Cass. civ. 1ère, 2 février 2022, 19-20.640
Contrat de prêt – Office du juge – Examen d’office – Principe de concentration temporelle
EXTRAITS :
« Vu les articles 7, § 1, de la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, L. 132-1, alinéa 1er, devenu L. 212-1, alinéa 1er du code de la consommation, et 910-4 du code de procédure civile ;
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Le principe de concentration temporelle des prétentions posé par le troisième de ces textes ne s’oppose pas à l’examen d’office du caractère abusif d’une clause contractuelle par le juge national, qui y est tenu dès lors qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet.
En statuant ainsi, sans examiner d’office le caractère abusif des clauses invoquées au regard des éléments de droit et de fait dont elle disposait, la cour d’appel a violé les textes susvisés. ».
ANALYSE :
Si la Cour de cassation, par cet arrêt, rappelle l’exigence du relevé d’office du contrôle du caractère abusif de clauses contractuelles présentes dans des contrats entre un professionnel et un consommateur, lesquelles doivent être écartées dès lors que le juge national « dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet » en s’appuyant sur la jurisprudence européenne, (v. CJCE, 4 juin 2009, Pannon, C243/08), elle vient également préciser l’étendue de cet impératif en cas de conflit avec les règles de procédure civile d’appel.
Parmi ces règles était ici en jeu le principe de concentration temporelle des prétentions posé par l’article 910-4 du code de procédure civile selon lequel “A peine d’irrecevabilité, relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond. L’irrecevabilité peut également être invoquée par la partie contre laquelle sont formées des prétentions ultérieures”.
La cour d’appel avait déclaré irrecevables les prétentions d’une débitrice d’un contrat de prêt visant à obtenir l’annulation de stipulations contractuelles abusives à raison d’un défaut de présentation desdites prétentions dès le premier jeu de conclusions d’appel, conformément aux dispositions de l’article 910-4 du code de procédure civile.
L’arrêt est cassé au motif que “Le principe de concentration temporelle des prétentions posé par le troisième de ces textes ne s’oppose pas à l’examen d’office du caractère abusif d’une clause contractuelle par le juge national, qui y est tenu dès lors qu’il dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet”.
Ainsi la cour d’appel ayant déclaré irrecevables ces prétentions, puisque prises en violation du principe de concentration temporelle, ne satisfait pas à l’obligation faite au juge national d’examiner d’office le caractère abusif d’une clause contractuelle dès qu’il « dispose des éléments de droit et de fait nécessaires à cet effet ».
Le principe de concentration temporelle des prétentions prévue à l’article 910-4 du code de procédure civile ne saurait donc paralyser l’exigence du contrôle d’office du caractère abusif d’une clause contractuelle.