifier les frais de la fourniture de gaz, répond ou non aux exigences de bonne foi, d’équilibre et de transparence posées par ces dispositions, revêtent notamment une importance essentielle :

  •  la question de savoir si le contrat expose de manière transparente le motif et le mode de variation desdits frais, de sorte que le consommateur puisse prévoir, sur la base de critères clairs et compréhensibles, les modifications éventuelles de ces frais. L’absence d’information à ce sujet avant la conclusion du contrat ne saurait, en principe, être compensée par le seul fait que les consommateurs seront, en cours d’exécution du contrat, informés de la modification des frais avec un préavis raisonnable et de leur droit de résilier le contrat s’ils ne souhaitent pas accepter cette modification et
  • la question de savoir si la faculté de résiliation conférée au consommateur peut, dans les conditions concrètes, être réellement exercée.

Il appartient à la juridiction de renvoi d’effectuer ladite appréciation en fonction de toutes les circonstances propres au cas d’espèce, y compris l’ensemble des clauses figurant dans les conditions générales des contrats de consommation dont la clause litigieuse fait partie.

Consulter l’arrêt de la Cour

Numéro : cjue130321.htm

ANALYSE 1

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, directive n° 93/13, application aux clauses qui reprennant une règle du droit national applicable à une autre catégorie de contrat ne sont pas soumis à la réglementation nationale en cause, portée.

Résumé : L’article 1er, paragraphe 2, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doit être interprété en ce sens que cette directive s’applique aux clauses des conditions générales intégrées dans des contrats, conclus entre un professionnel et un consommateur, qui reprennent une règle du droit national applicable à une autre catégorie de contrat et qui ne sont pas soumis à la réglementation nationale en cause.

ANALYSE 2

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, directive n° 93/13, critères d’appréciation d’une clause d’un contrat d’adhésion, clause par laquelle une entreprise d’approvisionnement se réserve le droit de modifier les frais de la fourniture de gaz

Résumé : Les articles 3 et 5 de la directive 93/13, lus en combinaison avec l’article 3, paragraphe 3, de la directive 2003/55/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 98/30/CE, doivent être interprétés en ce sens que, afin d’apprécier si une clause contractuelle standardisée, par laquelle une entreprise d’approvisionnement se réserve le droit de modifier les frais de la fourniture de gaz, répond ou non aux exigences de bonne foi, d’équilibre et de transparence posées par ces dispositions, revêtent notamment une importance essentielle :

  •  la question de savoir si le contrat expose de manière transparente le motif et le mode de variation desdits frais, de sorte que le consommateur puisse prévoir, sur la base de critères clairs et compréhensibles, les modifications éventuelles de ces frais. L’absence d’information à ce sujet avant la conclusion du contrat ne saurait, en principe, être compensée par le seul fait que les consommateurs seront, en cours d’exécution du contrat, informés de la modification des frais avec un préavis raisonnable et de leur droit de résilier le contrat s’ils ne souhaitent pas accepter cette modification et
  • la question de savoir si la faculté de résiliation conférée au consommateur peut, dans les conditions concrètes, être réellement exercée.

ANALYSE 3

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, directive n° 93/13, appréciation du caractère abusif d’une clause, circonstances propres au cas d’espèce, examen en considération des clauses figurant dans les conditions générales des contrats de consommation dont la clause litigieuse fait partie.

Résumé : Il appartient à la juridiction saisie du liitge d’apprécier le caractère éventuellement abusif de la clause en fonction de toutes les circonstances propres au cas d’espèce, y compris l’ensemble des clauses figurant dans les conditions générales des contrats de consommation dont la clause litigieuse fait partie.

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Numéro : ccass130320_15314.htm

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, exclusion, contrat d’assurance lié à un crédit, clause instituant une période d’attente reportant dans le temps la prise d’effet des garanties.

Résumé : La clause qualifiée « période d’attente » répond à la volonté de l’assureur de se prémunir contre des déclarations d’adhérents fausses ou incomplètes, en reportant dans le temps la prise d’effet des garanties, ce dont il résulte que cette clause, destinée à préserver le caractère aléatoire du contrat d’assurance, ne crée pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment de l’assuré.

Voir également :

Recommandation n° 90-01 : assurance complémentaires à un contrat de crédit à la consommation ou immobilier ou à un contrat de location avec option d’achat

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Numéro : ccass130320_11797.htm

 

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, exclusion, vente en l’état futur d’achèvement, clause qui porte décharge automatique de garantie du vendeur pour non-conformité apparente après expiration du délai d’un mois suivant la prise de possession du bien.

Résumé : C’est à bon droit que la cour d’appel a estimé que n’est pas abusive la clause d’un contrat de vente en l’état futur d’achèvement, qui porte décharge automatique de garantie du vendeur pour non-conformité apparente après expiration du délai d’un mois suivant la prise de possession du bien par l’acquéreur, cette stipulation ayant pour effet de supprimer ou réduire le droit à réparation du consommateur au prix d’un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, dès lors que l’omission d’un balcon était une non-conformité immédiatement apparente, qui pouvait être constatée au premier coup d’oeil sans qu’il soit nécessaire de procéder à des vérifications approfondies et retenu qu’il n’était pas établi en quoi le délai d’un mois prévu par l’acte pour notifier une contestation relative à la conformité des biens supprimerait ou limiterait le droit à réparation du consommateur.

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Numéro : ccass130320.pdf

 

ANALYSE 1

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, exclusion, contrat de vente de véhicule automobile, clause qui exclut la garantie conventionnelle d’un constructeur automobile lorsque le client confie les réparations de son véhicule à un professionnel indépendant du réseau du fabricant.

Résumé : C’est à bon droit que la cour d’appel a retenu que la clause d’un contrat de vente de véhicule automobile, qui exclut la garantie conventionnelle d’un constructeur automobile lorsque le client confie les réparations de son véhicule à un professionnel indépendant du réseau du fabricant, ne créait aucun déséquilibre significatif entre les parties au détriment du consommateur en obligeant ce dernier à confier son véhicule à un professionnel du réseau du fabricant, dès lors qu’une telle clause concernait uniquement les travaux de réparation effectués en exécution de la garantie conventionnelle, le constructeur en assurant gratuitement la prise en charge et pouvant ainsi exiger la certification et l’agrément préalable du réparateur.

 

ANALYSE 2

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, domaine d’application, contrat de vente de véhicule automobile, clause relative aux interventions non couvertes par la garantie, portée.

 

Résumé : La clause d’un contrat de vente de véhicule automobile qui stipule que ne sont pas couvertes par la garantie « les interventions exécutées par des réparateurs qui ne sont pas des concessionnaires ou agents » du réseau est abusive en ce que le caractère ambigu de la clause, né du rapprochement de l’intitulé de la rubrique sous laquelle elle figure et de sa propre teneur, a pour effet de laisser croire au consommateur qu’il est tenu, pour bénéficier de la garantie conventionnelle, de faire effectuer par un concessionnaire ou agent du réseau toutes les interventions exécutées sur son véhicule, quand bien même la garantie sollicitée serait sans lien avec ces travaux.

 

ANALYSE 3

Titre : Protection du consommateur, clauses abusives, exclusion, contrat de vente de véhicule automobile, clause relative aux exclusions de garanties.

Résumé : La clause d’un contrat de vente de véhicule automobile qui stipule que ne sont pas couverts par la garantie les « incidents consécutifs à un abus d’utilisation, à la négligence, à la modification des caractéristiques de la voiture, résultant de l’utilisation du véhicule en compétition, course ou rallye, ou de leurs essais, accidents, utilisation de pièces non d’origine (les pièces détachées et accessoires complémentaires sont qualifiés de pièces non d’origine dès lors que les spécifications techniques et leurs qualités ne sont pas identiques à celles des pièces que le constructeur utilise pour la fabrication des véhicules neufs ou qu’il fournit pour la maintenance des véhicules en circulation), ainsi que le non-respect des entretiens réguliers conformément aux spécifications et instructions du constructeur définies dans le manuel du propriétaire » dès lors que le caractère ambigu de la clause, né du rapprochement de l’intitulé de la rubrique sous laquelle elle figure et de sa propre teneur, a pour effet de laisser croire au consommateur que l’utilisation de pièces non d’origine emporte en toute hypothèse exclusion de la garantie conventionnelle.

 

Voir également :

Recommandation n°04-02 : achat de véhicules automobiles de tourisme

Recommandation n°85-02 : achat de véhicules automobiles de tourisme

Recommandation n°79-01 : contrats de garantie

Audience publique du mercredi 20 mars 2013
N° de pourvoi: 12-15314

M. Charruault (président), président
Me Rouvière, SCP Ghestin, avocat(s)


Attendu, selon l’arrêt attaqué (Montpellier, 25 mai 2011), que, le 29 janvier 1999, Mme X… a, en qualité de co-emprunteur avec M. X…, accepté de la caisse Y, aux droits de laquelle se trouve Y (le prêteur), deux offres de prêts immobiliers d’un montant de 124 000 francs et 493 000 francs, remboursables respectivement en deux cent trente-quatre et cent quatre-vingt-six mois, et a adhéré à l’assurance groupe souscrite par le prêteur auprès de la Caisse nationale de prévoyance assurances (CNP) (l’assureur) pour garantir les risques décès, invalidité absolue définitive (IAD) et incapacité temporaire totale (ITT), qu’elle a été atteinte, au mois d’août suivant, d’une polyarthrite rhumatoïde et placée en arrêt de travail à compter du 27 septembre 1999, puis en invalidité 2e catégorie à compter du 27 septembre 2002 avec versement d’une rente, qu’elle a sollicité la garantie de l’assureur qui l’a déclinée en excipant de la clause « période d’attente », fixée à un an à compter de la prise d’effet de l’assurance ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches

Attendu que Mme X… fait grief à l’arrêt de la débouter de sa demande de prise en charge par l’assureur des échéances du prêt, au titre de la garantie IAD, alors, selon le moyen :

1°/ que la cour d’appel ne pouvait la débouter de sa demande de prise en charge par la CNP des échéances de remboursement du prêt au titre de la garantie IAD en se bornant à affirmer que cette invalidité était survenue au cours de la première année suivant la prise d’effet du contrat, sans répondre aux conclusions de l’intéressée invoquant le fait, dont elle justifiait, qu’elle ne s’était trouvée en état d’invalidité que le 27 octobre 2002, soit postérieurement à la « période d’attente », ce dont il résultait que la garantie lui était acquise ; qu’ainsi l’arrêt est entaché d’une violation de l’article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que la cour d’appel ne pouvait la débouter de sa demande concernant la garantie IAD en se bornant à affirmer que la clause relative à la « période d’attente » ne revêtait pas un caractère abusif, sans rechercher si cette clause qui excluait toute indemnisation, ne la privait pas de façon inappropriée de ses droits, créant ainsi un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; qu’ainsi, l’arrêt manque de base légale au regard de l’article L. 132-1 du code de la consommation ;

3°/ que la clause litigieuse n’étant pas intitulée limitation de risque, exclusion de garantie, ou encore champ d’application de la garantie, la cour d’appel ne pouvait la débouter de sa demande de prise en charge au titre de la garantie IAD, dès lors que le terme « période d’attente » implique qu’à l’expiration de cette période, l’assuré puisse bénéficier des garanties souscrites ; que, dès lors, en écartant la nature de clause d’exclusion de garantie, tout en rendant une décision ayant le même effet, la cour d’appel a dénaturé la clause relative à la période d’attente figurant au contrat et violé l’article 1134 du code civil ;

Mais attendu que, s’étant bornée à alléguer que son état nécessitait une aide ménagère à domicile, sans prétendre qu’elle aurait eu besoin de l’assistance totale et constante d’une tierce personne pour l’ensemble des actes ordinaires de la vie, Mme X… n’a pas tenté d’établir qu’elle se serait trouvée en état d’invalidité absolue et définitive au sens de la définition contractuelle de ce risque ; que, partant, les griefs sont inopérants ;

Sur le second moyen, pris en sa première branche :

Attendu que Mme X… reproche à l’arrêt de la débouter de sa demande de prise en charge, par l’assureur, des échéances du prêt au titre de la garantie ITT, alors, selon le moyen, que la cour d’appel ne pouvait la débouter de sa demande concernant la garantie ITT en se bornant à affirmer que la clause relative à la « période d’attente » ne revêtait pas un caractère abusif, sans rechercher si cette clause qui excluait toute indemnisation ne la privait pas de façon inappropriée de ses droits, créant ainsi un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties ; qu’ainsi, l’arrêt manque de base légale au regard des dispositions de l’article L. 132-1 du code de la consommation ;

Mais attendu qu’ayant retenu, par motifs adoptés, que la clause qualifiée « période d’attente » répondait à la volonté de l’assureur de se prémunir contre des déclarations d’adhérents fausses ou incomplètes, en reportant dans le temps la prise d’effet des garanties, ce dont il résultait que cette clause, destinée à préserver le caractère aléatoire du contrat d’assurance, ne créait pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au détriment de l’assuré, la cour d’appel a légalement justifié sa décision ;

Et sur le second moyen, pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu qu’il est reproché à l’arrêt de statuer comme il a été dit, alors, selon le moyen :

1°/ que la clause « période d’attente » litigieuse n’étant pas intitulée limitation de risque, exclusion de garantie ou encore champ d’application de la garantie, la cour d’appel ne pouvait débouter Mme X… de sa demande de prise en charge au titre de la garantie ITT, dès lors que le terme « période d’attente » implique qu’à l’expiration de cette période, l’assuré puisse bénéficier des garanties souscrites ; que dès lors, en écartant la nature de clause d’exclusion de garantie, tout en rendant une décision ayant le même effet, la cour d’appel a dénaturé la clause relative à la période d’attente et violé les dispositions de l’article 1134 du code civil ;

2°/ que le tribunal ayant constaté que la clause qualifiée « période d’attente » avait pour effet de limiter, pendant la première année d’assurance, l’application de la garantie ITT, ce dont il s’évinçait que cette garantie était, en toute hypothèse, due à l’expiration de cette période, la cour d’appel qui, en confirmant le jugement, est censée en avoir adopté les motifs, ne pouvait débouter Mme X… de sa demande de ce chef ; que, dès lors, l’arrêt est, à nouveau, entaché d’une violation de l’article 1134 du code civil ;

Mais attendu que la clause litigieuse stipulant que la période d‘attente s’entendait de la période pendant laquelle l’incapacité temporaire totale n’était garantie que si elle était d’origine accidentelle, la cour d’appel a, sans dénaturation, exactement jugé que la garantie n’était pas due à Mme X… dès lors que son incapacité, dépourvue d’origine accidentelle, était survenue au cours de la première année suivant la prise d’effet du contrat ; que le moyen n’est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme X… aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille treize.