Cass. civ 1re, 11 janvier 2023, n°21-16.859 

 

 

Déséquilibre significatif – sanction – effets du réputé non écrit  

 

EXTRAITS : 

  1. Ayant relevé que la clause litigieuse prévoyait un paiement intégral du prix de la préparation, sans aucune résiliation possible pour motif légitime ou impérieux, le tribunal en a justement déduit que celle-ci créait, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. 

 

Vu l’article L. 132-1, alinéa 8, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 

  1. Il résulte de ce texte que, lorsque sont jugées abusives certaines des clauses d’un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, celui-ci reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s’il peut subsister sans lesdites clauses.
  2. Pour dire que le contrat d’enseignement ne peut subsister sans la clause réputée non écrite, le jugement retient que la juridiction n’a pas vocation à rédiger les clauses d’un contrat litigieux, mais simplement à constater que celui-ci ne peut subsister en l’état.13. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l’impossibilité du contrat à subsister sans la clause réputée non écrite, le tribunal a violé le texte susvisé.  

 

ANALYSE : 

En l’espèce, une convention d’enseignement comportait une clause stipulant que le prix de 3565 euros devait être payé dans son intégralité sans possibilité de remboursement. L’affaire avait déjà fait l’objet d’une précédente cassation (Cass. civ. 1ère, 9 mai 2019, n°18-14.930). Le Tribunal d’instance avait en effet jugé que cette clause devait être déclarée abusive et non écrite, dès lors qu’elle prévoit « une clause de paiement intégral excluant toute résiliation pour un motif légitime et impérieux ». Il en avait déduit que l’organisme d’enseignement devait rembourser l’intégralité du prix à la cliente. Pour casser cette décision, la première chambre civile avait jugé que le tribunal d’instance, avait laissé incertain le fondement juridique de sa décision et qu’en outre il n’avait pas constaté que « le contrat ne pouvait subsister sans cette clause ». En d’autres termes, en imposant le remboursement du prix, les juges du fond avaient raisonné comme si le contrat devait être annulé en son intégralité. C’était implicitement considérer que le contrat ne pouvait subsister sans la clause, sans pour autant le justifier juridiquement. 

 

Or, le juge de renvoi se voit de nouveau censuré, mais uniquement sur la portée de la sanction. 

En effet, cette fois-ci le juge avait bien motivé juridiquement la caractérisation du caractère abusif. Les juges tout en citant une recommandation de la Commission des clauses abusives avaient pris soin de de se fonder sur une règle de droit contraignante : l ‘article R. 132-2 ancien du code de la consommation. Le pourvoi est donc rejeté. La Cour de cassation avait déjà eu l’occasion de juger, comme en l’espèce, que la clause ne permettant pas le remboursement de la somme payée, pour motif légitime ou impérieux, crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. 

Ensuite, elle rappelle que le contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives, si le contrat peut subsister sans celles-ci. C’est sur ce point qu’elle casse de nouveau la décision du fond. En effet, pour dire que le contrat d’enseignement ne peut subsister sans la clause réputée non écrite, le jugement avait énoncé que « la juridiction n’a pas vocation à rédiger les clauses d’un contrat litigieux, mais simplement à constater que celui-ci ne peut subsister en l’état ». Selon la première chambre civile, ces motifs sont « impropres à caractériser l’impossibilité du contrat à subsister sans la clause réputée non écrite ». A cet égard, la CJUE a énoncé que le juge doit apprécier si objectivement, l’élimination d’une clause contractuelle abusive entraîne ou non la nullité du contrat (CJUE 29 avr. 2021, Bank BPH, aff. C-19/20). Il ne s’agit donc pas d’un simple constat. 

 

 

Voir également 

 

Cass. civ. 1ère, 19 janvier 2022, n°20-14.717

 Cass. civ. 1ère, 12 octobre 2016, n°15-25.468

Recommandation N°91-01 Etablissements d’enseignement

Cass. civ. 1èere, 9 mai 2019, n°18-14.930

 

CJUE, 8 décembre 2022, aff. C-600/21 – Caisse régionale de Crédit mutuel de Loire-Atlantique et du Centre Ouest 

  

Contrat entre professionnel et consommateur – Contrat de prêt – Déchéance du terme – Mise en demeure – Clause non négociée  

  

EXTRAIT  

  

« L’article 3, paragraphe 1, et l’article 4 de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens que : sous réserve de l’applicabilité de l’article 4, paragraphe 2, de cette directive, ils s’opposent à ce que les parties à un contrat de prêt y insèrent une clause qui prévoit, de manière expresse et non équivoque, que la déchéance du terme de ce contrat peut être prononcée de plein droit en cas de retard de paiement d’une échéance dépassant un certain délai, dans la mesure où cette clause n’a pas fait l’objet d’une négociation individuelle et crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties découlant du contrat. »  

 

 

  

ANALYSE   

  

Saisie de questions préjudicielles par la Cour de cassation, la CJUE vient préciser que l’article 3, paragraphe 1, et l’article 4 de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que les parties à un contrat de prêt y insèrent une clause contractuelle qui prévoit, de manière expresse et non équivoque, que la déchéance du terme de ce contrat peut être prononcée de plein droit en cas de retard de paiement d’une échéance dépassant un certain délai. 

 

En effet, la seule circonstance qu’une clause comporte une obligation expresse et non équivoque ne saurait la soustraire au contrôle de son caractère abusif à l’aune de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13, sous réserve de l’applicabilité de l’article 4, paragraphe 2, de cette directive. 

 

En effet, étant donné que cette clause ne relève pas de la notion « d’objet principal du contrat », la juridiction nationale doit examiner la clause litigieuse au regard de l’ensemble des circonstances entourant la conclusion du contrat y compris si cette faculté déroge aux règles de droit commun applicables en la matière en l’absence de dispositions contractuelles spécifiques. C’est à travers une telle analyse comparative que le juge national pourra évaluer si et, le cas échéant, dans quelle mesure le contrat place le consommateur dans une situation juridique moins favorable par rapport à celle prévue par le droit national en vigueur (arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus, C421/14, EU:C:2017:60, point 59).  

CJUE, 8 décembre 2022, aff. C-600/21– Caisse régionale de Crédit mutuel de Loire-Atlantique et du Centre Ouest   

  

 Contrat de prêt – Clause relative à la déchéance du terme – déséquilibre significatif 

  

EXTRAIT  

  

« L’article 3, paragraphe 1, et l’article 4 de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens que : un retard de plus de 30 jours dans le paiement d’une échéance de prêt peut, en principe, au regard de la durée et du montant du prêt, constituer à lui seul une inexécution suffisamment grave du contrat de prêt, au sens de l’arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus(C-421/14, EU:C:2017:60).»  

  

ANALYSE   

  

L’article 3 paragraphe 1 de la directive 93/13 énonce qu’une clause d’un contrat n’ayant pas fait l’objet d’une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l’exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.  

Selon l’article 4 de la même directive, le caractère abusif d’une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l’objet du contrat, des circonstances entourant la conclusion du contrat, des autres clauses du contrat et d’un autre contrat dont il dépend.  

 

Dans la décision Banco Primus (arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus (C-421/14), la CJUE avait jugé que   pour apprécier le caractère abusif de la clause relative à la déchéance du terme en raison de manquements du débiteur à ses obligations pendant une période limitée, il incombe au juge d’examiner un certain nombre de critères. Parmi ceux-ci figure la question de savoir si la faculté laissée au professionnel de déclarer exigible la totalité du prêt est prévue pour les cas dans lesquels une telle inexécution revêt un caractère suffisamment grave au regard de la durée et du montant du prêt (pt 66). 

 

La Cour se demande en l’espèce si un retard de plus de trente jours dans le paiement d’une échéance d’un prêt peut constituer à lui seul une inexécution suffisamment grave du contrat de prêt par l’emprunteur, justifiant la déchéance du terme du prêt et l’exigibilité immédiate des sommes dues, au sens de son arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus (C-421/14). 

 

La réponse à cette question est importante pour déterminer si la clause relative à la déchéance du terme du prêt, en raison d’un retard de paiement d’une échéance de plus de trente jours par l’emprunteur, constitue ou non une clause abusive au sens des textes de la directive 93/13 susvisés. 

  

Or, la CJUE énonce qu’un retard supérieur à trente jours dans le paiement d’une seule échéance d’un prêt peut être considéré comme une inexécution suffisamment grave de l’emprunteur par la juridiction nationale. 

 

Donc, la Cour conclut qu’un retard de plus de trente jours dans le paiement d’une échéance de prêt peut, en principe, constituer à lui seul une inexécution suffisamment grave de l’emprunteur, au regard de la durée et du montant du prêt souscrit. Par conséquent, la clause de déchéance du terme du prêt prévoyant l’exigibilité immédiate des sommes dues pour un tel retard de paiement n’est pas abusive a priori.  

CJUE, 8 décembre 2022, aff. C-600/21 – Caisse régionale de Crédit mutuel de Loire-Atlantique et du Centre Ouest 

  

Contrat de prêt – Déchéance du terme – Critères d’appréciation de l’abus  

  

EXTRAIT  

  

« L’arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus (C-421/14, EU:C:2017:60), doit être interprété en ce sens que les critères qu’il dégage pour l’appréciation du caractère abusif d’une clause contractuelle, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, notamment du déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat que cette clause crée au détriment du consommateur, ne peuvent être compris ni comme étant cumulatifs ni comme étant alternatifs, mais doivent être compris comme faisant partie de l’ensemble des circonstances entourant la conclusion du contrat concerné, que le juge national doit examiner afin d’apprécier le caractère abusif d’une clause contractuelle, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13. »  

 

 

  

ANALYSE   

  

Saisie de questions préjudicielles par la Cour de cassation, la CJUE vient préciser les critères d’appréciation du caractère abusif, posés par l’arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus (C-421/14) 

Dans la décision Banco Primus, la CJUE avait constaté qu’afin de déterminer si une clause produit un déséquilibre significatif au détriment du consommateur, au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 93/13, la juridiction nationale doit examiner notamment si la faculté laissée au professionnel de déclarer exigible la totalité du prêt dépend de l’inexécution par le consommateur d’une obligation qui présente un caractère essentiel dans le cadre du rapport contractuel en cause, si cette faculté est prévue pour les cas dans lesquels une telle inexécution revêt un caractère suffisamment grave au regard de la durée et du montant du prêt, si ladite faculté déroge aux règles de droit commun applicables en la matière en l’absence de dispositions contractuelles spécifiques et si le droit national confère au consommateur des moyens adéquats et efficaces lui permettant, lorsque celui-ci est soumis à l’application d’une telle clause, de remédier aux effets de l’exigibilité du prêt (CJUE, arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus (C-421/14), pt 66). 

 

La Cour de cassation s’interrogeait en effet sur le point de savoir si ces critères posés pour l’appréciation du caractère abusif de la clause relative à la déchéance du terme en raison de manquements du débiteur à ses obligations pendant une période limitée sont cumulatifs ou alternatifs.  

 

Selon la CJUE ces critères ne sont ni cumulatifs ni alternatifs et la liste fournie au point 66 de l’arrêt n’est pas exhaustive. Elle considère en effet que considérer qu’ils sont cumulatifs ou alternatifs «reviendrait à restreindre cet examen du juge national ». Rappelant que l’article 4, paragraphe 1, de la directive 93/13 définit de façon particulièrement large les critères permettant d’effectuer ledit examen en englobant expressément « toutes les circonstances » qui entourent la conclusion du contrat concerné  (arrêt du 15 mars 2012, Pereničová et Perenič, C-453/10, EU:C:2012:144, point 42), elle en déduit que les critères posés par la décision Banco Primus « doivent être compris comme faisant partie de l’ensemble des circonstances entourant la conclusion du contrat concerné », 

    

Cass. 1ère civ. , 7 décembre 2022, n° 21-18.673 

Contrat de prêt — Prescription — Clause « réputée non écrite » — Principe d’effectivité – Action en constatation du caractère abusif d’une clause – Clause abusive dans les contrats conclus avec les consommateurs – Contrats de prêt immobilier – Prêt libellé en devise étrangère (franc suisse) 

 

EXTRAITS : 

« l’article 6, § 1, et l’article 7, § 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, lus à la lumière du principe d’effectivité, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale soumettant l’introduction d’une demande par un consommateur aux fins de la constatation du caractère abusif d’une clause figurant dans un contrat conclu entre un professionnel et ce consommateur, à un délai de prescription (et) aux fins de restitution de sommes indument versées sur le fondement de telles clauses abusives à un délai de prescription de 5 ans, dès lors que ce délai commence à courir à la date de l’acception de prêt de telle sorte, que le consommateur a pu, à ce moment-là ignorer l’ensemble de ses droits découlant de cette directive » 

 

ANALYSE : 

La première chambre civile de la Cour de cassation rappelle la décision BNP Paribas Personnal Finance dans laquelle la CJUE, sur le fondement du principe d’effectivité de l’absence du caractère contraignant de la clause abusive (Dir. 1993/13, art. 6, § 1 et art. 7, § 1), avait jugé que la demande tendant à voir une clause abusive réputée non écrite n’est pas soumise à la prescription. Ainsi, en droit français, la demande introduite par un consommateur, visant à faire constater le caractère abusif d’une clause figurant dans un contrat l’unissant à un professionnel, ne peut être soumise à la prescription quinquennale du Code civil. 

L’arrêt concerne de nouveau les contrats de prêts immobiliers libellés en francs suisse pour lesquels la Cour de cassation avait déjà statué en ce sens (La demande qui tend à réputer non écrite une clause abusive n’est pas soumise à la prescription quinquennale).

Voir également :

Cass. com., 8 avril 2021, n° 19-17.997

CJUE, 10 JUIN 2021, C-776/19, BNP Paribas Personal Finance / CJUE 10 juin 2021, C-776/19 à C-782/19, BNP Paribas Personal Finance SA.

Cass. civ. 1ère, 30 mars 2022, n° 19-22.074

Cass. civ. 1ère, 30 mars 2022, n° 19-12.947

Tribunal Judiciaire de Cahors, 18 novembre 2022, n° RG 19/00001 

Clauses abusives – contrats – juge de l’exécution – consommateur – prêt – suisse – taux d’intérêt –risque – taux de change 

 

EXTRAITS : 

 

Sur l’existence de clauses abusives : 

 

« une clause d’indexation faisant supporter le risque de change inhérent au contrat par le consommateur est une clause qui crée un déséquilibre significatif au détriment de celui-ci et qui, partant, est abusive. » 

 

« la clause de reconnaissance d’information contenue par le bordereau d’acceptation du contrat de prêt HELVET IMMO […] ne peut exonérer BNP PPF de sa responsabilité et ne peut valoir, par le consommateur, reconnaissance de la bonne exécution par le professionnel de ses obligations  d’information, de conseil et de mise en garde. 

Il convient de constater que cette clause crée même un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur. Cette clause est également abusive et doit donc être réputée non écrite conformément à l’article L.241-1 du code de la consommation. » 

 

« Dans le prêt HELVET IMMO, trois clauses sont relatives à la variation du taux d’intérêt et utilisent trois indices différents selon l’hypothèse […] ces trois clauses relatives à la révision du taux d’intérêt ne sont pas conformes aux exigences de transparence fixées par la CJUE dès lors que les consommateurs ne peuvent pas comprendre les effets concrets qu’elles auront sur leurs obligations financières. Il en résulte que ces clauses d’intérêt ne sont ni claires ni intelligibles et, en conséquence, doivent être déclarées abusives et réputées non écrites conformément à l’article L.241-1 du code de la consommation. » 

Sur l’anéantissement rétroactif du contrat de prêt : 

 

« Les stipulations de la clause implicite d’indexation nécessitent une lecture croisée et globale en ce qu’elles sont éclatées dans de nombreux paragraphes du contrat. Elles constituent un ensemble indivisible, de sorte que le contrat dépourvu de l’ensemble de ces stipulations n’a plus aucun sens. Le juge n’a pas la possibilité de le réécrire pour lui permettre de fonctionner. Il convient dès lors de juger que le contrat de prêt HELVET IMMO ne peut pas subsister sans cette clause implicite d’indexation. Les clauses de révision du taux d’intérêt sont également essentielles au fonctionnement du contrat et celui-ci ne peut subsister sans elles. En conséquence, il y a lieu de juger que le contrat HELVET IMMO proposé par BNP PPF et souscrit par D Y doit être annulé dans son ensemble. » 

 

ANALYSE : 

 

En l’espèce, en 2009, BNP PPF a consenti à X un prêt afin de financer l’acquisition d’un appartement pour un montant en principal de 180.188,89 francs suisses, outre les intérêts conventionnels au taux variable initial de 4,60% et les accessoires (cf offre HELVET IMMO n°65086287 datée du 9 mars 2009 pour 121.749,25 euros empruntés avec un TEG affiché de 5,11%.). X ayant cessé de procéder aux règlements de ses échéances, BNP PPF a notamment prononcé la déchéance du terme et l’exigibilité du prêt le 10/02/2017 après l’avoir mis en demeure de payer les sommes dont il était redevable. 

Par acte du 2/01/2019, BNP PPF a fait délivrer une assignation devant le juge de l’exécution près le tribunal de grande instance de Cahors pour une audience d’orientation et sommation de prendre connaissance du cahier des conditions de la vente et d’assister aux audiences d’orientation et d’adjudication. L’affaire a été renvoyée à plusieurs reprises à la demande des parties. 

A l’audience du 17/06/2022, BNP PPF a, entre autres, demandé au juge de l’exécution près du tribunal judiciaire de Cahors de débouter X de ses demandes et contestations, de juger que le montant de la créance BNP Paribas Personal Finance en principal, accessoires, intérêts et frais s’élève à la somme globale de 148.873,31 euros selon décompte arrêté au 17/06/2022 avec intérêts au taux contractuel de 2,14%, à parfaire jusqu’à la date effective de paiement outre les dépens sur la présente saisie, et de juger que le quantum de la créance revendiquée par BNP Paribas Personal Finance est bien fondé et justifié. A titre subsidiaire, dans le cas où la vente amiable serait accordée par le juge de l’exécution, BNP souhaite que soient jugées irrecevables les demandes de M.Y formées sur le fondement des clauses abusives pour défaut d’intérêt à agir. De plus, BNP demande à ce que les clauses relatives au risque de change et à la variation du taux d’intérêt soient jugées comme ne relevant pas du contrôle des clauses abusives en ce qu’elles sont rédigées de manière claire et compréhensible. A titre infiniment subsidiaire, BNP demande à ce que les clauses relatives au risque de change et à la variation du taux d’intérêt soient jugées comme ne créant pas de déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et, en conséquence, à débouter M.Y de ses demandes sur le fondement des clauses abusives. 

 

Après avoir relevé que X avait bien un intérêt à agir sur le fondement des clauses abusives, le tribunal se penche sur la question de l’existence de ces clauses abusives. 

 

Il rappelle tout d’abord que, selon l’article L 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. L’appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l’objet principal du contrat ni sur l’adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.  

Il énonce ensuite que le caractère abusif d’une clause s’apprécie « en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu’à toutes les autres clauses du contrat ». Le tribunal termine par expliquer que le juge national a l’obligation de relever d’office le caractère abusif d’une clause au regard des critères posés par les décisions de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) lorsqu’il dispose des éléments de fait et de droit à cet effet (Civ. 1ère, 20 avril 2022, n°20-16.942). Il doit en effet vérifier si la clause d’indexation du prêt est claire et intelligible pour au consommateur moyen, et notamment si l’emprunteur a reçu des informations suffisantes et exactes afin qu’il puisse évaluer le risque des conséquences économiques négatives de cette clause sur ses obligations financières. 

 

Concernant la clause d’indexation, le tribunal commence par rappeler que le déséquilibre significatif induit par une clause d’indexation ou une clause de remboursement en devise étrangère est caractérisé par l’absence de transparence de cette clause (Civ. 1ère 20 avril 2022, n°20-16.316). 

La CJUE s’est prononcée au regard de la clause d’indexation implicite du prêt HELVET IMMO, par deux arrêts du 10 juin 2021 (CJUE, 10 juin 2021, aff. C 609/19 et aff. jointes C- 776/19 à C-782/19). Elle y précise en outre les différents critères qui doivent être appliqués par les juges nationaux pour déterminer si la clause d’indexation du prêt HELVET IMMO, compte tenu des spécificités et du fonctionnement singulier de ce contrat, est abusive. 

En l’espèce, le prêt HELVET IMMO ne contenant pas les termes « risque de change », ni aucun autre avertissement explicite relatif aux risques inhérents aux prêts libellés sur une devise étrangère, la CJUE estime que compte tenu des connaissances du professionnel relatives au contexte économique prévisible et des moyens dont il dispose pour anticiper l’évolution d’un cours de change, une clause d’indexation faisant supporter le risque de change inhérent au contrat par le consommateur est une clause qui crée un déséquilibre significatif au détriment de celui-ci et qui, partant, est abusive. 

Le tribunal explique ensuite que, concernant la clause implicite d’indexation du prêt HELVET IMMO, celle-ci est abusive en ce qu’elle créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, au détriment de M.Y et au profit de BNP PPF, avec un risque de change non plafonné. En effet, le risque de change supporté par l’emprunteur n’est pas limité car l’exercice de l’option par ce dernier est si onéreux qu’il s’avère en pratique inenvisageable. 

 

Concernant la clause de reconnaissance d’information contenue par le bordereau d’acceptation du contrat de prêt HELVET IMMO qui stipule que les « emprunteurs déclarent (…) avoir été informés que le présent crédit comporte des opérations de change pouvant avoir un impact sur son plan de remboursement », celle-ci ne peut exonérer BNP PPF de sa responsabilité et ne peut valoir, par le consommateur, reconnaissance de la bonne exécution par le professionnel de ses obligations  d’information, de conseil et de mise en garde. 

Le tribunal décide qu’il convient de constater que cette clause crée même un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat, au détriment du consommateur. Cette clause est, par conséquent, également abusive et doit donc être réputée non écrite conformément à l’article L.241-1 du code de la consommation. 

 

Enfin, concernant les trois clauses relatives à la variation du taux d’intérêt du prêt HELVET IMMO, celles-ci utilisent trois indices différents selon l’hypothèse : le SWAP francs suisses 5 ans, le TME ou le TIBEUR. 

Or, comme le fait valoir M. Y, ces indices sont peu compréhensibles pour un consommateur moyen et ce d’autant que BNP PPF n’a pas mis à sa disposition les historiques de variation de ces indices et n’a pas explicité les effets concrets que ces indices auront sur ses obligations financières. En conséquence, ces trois clauses relatives à la révision du taux d’intérêt ne sont pas conformes aux exigences de transparence fixées par la CJUE dès lors que les consommateurs ne peuvent pas comprendre les effets concrets qu’elles auront sur leurs obligations financières. Il en résulte que ces clauses d’intérêt ne sont ni claires ni intelligibles et, en conséquence, doivent être déclarées abusives et réputées non écrites conformément à l’article L.241-1 du code de la consommation. 

 

Après avoir rappelé que, selon l’article L.241-1 du code de la consommation : « Les clauses abusives sont réputées non écrites. (…) Les dispositions du présent article sont d’ordre public » ; le tribunal explique ensuite que ce même article L.241-1 du code de la consommation précise, en conséquence du réputé non écrit d’une clause abusive, que : « Le contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s’il peut subsister sans ces clauses ». Les alinéas 6 et 8 de l’article L. 132-1 ancien du code de la consommation, eux, disposent que : « les clauses abusives sont réputées non écrites » et que « le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s’il peut subsister sans lesdites clauses ». 

 

Selon le tribunal, les stipulations de la clause implicite d’indexation étant éclatées dans de nombreux paragraphes du contrat et constituant un ensemble indivisible, de sorte que le contrat dépourvu de l’ensemble de ces stipulations n’aurait plus aucun sens, il convient dès lors de juger que le contrat de prêt HELVET IMMO ne peut pas subsister sans cette clause implicite d’indexation. 

Concernant les clauses de révision du taux d’intérêt, celles-ci sont également essentielles au fonctionnement du contrat et ce dernier ne peut subsister sans elles. En conséquence, il y a lieu de juger que le contrat HELVET IMMO proposé par BNP PPF et souscrit par D Y doit être annulé dans son ensemble. 

 

Voir également : 

–  Civ. 1ère, 20 avril 2022, n°20-16.942

Civ. 1ère 20 avril 2022, n°20-16.316

Cass. civ. 1, 9 novembre 2022, n° 21-16.476 

Prêt immobilier en francs suisses — Clause abusive — question préjudicielle – clause de déchéance du terme 

 

EXTRAITS : 

« 9. En l’espèce, pour caractériser l’exigibilité de la créance de la banque et ordonner la vente forcée, la cour d’appel a fait application de la clause du contrat dispensant l’organisme prêteur de toute mise en demeure ou sommation préalable au prononcé de la déchéance du terme consécutive au défaut de paiement d’une seule échéance à la date prévue.  

  1. Au regard des griefs formulés par le moyen et des questions préjudicielles précitées (Cass. civ. 1ère, 16 juin 2021, pourvoi n° 20-12.154), la décision de la Cour de justice de l’Union européenne à intervenir est de nature à influer sur la solution du présent pourvoi, de sorte qu’il y a lieu de surseoir à statuer jusqu’au prononcé de celle-ci »

 

ANALYSE : 

A la suite d’un défaut de paiement des échéances du prêt immobilier en francs suisses, la banque a délivré un commandement aux fins de vente forcée, vente ordonnée ensuite par le tribunal de l’exécution forcée. Pour caractériser l’exigibilité de la créance de la banque et ordonner la vente forcée, la cour d’appel a fait application de la clause du contrat dispensant l’organisme prêteur de toute mise en demeure ou sommation préalable au prononcé de la déchéance du terme consécutive au défaut de paiement d’une seule échéance à la date prévue. 

L’emprunteur a alors formé un pourvoi considérant que le juge devait écarter les clauses présentant un caractère abusif.  

La Cour de cassation a commencé par rappeler l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 26 janvier 2017 (CJUE, 26 janvier 2017, C-421/14), aux termes duquel le juge, saisi du caractère abusif de la clause relative à la déchéance du terme en raison de manquements du débiteur à ses obligations pendant une période limitée, doit vérifier si « la faculté laissée au professionnel de déclarer exigible la totalité du prêt dépend de l’inexécution par le consommateur d’une obligation qui présente un caractère essentiel dans le cadre du rapport contractuel en cause, si cette faculté est prévue pour les cas dans lesquels une telle inexécution revêt un caractère suffisamment grave au regard de la durée et du montant du prêt, si ladite faculté déroge aux règles de droit commun applicables en la matière en l’absence de dispositions contractuelles spécifiques et si le droit national prévoit des moyens adéquats et efficaces permettant au consommateur soumis à l’application d’une telle clause de remédier aux effets de ladite exigibilité du prêt ». 

Or, la première chambre civile relève que par un arrêt du 16 juin 2021 (Cass. civ. 1, 16 juin 2021, n°20-12-154), la Cour de cassation a posé cinq questions préjudicielles à la Cour de justice de l’Union européenne portant sur ces interrogations : 

1°) Les articles 3, §§ 1 et 4, de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent, dans les contrats conclus avec les consommateurs, à une dispense conventionnelle de mise en demeure, même si elle est prévue de manière expresse et non équivoque au contrat ?

2°) L’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne du 26 janvier 2017, Banco Primus, C-421/14, doit-il être interprété en ce sens qu’un retard de plus de trente jours dans le paiement d’un seul terme en principal, intérêts ou accessoires peut caractériser une inexécution suffisamment grave au regard de la durée et du montant du prêt et de l’équilibre global des relations contractuelles ?

3°) Les articles 3, §§ 1 et 4, de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une clause prévoyant que la déchéance du terme peut être prononcée en cas de retard de paiement de plus de trente jours lorsque le droit national, qui impose l’envoi d’une mise en demeure préalable au prononcé de la déchéance du terme, admet qu’il y soit dérogé par les parties en exigeant alors le respect d’un préavis raisonnable ?

4°) Les quatre critères dégagés par la Cour de justice de l’Union européenne dans son arrêt du 26 janvier 2017, Banco Primus (C-421/14), pour l’appréciation par une juridiction nationale de l’éventuel caractère abusif de la clause relative à la déchéance du terme en raison de manquements du débiteur à ses obligations pendant une période limitée, sont-ils cumulatifs ou alternatifs ?

5°) Si ces critères sont cumulatifs, le caractère abusif de la clause peut-il néanmoins être exclu au regard de l’importance relative de tel ou tel critère ? 

Observant que la décision de la Cour de justice de l’Union européenne à intervenir sur ces questions est de nature à influer sur la solution ayant trait au caractère abusif de la dispensant l’organisme prêteur de toute mise en demeure ou sommation préalable au prononcé de la déchéance du terme, les magistrats de la Cour de cassation ont décidé de surseoir à statuer jusqu’à à la décision de la Cour de justice de l’Union européenne. 

 

Voir également : 

-  CJUE 26 janvier 2017, C-421/14 

Cass. civ. 1, 16 juin 2021, n°20-12-154 

CJUE, 27 octobre 2022, aff. C-485/21 – S. V.  

 

Notion de “consommateur” – Notion de “professionnel” – Copropriétaire – Contrat de syndic 

  

EXTRAIT  

  

« L’article 1er, paragraphe 1, et l’article 2, sous b) et c), de la directive 93/13/CEE du conseil, du 5 avril 1993, concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, doivent être interprétés en ce sens qu’une personne physique, propriétaire d’un appartement dans un immeuble en copropriété, doit être considérée comme étant un « consommateur », au sens de cette directive, lorsqu’elle conclut un contrat avec un syndic aux fins de l’administration et de l’entretien des parties communes de cet immeuble, pour autant qu’elle n’utilise pas cet appartement à des fins qui relèvent exclusivement de son activité professionnelle. La circonstance qu’une partie des prestations fournies par ce syndic au titre de ce contrat résulte de la nécessité de respecter des exigences spécifiques en matière de sécurité et d’aménagement du territoire, prévues par la législation nationale, n’est pas de nature à soustraire ledit contrat au champ d’application de ladite directive, […]. »  

  

ANALYSE   

  

La CJUE était saisie de la question de savoir si l’article 1er, paragraphe 1, et l’article 2, sous b) et c), de la directive 93/13 doivent être interprétés en ce sens qu’une personne physique, propriétaire d’un appartement dans un immeuble en copropriété, doit être considéré comme étant un « consommateur », au sens de cette directive, lorsque cette personne conclut un contrat avec un syndic aux fins de l’administration et de l’entretien des parties communes de cet immeuble, dont certaines dispositions sont régies par la législation nationale […]. 

 

La Cour a répondu comme suit :  

D’après l’article 3, paragraphe 1, la directive 93/13 est applicable aux clauses des « contrats conclus entre un professionnel et un consommateur » dont celles qui n’ont « pas fait l’objet d’une négociation individuelle » (voir, en ce sens, ordonnance du 19 novembre 2015, Tarcău, C-74/15, EU:C:2015:772, point 20 et jurisprudence citée). 

 

Les règles établies par la directive doivent être appliquées à « tout contrat » conclu entre un professionnel et un consommateur, tels que définis à l’article 2, sous b) et c), de ladite directive (voir, en ce sens, ordonnance du 14 septembre 2016, Dumitraș, C-534/15, EU:C:2016:700, points 26 et 27ainsi que jurisprudence citée). 

Ainsi, est un consommateur toute personne physique qui a agi à des fins qui n’entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle. A contrario, est un professionnel toute personne physique ou morale qui agit dans le cadre de son activité professionnelle, qu’elle soit publique ou privée (voir, en ce sens, arrêt du 21 mars 2019, Pouvin et Dijoux, C-590/17, EU:C:2019:232, point 22). 

La cour est ensuite venue rappeler que c’est par référence à la qualité des contractants, selon qu’ils agissent ou non dans le cadre de leur activité professionnelle que la directive susmentionnée définit les contrats auxquels elle s’applique (arrêt du 21 mars 2019, Pouvin et Dijoux, C-590/17, EU:C:2019:232, point 23ainsi que jurisprudence citée). 

 

S’agissant de la notion de « consommateur », il est de jurisprudence constante de la Cour que celle-ci a un caractère objectif. Elle doit être déterminée au regard d’un critère fonctionnel, consistant à apprécier si le rapport contractuel en cause s’inscrit dans le cadre d’activités étrangères à l’exercice d’une profession. Il incombe au juge national d’apprécier au cas par cas si le contractant concerné peut être qualifié de « consommateur » (ordonnance du 14 septembre 2016, Dumitraș, C-534/15, EU:C:2016:700, point 32et jurisprudence citée). 

 

S’agissant de la notion de « professionnel », la Cour rappelle que le législateur européen a entendu consacrer une conception large de cette notion, de telle sorte que chaque personne physique ou morale doit être considérée comme relevant de celle-ci, dès lors qu’elle exerce une activité professionnelle, y compris les missions à caractère public et d’intérêt général (voir, en ce sens, arrêt du 17 mai 2018, Karel de Grote – Hogeschool Katholieke Hogeschool Antwerpen, C-147/16, EU:C:2018:320, points 48 à 51et jurisprudence citée). 

 

En l’espèce, une personne physique, propriétaire, est liée par un contrat à un syndic de copropriété ce qui concerne l’administration et l’entretien des parties communes de l’immeuble en copropriété. Si la personne physique n’utilise pas cet appartement à des fins qui relèvent exclusivement de son activité professionnelle, la Cour énonce qu’il y a lieu de considérer que ladite personne agit en qualité de « consommateur ». Même s’il n’est pas contesté que le syndic agit en tant que professionnel et perçoit des charges annuelles pour ses activités, la Cour est venue poser le principe selon lequel la circonstance qu’une partie des activités réalisées par le syndic résultent de la nécessité de respecter des exigences spécifiques en matière de sécurité et d’aménagement du territoire, prévues par la législation nationale applicable, n’est pas de nature à soustraire ces activités au champ de la directive et donc des clauses abusives.  

Par conséquent, la présence d’exigences spécifiques, établies par la législation nationale, en matière de sécurité et d’aménagement du territoire ne justifie pas la présence de clauses abusives. 

 

La Cour précise ensuite que lorsque de telles dispositions législatives sont impératives, les clauses contractuelles reflétant ces dispositions sont exclues du champ d’application de cette directive, une telle exclusion n’implique pas que la validité d’autres clauses, figurant dans le même contrat et ne reflétant pas lesdites dispositions, ne pourrait pas être appréciée par le juge national au regard de ladite directive (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2021, Trapeza Peiraios, C-243/20, EU:C:2021:1045, point 39 et jurisprudence citée). 

 

Voir également :  

  

Recommandation n° 11-01 relative aux contrats proposés par les syndics de copropriété   

Recommandation n° 96-01 relative aux contrats proposés par les syndics de copropriété  

 

Cass civ. 2ème 27 octobre 2022 n° 21-10.739 

 

 

EXTRAITS : 

« Il entre dans les pouvoirs du premier président, statuant en matière de fixation des honoraires d’avocat, d’examiner le caractère abusif des clauses des conventions d’honoraires lorsque le client de l’avocat est un non-professionnel ou un consommateur ». 

 

ANALYSE : 

Une convention d’honoraires est conclue le 20 mars 2014 avec un avocat, pour un litige opposant une femme à son époux, celle-ci prévoyant le paiement d’un honoraire forfaitaire fixe de 3500 € TTC en cas de dessaisissement du professionnel par le client et une clause d’indemnité de dédit stipulant, dans le même cas, que les honoraires à courir seraient dûs dans la limite de 3 000 € TTC.  

La cliente de l’avocat a mis fin au mandat par la suite, en 2015, et a saisi le bâtonnier de l’ordre des avocats du barreau de Paris aux fins de contester le montant des honoraires. 

A l’appui de son pourvoi formé contre l’ordonnance rendue par le premier président de la cour d’appel de Paris en date du 27 novembre 2020, l’avocat contestait notamment le caractère abusif des clauses de dédit contenues dans la convention d’honoraires aux motifs que d’une part, la procédure spéciale de contestation des honoraires issue de l’article 174 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d’avocat ne permet pas au bâtonnier et sur recours, au premier président, de statuer sur l’existence ou la validité du mandat confié à l’avocat. Ce faisant, le premier président aurait excédé ses pouvoirs en réputant non écrite une clause contenue dans une convention d’honoraires d’avocat. 

D’autre part, le déséquilibre significatif qui permet de caractériser l’abus s’apprécie au regard de l’équilibre général des prestations tirées de la convention. Or, si la clause de dédit n’était pas réciproque au bénéfice du consommateur, la contrepartie à celle-ci résidait dans la fixation d’un honoraire ferme sans dépassement et à un montant largement inférieur aux honoraires pratiqués sous la forme d’un taux horaire. Dès lors, l’ordonnance rendue est privée de base légale au regard de l’article L. 212-1 du Code de la consommation 

En réponse, la Cour de cassation commence par rappeler l’arrêt du 4 juin 2009, Pannon GSM (C-243/08, EU:C:2009:350)  qui impose au juge national d’examiner d’office le caractère abusif des clauses contenues dans un contrat conclu avec un consommateur ou un non professionnel, dès lors qu’il dispose des éléments de faits et de droit nécessaires à cet examen. 

Elle relève que l’appréciation du déséquilibre significatif entre dans la compétence du premier président statuant en matière de contestation d’honoraires et que celui-ci ne se prononce pas sur la validité du mandat en examinant le caractère abusif des clauses contenues dans un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur ou un non professionnel. 

Elle approuve ensuite le premier président d’avoir caractérisé le déséquilibre significatif en retenant -ci d’une que l’avocat pourrait recevoir le paiement de la totalité ou de la quasi-totalité de ses honoraires alors qu’il n’exécuterait que deux des six prestations qu’il s’était engagé à accomplir et que le montant du dédit apparaissait disproportionné au regard des actes effectués. Le premier président est également approuvé pour avoir d’autre part fondé le caractère abusif sur le défaut de réciprocité de la clause de dédit, aucune clause de ce type n’étant prévue au profit de la cliente en cas de dessaisissement de l’avocat. 

Dès lors, le premier président a bien caractérisé le déséquilibre significatif et le moyen du pourvoi formé par l’avocat doit être rejeté.  

 

Voir également : 

-  CJCE, 4 juin 2009, C-243/08, Pannon GSM